Télécoms : la stabilisation du marché se confirme

Les résultats trimestriels de Free, Bouygues Télécoms, Numericable-SFR et Orange montrent que le marché a atteint un palier. Tous ont, semble-t-il, trouvé un certain équilibre, trois ans après la guerre des prix engagée par Xavier Niel.
Pierre Manière
Au premier trimestre, Iliad, la maison-mère de Free, a fait état d’une croissance de 7% de son chiffre d’affaires à 1,075 milliard euros.

La mer n'est pas plate. Mais le « Freenami » et la guerre des prix amorcée par Xavier Niel en 2012 semble bien appartenir au passé. Comme en témoignent les résultats trimestriels des quatre cadors du marché français, dont trois (Free, Numericable-SFR et Bouygues Télécoms) publiaient leurs chiffres cette semaine. On fait le point.

  • Free poursuit sa conquête

Les voyants sont au vert chez le trublion. Vendredi, Iliad, la maison-mère de Free, a fait état d'une croissance de 7% de son chiffre d'affaires, à 1,075 milliard euros. « Cette forte croissance s'explique principalement par le dynamisme commercial des offres mobiles », souligne le groupe dans un communiqué. Et pour cause, sur ce créneau, les ventes s'affichent en hausse de 18% par rapport à la même période l'an passé, à près de 438 millions d'euros. Free, qui se présente comme le « leader en recrutement d'abonnés pour le 13ème trimestre consécutif », revendique 420.000 nouveaux abonnés dans le mobile. Avec 10,5 millions de clients, le groupe dispose désormais de 15% du marché.

Pour Free, le segment est stratégique, et l'opérateur déploie son réseau d'antennes à toute vitesse. D'après l'Arcep, le régulateur français des télécoms, Free couvre maintenant 78% de la population en 3G, et ce, cinq ans après l'attribution des fréquences. L'opérateur a donc bien respecté ses engagements. Dans la 4G, Free ne lésine pas non plus sur les moyens. Au début du mois, selon l'Agence nationale des fréquences (ANFR), il a doublé Numericable-SFR avec 3.427 antennes déployées, contre 3.170 pour son concurrent.

Sur le fixe en revanche, le groupe stagne, avec un chiffre d'affaire avoisinant les 640 millions d'euros au premier trimestre, soit deux petits millions de plus par rapport à la même période en 2014. Ici, l'opérateur fait notamment face aux offres à prix cassés de Bouygues Telecom. Ce qui a vraisemblablement énervé Xavier Niel, qui ne cache pas son animosité envers son concurrent. Ainsi, il aurait un temps envisagé de casser les prix dans le mobile pour le déstabiliser. Comme le révélait La Tribune en mars dernier, il a notamment songé à « tout péter, tout mettre à 10 euros (contre 19,99 euros pour son principal forfait, Ndlr) », lors d'une discussion téléphonique avec le dirigeant d'un concurrent.

  • Bouygues Telecom toujours dans le rouge

Après avoir échoué à racheter SFR l'an dernier, l'opérateur a dû revoir sa stratégie. Lors d'une conférence de presse, Olivier Roussat, le PDG du groupe, a affiché sa « volonté de libérer le marché du fixe ». L'an dernier, celui-ci a ainsi dégainé deux offres à prix cassés : une offre Triple-play ADSL à 19,99 euros par mois, puis une autre en fibre optique, à 25,99 euros. Lors de la publication de ses résultats trimestriels, ce mercredi, Bouygues Telecom a récolté les fruits de cette agressivité, gagnant 96.000 nouveaux clients (ADSL et fibre), portant son parc d'abonnés à 2,52 millions. Côté mobile, l'opérateur affiche aussi un solde positif, avec 152.000 nouveaux clients.

Toutefois, les dégriffes se sont bel et bien répercutées sur le chiffre d'affaires. Ainsi, celui-ci s'affiche en baisse de 2%, à 1,063 milliard d'euros, couplé à une perte nette de 49 millions d'euros. Résultat : l'opérateur demeure dans le rouge. Pour mémoire, le groupe avait affiché une perte nette de 41 millions d'euros en 1014, avec un chiffre d'affaires en recul de 5%, 4,4 milliards d'euros.

Jugeant pour sa part les derniers résultats « plutôt encourageant », Philippe Marien, directeur financier du groupe Bouygues, a répété qu'il n'y avait pas de négociations avec d'autres opérateurs concernant Bouygues Telecom, dont les rumeurs de rachat reviennent régulièrement. « C'est la statégie standalone », a-t-il insisté.

  • Numericable-SFR, la rentabilité à marche forcée

Les investisseurs et les banquiers sont soulagés. Point. Depuis la présentation de ses résultats trimestriels ce mardi, le titre Numericable-SFR a grimpé de 9,1%, à 56,36 euros. Après avoir affiché une perte de 175 millions d'euros l'an dernier - due pour l'essentiel aux frais financiers du rachat de SFR par Numericable -, le nouvel ensemble fusionné a renoué avec la rentabilité. Pour les premiers mois de l'exercice 2015, le groupe présente un bénéfice net de 816 millions d'euros. Sur la période, son Ebitda affiche une forte croissance de 21%, à 930 millions d'euros. Ces bons résultats financiers, le groupe les doit aux synergies réalisées, à hauteur de 200 millions d'euros. Mises en œuvre au début de l'année, celles-ci ont été plus importantes que prévu. Ce qui permet au groupe d'être en avance sur son objectif initial de 1,1 milliard d'euros d'économies brutes annuelles d'ici 2017.

Pour arriver à un tel résultat, le groupe propriété d'Altice, la holding de Patrick Drahi, s'est lancé dans une véritable « chasse aux inefficacités dans les coûts », dixit Eric Desnoyer, son DG. Il faut dire que plusieurs fournisseurs ont été priés de revoir leurs tarifs à la baisse, de l'ordre « de 30 à 35% », a récemment déclaré Damien Bornerand, délégué syndical central CGT chez SFR, à l'AFP. Du côté des salariés, « la pression est énorme au quotidien », a-t-il ajouté, craignant des répercussions sur l'emploi.

Si le groupe est repassé dans le vert financièrement, les ventes, elles, se dégradent fortement. Sur le premier trimestre, le chiffre d'affaires a baissé de 4,6%, à 2,74 milliards d'euros. Dans la téléphonie mobile, le groupe a perdu pas moins de 400.000 clients! « Désormais, la logique du groupe est de rehausser les tarifs pour tirer plus de valeur et gagner en rentabilité, même s'il doit perdre des clients, explique un analyste financier à La Tribune. L'objectif est de retrouver des marges élevée pour réduire la dette et rassurer les banquiers. »

  • Orange relève progressivement la tête

L'opérateur historique semble sur la bonne voie. Certes, son chiffre d'affaires mondial a reculé de 1,4% au premier trimestre, à 9,67 milliards d'euros. Mais le groupe affiche une baisse moins forte que lors des trimestres précédents. Pour mémoire, Orange avait vu ses ventes reculer de 5,1% lors des trois premiers mois en 2014. Sur les trois premiers mois de l'année, son Ebitda s'est élevé à 2,91 milliards d'euros. Il s'affiche en baisse à base comparable, mais le repli est deux fois moindre que l'année dernière.

Surtout, le groupe tire profit de ses investissements, notamment dans le Très haut débit. Côté mobile, Orange a écoulé 164.000 forfaits mobiles au premier trimestre - soit plus du double par rapport à la même période l'an passé - et récolté 800.000 clients 4G supplémentaires. Dans la fibre, « le développement s'accélère », s'est réjoui l'opérateur, qui a séduit 75.000 clients de plus.

Pierre Manière

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Commentaires 9
à écrit le 16/05/2015 à 8:47
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Ce qui compte n'est pas le nombre d'opérateurs français mais le nombre d'opérateurs européens. Les télécoms ne sont plus un marché domestique. Face aux chinois et aux américains nous avons besoin d'une régulation européenne qui favorise les concentra...

à écrit le 15/05/2015 à 20:45
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Ce serait bien de faire une analyse honnête sur FREE mobile : est-ce que cette entreprise peut faire du bénéfice avec des forfaits à prix cassés tout en devant investir dans la construction de son réseau 3G/4G (qui ne couvre pas encore tout le territ...

le 16/05/2015 à 9:14
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La réponse et Oui Ils suivent la même strategie gagnante que sur l'Adsl. Ils ne peuvent pas developer leur reseau en 6 mois non plus. Mais pour l'internet fixe qui a poussé à developer la fibre??? Free et Orange donc Oui pour le mobile Ils ...

le 16/05/2015 à 9:38
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Je suis consommateur. Je suis allée chez les 3 autres concurrents et je travaille meme pour l'un d' entre eux. Tout ce qui arrive est mérité. Orange : cher et profite de sa base client FT SFR :Service client désastreux Bouygues : mauvaise g...

le 16/05/2015 à 13:24
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surtout arrêtons de comparer le nombre d abonnés mobiles alors qu ils donnent des forfaits à zéro euros à leurs abonnés fixe

le 16/05/2015 à 16:49
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@Greg: Avant d'affirmer des énormités, Free ne développe plus la fibre depuis bien longtemps car ca coute trop cher... (forcément quand on réduit ses marges avec du Low Cost on ne peut pas investir dans le réseau). La Fibre c'est Orange et Numéricabl...

le 17/05/2015 à 12:09
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Be beeeeh j'aimerais bien être un mouton aussi! Parce que oui, orange n'a plus de vrai service client, tout comme sfr qui de surcroît a un service client proche du 0! Parlons même pas de numéricâble... Quant à bouygues c'est cher... Alors oui merci f...

le 19/05/2015 à 9:13
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Pardon, hein, mais on ne peut pas faire de votre cas particulier une généralité.

le 20/06/2015 à 2:36
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Il est dommage que l'article compare des chiffres sans prendre les mêmes base: nombre de clients, augmentation... Ensuite, Free baisse les prix et certains affirment que c'est bon pour leur porte-monnaie! Quelle vision à court terme... Car s'il y a...

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