L'Afrique, futur Eldorado des télécoms

Comme en témoigne la volonté d’Orange de grossir sur le continent africain, ce marché aiguise l’appétit des opérateurs. Pour le cabinet BearingPoint, les perspectives de croissance demeurent particulièrement élevées dans le mobile, malgré une concurrence féroce qui met parfois à mal les investissements.
Pierre Manière
Selon une étude de Deloitte, le nombre de smartphones devrait doubler d’ici à 2017, et dépasser les 350 millions d’appareils.

Ces derniers mois, Orange n'avait pas fait mystère de ses ambitions en Afrique. Après avoir renforcé sa participation dans l'opérateur égyptien Mobinil, en février dernier, le géant français des télécoms a annoncé lundi être entré « en négociations exclusives » avec l'indien Barthi Airtel, pour mettre la main sur ses filiales au Burkina Faso, au Congo, au Tchad et en Sierra Leone. Au total, ces actifs représentent quelques 9 millions d'abonnés, pour un chiffre d'affaires avoisinant les 600 millions d'euros. L'opérateur historique français fait montre d'un sacré appétit pour le continent africain. Et pour cause : dans la zone Afrique et Moyen-Orient, Orange compte 110 millions de clients. En 2014, le groupe a réalisé un chiffre d'affaires de 5,7 milliards d'euros (contre près de 40 milliards au niveau mondial), en progrès de 7% sur un an.

Au regard de ces chiffres, on comprend mieux pourquoi Orange, à l'instar de nombreux autres opérateurs, accélère sur le continent africain. « C'est un secteur assez énorme, constate Jean-Michel Huet, spécialiste des télécoms en Afrique pour BearingPoint. C'est la région du monde qui affiche la plus forte croissance. » D'après lui, « il y a 20 ans, il n'y avait rien, alors qu'aujourd'hui, 70% des Africains disposent d'un téléphone mobile. » Un engouement qui constitue un véritable catalyseur économique, en témoigne l'essor des utilisateurs de services financiers à partir de ces terminaux.

Un marché du mobile à 48,5 milliards d'euros

Singulier, le marché africain se caractérise par un règne (presque) sans partage du mobile, qui représente 60% des connexions Internet. Le continent est en effet passé à côté de l'étape du fixe. D'après Jean-Michel Huet, celui-ci affiche un taux de pénétration de seulement 2%, et ne concerne que les administrations et les grandes entreprises. Pour gagner en compétitivité et attirer les investisseurs étrangers, les Etats tentent de faire leur retard. Mais du côté des opérateurs, le mobile demeure la priorité.

Pourquoi ? Surtout parce qu'il reste beaucoup d'individus à équiper. Actuellement, le marché mobile africain compte 456 millions de clients uniques, pour un chiffre d'affaires global de 48,5 milliards d'euros (6% du marché mondial). Or, selon BearingPoint :

 « Un tiers des 15 ans et plus n'a pas accès à la téléphonie mobile, soit 227 millions de clients potentiels. Sur cette population, les plus gros gisements de clients se trouvent en Ethiopie (30 millions de clients potentiels), au Nigéria (24 millions), en République démocratique du Congo (19,5 millions) et en Egypte (12 millions). »

En outre, toujours selon le cabinet :

« L'Afrique peut aussi compter sur une natalité très forte (4,7 enfants par femme en 2013), avec un réservoir de 463 millions de jeunes de moins de 15 ans qui constitue ses futurs clients. »

In fine, BearingPoint évalue ainsi le marché potentiel supplémentaire à 17,9 milliards d'euros. Parmi les catalyseurs de cette possible croissance, la démocratisation des smartphones low cost joue un rôle clé. Ainsi, selon une étude du cabinet Deloitte, le nombre de ces terminaux devrait doubler d'ici à 2017, et dépasser les 350 millions d'appareils.

Résultat, les opérateurs cherchent à élargir au plus vite leur couverture 3G, et commencent à développer la 4G, même si cette technologie reste balbutiante. C'est notamment le cas au Maroc. Le 13 juillet dernier, l'opérateur historique, Maroc Telecom, a lancé son service Internet 4G+. Même stratégie pour le sud-africain MTN. Premier opérateur du continent (devant Orange), celui-ci a annoncé le déploiement de la 4G LTE en Ouganda au début du mois.

Une concurrence effrénée

Si le potentiel du marché africain est alléchant, les opérateurs mobiles sont toutefois confrontés à de nombreux freins. Outre le coût élevé des licences ou la lourde taxation des importations de téléphones mobiles, la concurrence bride souvent les déploiements des infrastructures. « En 15 ans, on est passé de 60 à 180 opérateurs mobiles sur le continent, explique Jean-Michel Huet. En Somalie, par exemple, on compte 9 licences ! » Ainsi, dans de nombreux pays, les opérateurs se sont livrés une guerre des prix telle que beaucoup se retrouvent à court de moyens pour investir dans leurs réseaux. Comme en Europe, les débats liés à la consolidation pour augmenter les prix, et donc retrouver de bons niveaux d'investissements, sont donc brûlants.

Pierre Manière

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Commentaires 3
à écrit le 31/07/2015 à 9:25
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Dans un continent où les peuples manquent de tout, n'y a t'il pas des investissements plus urgents à réaliser (école, hôpital, accès à l'eau, toilettes, nourriture, vaccin) Pauvre monde

le 31/07/2015 à 11:32
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Bien sûr Apprendre à faire plutôt que faire et pour tout cela un bon reseau de télécommunucations pour plus d'éfficacité. je ne vois là aucune incompatibilité : au contraire !

à écrit le 31/07/2015 à 9:22
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La difficulté en Afrique n'est pas d'investir mais de pouvoir le faire sans ce faire racketter Le potentiel est énorme tous les jeunes veulent du high tech A+

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