Etats-Unis : la fusion entre AT&T et Time Warner se politise un peu plus

La fusion entre le géant des télécoms et celui des médias annoncée en octobre semble au point mort ces dernières semaines. En cause, l'enquête menée par le département de la Justice qui s'éternise mais aussi Donald Trump qui souhaiterait empêcher que la vente aboutisse.
Depuis l'annonce en octobre 2016 du rachat de Time Warner par AT&T, la commission antitrust du département de la Justice n'a toujours pas donné son accord. Cela intervient alors que le président américain Donald Trump semble vouloir s'emparer du dossier pour empêcher la vente d'aboutir.

Plus de 10 mois après l'annonce par AT&T de son intention d'acheter Time Warner, l'issue ne semble pas se concrétiser assez rapidement. D'autant, que le deal conclu le 23 octobre pour la somme de 85,4 milliards de dollars (environ 75 milliards d'euros) voit désormais la politique intensifier sa présence dans le processus.

Une opération très contrôlée

Depuis de longs mois, un petit groupe de fonctionnaires s'active au sein du ministère de la Justice pour déterminer si la fusion être AT&T et Time Warner n'amènerait pas à la création d'un monopole. Les deux entreprises concernées réfutent cette option en expliquant qu'il n'y a pas de concurrence directe entre elles pouvant motiver un refus.

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Toutefois, les autorités fédérales s'interrogent et d'autres groupes américains dans le domaine du divertissement et des télécoms voient rouge. Selon eux, la convergence entre les secteurs d'activité de AT&T et Time Warner suscite des inquiétudes portant sur les offres proposées aux consommateurs, leurs prix et l'impact sur le marché. A ces inquiétudes formulées par les entreprises, vient s'ajouter le spectre de la Maison-Blanche qui, n'exclurait pas de s'inviter dans la prise de décision.

L'indépendance de la division antitrust questionnée

Cette fusion doit en effet obtenir l'aval du département de la Justice américain qui détermine, aux vues des éléments présentés par les entreprises mais aussi les agences gouvernementales, si cette fusion va dans l'intérêt du consommateur. Cela devrait garantir une décision dépourvue de toute influence politique. Cependant, que la division antitrust du département de la Justice soit administrée par une personne nommée par le président américain pose question :

"La communauté des affaires scrute attentivement cette décision pour déterminer dans quelles mesures elle reflétera les engagements de campagne de Donald Trump", explique Vivek Stalamn, analyste chez New Street Research interrogé par le New York Times.

La personne choisie par Donald Trump pour cette position est Makan Delrahim - ce qui doit encore être confirmé par le Sénat américain. Lors de précédentes auditions, il a déjà fait savoir qu'il garantirait l'indépendance de cette division face à de possibles pressions, qu'elles soient politiques ou issues d'entreprises. Ces déclarations n'ont toutefois pas suffit à rassurer les personnalités politiques de tous bords qui craignent l'intervention de la Maison-Blanche.

Donald Trump pourrait faire pression

Selon le même article du New York Times publié le 6 juillet, le président américain envisagerait d'utiliser cette fusion comme un point de pression sur CNN, chaîne d'informations propriété de Time Warner. Comme le rapporte un officiel américain cité par le quotidien américain : "Les conseillers de la Maison-Blanche ont évoqué cette fusion comme un point de pression sur leur adversaire [CNN]."

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Ce n'est pas la première fois depuis son arrivée dans le bureau ovale que la position du président sur la question est évoquée publiquement sans que ce dernier ne le confirme. Par le passé, plusieurs sources proches de Donald Trump ont expliqué à l'agence Bloomberg que le président voyait d'un mauvais œil cette fusion entre deux géants de leur secteur.

Lors de la campagne présidentielle, Donald Trump n'avait cependant pas caché son scepticisme face à cette transaction puisqu'il avait déclaré que son "administration ne l'approuverait pas". Celui qui était alors le candidat républicain à la Maison-Blanche avait expliqué : "cet accord concentre trop le pouvoir entre les mains de trop peu de personnes". Un argument également repris par la candidate démocrate Hillary Clinton.

Une ingérence politique vue d'un très mauvais œil

Quelques heures après la publication de l'article du New York Times, une sénatrice démocrate du Minnesota a écrit une lettre à Jeff Sessions, le ministre de la Justice pour lui demander des comptes. Amy Klobuchar, qui est l'une des membres du sous-comité sénatorial chargé des questions d'antitrust, écrit que si ces informations étaient confirmées, ce serait très grave.

"Ce qui est encore plus inquiétant, c'est qu'en l'occurrence certains conseillers du Président semblent penser qu'il est approprié pour le gouvernement d'utiliser les organes législatifs pour s'en prendre à la presse. Une telle action violerait le premier Amendement de la Constitution", écrit-elle dans cette lettre.

Plusieurs autres sénateurs ont rejoint Amy Klobuchar et notamment un fervent opposant à cette fusion, également élu du Minessota, Al Franken. Ce dernier a ainsi expliqué dans un communiqué : "La guerre que mène actuellement l'Administration Trump aux médias ne doit pas influencer le sort de cette transaction."

Malgré ses nombreuses attaques contre la presse et notamment la chaîne CNN depuis son arrivée dans le bureau ovale en janvier, Donald Trump n'a plus abordé publiquement la fusion depuis son entrée en fonction. Si, dans les faits, il existe bel et bien des motifs valables d'empêcher la fusion, c'est pour le moment la position ambiguë de la Maison-Blanche qui effraye le plus.

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