Les publicitaires proposent un partenariat annonceurs-Etat pour lutter contre la malbouffe

Nicolas Bordas, le président de l'Association des agences conseils en communication reconnait l'importance des questions de santé publique liées à l'alimentation mais il critique l'obligation faite aux publicitaires d'adjoindre des recommandations sanitaires dans les spots ou les affiches. Il propose d'associer l'Etat et les annonceurs pour qu'ils mènent en commun des campagnes ciblées.

Que pensez-vous de l'obligation dans le cadre du Plan national nutrition santé (PNNS), d'afficher des mentions relatives à la santé sur les publicités pour des produits alimentaires?

La communication peut beaucoup à condition de prendre les choses dans le bon sens c'est-à-dire en marche avant et non en marche arrière. Nous faisons le même constat que l'INRA, la question de la santé liée à l'alimentation est un enjeu complexe. Mais pour modifier ces comportements, il faut d'autres actions, des actions spécifiques et positives sur le sujet ; ne pas chercher à culpabiliser les consommateurs, après les avoir incité à manger. 

Une étude, mentionnée par L'Inra montre que 8% des Français interprètent mal la signalétique du PNNS et considèrent que ces messages attestent de la qualité du produit vendu ; cela vous fait -il réagir ?

C'est une illustration parfaite de ce que nous avons déjà exprimé, mettre ces mentions en marginale d'une publicité pour un produit alimentaire est complètement contre-productif. Si je vous envoie deux ballons en même temps il y a une très forte probabilité que vous n'en attrapiez aucun, pour la publicité c'est la même chose. Depuis les années 1970 avec la professionnalisation de l'annonce publicitaire nous appliquons le concept que les marketers appellent "'Unique selling proposition" : pour que les gens retiennent une idée, il faut leur en envoyer une seule à la fois. Placer des injonctions à la fin des spots brouille non seulement la compréhension du message principal - le message publicitaire - mais rend également difficile leur compréhension par le public. On finit par connaître par c?ur ces messages, la plupart des français sont capables de les réciter, mais ils sont inefficaces, leur contenu même n'a pas d'impact.

Que proposez-vous à la place ?

Notre combat est de proposer des vraies campagnes ad hoc, à l'exemple de l'initiative HELENA, (Healthy Lifestyle in Europe by Nutrition in Adolescence) qui est une proposition de l'Association européenne des agences conseil en communication dont fait partie l'AACC. Il faut intégrer la complexité du sujet et ne pas simplement recourir à ces raccourcis. Un partenariat entre les fabricants et l'Etat est tout à fait envisageable, on en a déjà vu sur d'autres questions de santé publique avec notamment la participation des producteurs de vins et spiritueux à la lutte contre l'alcool au volant. Il faut privilégier une démarche incitative plutôt qu'une démarche coercitive imposant, par la loi, aux publicitaires d'afficher ces messages de santé.

Plusieurs groupes d'alimentaires s'engagent en signant des chartes qualité et sécurité alimentaire ; pensez vous que la santé est un bon argument publiciataire ?

Il faut d'une manière générale prendre les gens là où ils sont dans leurs attentes et leurs aspirations. De la même façon qu'il y a une attente environnementale ; il y a une attente en termes de santé, de qualité pour les produits alimentaires. Se préoccuper de la santé est donc, comme dans l'automobile avec les voitures moins polluantes, un moyen pour les entreprises de se mettre en avant. La santé n'est alors plus une contrainte mais bien un avantage permettant de se démarquer.

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