Méga-bonus chez Publicis : contestation silencieuse à l'assemblée générale

Deux résolutions ont été rejetées par les actionnaires. Le méga-bonus de 16 millions d'euros de Maurice Lévy a été longuement justifié par la direction, maispeu critiqué par les petits porteurs.
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L'assemblée générale de Publicis, qui s'est tenue mardi matin, a vu les actionnaires rejeter deux résolutions  proposées par la direction. Ces résolutions extraordinaires (qui requéraient une majorité des deux tiers) auraient permis d'augmenter le capital soit en période d'OPA soit avec une décote pouvant aller jusqu'à 10% sans droit préférentiel de souscription. La direction fait tout de même mieux que l'année précédente : six résolutions extraordinaires avaient alors été rejetées. La contestation s'est aussi appliquée aux rémunérations des cadres dirigeants : les résolutions à ce sujet ont été adoptées de justesse, avec une courte majorité de 53%. L'an dernier, les résolutions présentées par la direction avaient toutes passé la barre des 60%.

Capital éclaté

Le rejet de ces résolutions est dû à l'éclatement du capital de l'agence de publicité. La présidente du conseil de surveillance, Elisabeth Badinter, ne détient que 10,5% du capital, le président du directoire Maurice Lévy 2,7%, et leur allié japonais Dentsu 2,1%. Chacun détient environ le double en termes de droits de vote. Le reste du capital est détenu essentiellement par des fonds, les plus importants étant les américains Thornburg (8%) et Harris (5%) et le français Amundi (un peu moins de 5%). Jusqu'au vote des résolutions, l'assemblée s'était plutôt bien déroulée pour Maurice Lévy, longuement applaudi par les petits porteurs. Ces derniers se sont surtout plaints du rendement de l'action, que le patron a promis de faire passer de 25%à 33%-35%.

Maurice Levy soutenu par les petits porteurs

La poignée de petits porteurs qui a abordé la question du méga-bonus de 16 millions d'euros versé à Maurice Lévy est intervenue pour... soutenir le président du directoire. Le méga-bonus n'a été critiqué que par deux représentants de cabinets de conseil aux actionnaires, dont Proxinvest, qui ont cherché des poux à Maurice Lévy sur les modalités d'attribution de ce méga-bonus.
Première interrogation : pourquoi ce méga-bonus, adopté en 2003, n'a-t-il été soumis aux actionnaires qu'en 2008 ? « Cela n'était pas nécessaire avant 2008 », a répondu Amaury de Sèze, le président du comité des rémunérations au sein du conseil de surveillance - et par ailleurs, patron du fonds PAI.
Surtout, Proxinvest a rappelé que ce méga-bonus ne devait être versé au gourou de la publicité qu'« à la cessation de ses fonctions de président du directoire », selon le texte de la convention réglementée approuvée en 2008, convention qui n'a pas été modifiée depuis. En particulier, aucune résolution présentée à l'assemblée générale de mardi ne concernait le versement de ce méga-bonus. Problème : Maurice Lévy est toujours président du directoire, et son mandat, qui expirait fin 2011, a été reconduit à l'automne pour quatre ans.
« La convention prévoit que la somme me soit versée si je suis présent au 31 décembre 2011. L'obligation est très claire. Il n'y avait aucune raison de soumettre une nouvelle résolution », a justifié Maurice Lévy, indiquant avoir pris divers « avis » sur ce point, et notamment « consulté des avocats ». Amaury de Sèze a abondé : « le mandat de Maurice Lévy s'est terminé à la fin 2001, avant de redémarrer sur des bases totalement différentes ». Au passage, Maurice Levy a vivement critiqué les « fausses informations », les « erreurs » et la « communication abusive » de Proxinvest.

Plaidoyer pro-domo

Prévoyants, Maurice Lévy et Amaury de Sèze avaient déminé le terrain en justifiant longuement le méga-bonus dans leurs interventions liminaires. Le patron de Publicis a dressé un bilan plus que positif de son action depuis 1996 : « un revenu multiplié par 10, un bénéfice net par 26, et une capitalisation par 20 ». Sur le méga-bonus lui-même, il a brièvement admis que « le montant était important » et que « la somme peut choquer ». Mais il a ajouté que le conseil de surveillance lui avait « proposé » cette rémunération « pour me retenir » à un moment où « le groupe était dans une situation fragilisée ». En outre, « les conditions ont été durcies en 2008, ce qui aurait pu me faire tout perdre ». Selon lui, le bonus différé est « un système vertueux s'il n'y avait pas eu tout ce bruit. Le G20 essaie de le mettre en place pour les financiers. Le conseil de surveillance a donc eu de la préscience... ». Si ce bonus lui avait été versé par tranches chaque année, « cela serait passé de manière inaperçue, on n'aurait pas fait tout ce bruit. Mais c'est sorti en pleine campagne électorale. Et cela a été utilisé par certains candidats, je ne souviens plus lesquels... », a-t-il ironisé. Amaury de Sèze a complété : « je comprends qu'un certain nombre de gens trouvent ce montant élevé. Mais cela a permis de s'assurer de la présence durable de Maurice Lévy, et a été préféré à un dispositif de retraite complémentaire ».

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Commentaires 2
à écrit le 30/05/2012 à 9:01
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16 millions de bonus au valet de la gauche caviar! Pas mal! Elisabeth Badinter doit être fière de son coup! Et dire que cette même richissime gauche va limiter la rémunération des patrons d'entreprises nationales...à mourir de rire!

à écrit le 29/05/2012 à 20:52
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@Jamal Henni N'y aurait-il pas erreur sur le rendement de l'action ?

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