Télécoms : quels positionnements des opérateurs pour les fréquences 4G ?

L’Arcep, le régulateur des télécoms, a dévoilé vendredi les modalités de mise aux enchères de la fréquence des 700 MHz, vitales pour l’activité des opérateurs d’ici quelques années. Celles-ci doivent encore passer par la Commission consultative des communications électroniques, avant d’être définitivement adoptées. La Tribune fait le point sur la manière dont Orange, Numericable-SFR, Bouygues Telecom et Free pourraient se positionner.
Pierre Manière
Au petit jeu des pronostics, les experts sondés par La Tribune parient qu’Orange décrochera deux lots, c’est-à-dire 10 MHz.

Très attendues, les règles du jeu sont désormais connues. Vendredi, l'Arcep, le régulateur des télécoms, a présenté les modalités de mise aux enchères de la fréquence des 700 MHz. Vitales pour les opérateurs de l'Hexagone et le déploiement de la 4G, cette « bande 700 » fait partie des « fréquences en or ». Pourquoi ? Parce que ces fréquences basses disposent d'un signal qui porte à longue distance, en plus de très bien pénétrer les bâtiments.

Depuis des mois, les modalités d'attribution de ces fréquences font l'objet de passes d'armes entre Orange, Numericable-SFR, Bouygues Telecom et Free. De fait, les trois premiers disposent chacun de 20 MHz en fréquences basses (dans les bandes 800 et 900 MHz), alors que l'opérateur de Xavier Niel n'en a que 5 MHz (en 900 MHz). Free a ainsi milité pour qu'un lot lui soit réservé dans le nouvel appel d'offres, arguant que sans ces actifs, il ne pourrait pas, à terme, se battre à armes égales avec ses concurrents. Un scenario fusillé par ces derniers : pour eux, Free a eu sa chance de décrocher des fréquences basses en 2011, lors de l'attribution de la borne des 800 MHz, mais a délibérément proposé un prix insuffisant.

Pas de lot réservé à Free

Au final, l'Arcep a choisi de ne pas réserver de lot à Free. Le régulateur des télécoms, qui a travaillé main dans la main avec le gouvernement pour élaborer les modalités d'attributions de la borne 700 MHz, a opté pour un partage des 30 MHz mis en vente en six lots de 5 MHz chacun. Le prix de réserve d'un lot est fixé à 416 millions d'euros. Il constituera donc le point de départ de l'enchère. Pour que la concurrence joue pleinement, un opérateur ne pourra obtenir plus de trois blocs dans cette bande. En outre, aucun ne pourra détenir plus de 30 MHz en fréquences basses, c'est-à-dire dans les bandes 700 MHz, 800 MHz et 900 MHz. Avec ces règles du jeu, Free pourra donc obtenir jusqu'à trois blocs de 5 Mhz, contre deux pour les autres opérateurs, étant donné leurs portefeuilles de spectre plus étoffés.

Pour les enchères, les opérateurs choisissent en amont le nombre de blocs qu'ils veulent, sachant que par la suite, ils ne pourront plus en réclamer davantage. Dans le cas où les opérateurs se positionnent sur le maximum de blocs qu'ils peuvent obtenir, un total de neuf lots sera donc demandé. Comme ce nombre est supérieur aux six lots en jeu, on passe à un autre tour d'enchère, où les prix grimperont à hauteur de 5 millions d'euros par bloc. Le procédé se poursuivra. Et ce, jusqu'à ce que les opérateurs se délestent de suffisamment de blocs pour qu'il n'en reste que six réclamés au total.

Un pactole minimum de 2,5 milliards d'euros pour l'Etat

Côté calendrier, la procédure va faire l'objet d'un avis de la Commission consultatives des communications électroniques (CCCE) la semaine prochaine, le 26 juin. Cette organe comprend notamment les opérateurs, qui pourront donner leur avis sur ses modalités. Des modifications peuvent donc possiblement intervenir, même si les experts sondés par La Tribune jugent qu'elles devraient être marginales. Après l'adoption de la procédure, dans la foulée, les enchères sont prévues au mois de novembre, pour une attribution avant la fin 2015.

De fait, le gouvernement a besoin rapidement du pactole des fréquences. Cette manne a déjà été inscrite dans le projet de loi de finances de l'année, et doit permettre à la Défense de boucler son budget. Jusqu'alors, l'Etat espérait environ 2,1 milliards d'euros pour ces redevances. Mais avec le prix de réserve annoncé, il récoltera au minimum près de 2,5 milliards d'euros.

Un prix de réserve « assez élevé »

Du côté des opérateurs, la discrétion est de mise, et la parole est rare depuis que l'Arcep a levé le voile sur la procédure. Contacté par La Tribune, Iliad (Free) n'a pas souhaité faire de commentaire. Du côté de chez Bouygues Telecom, même son de cloche : on se contente « d'étudier attentivement les modalités des enchères ». Idem chez Numericable-SFR, où « l'analyse est en cours ». Pareil chez Orange. Voilà pour les positions officielles.

Toutefois, un acteur confie : « le système d'enchères nous va très bien car chaque opérateur peut se positionner clairement ». En revanche, il voit un gros bémol, jugeant le prix de réserve « assez élevé, surtout pour des fréquences qui ne sont pas disponibles tout de suite ». De fait, ces fréquences ne seront accessibles qu'à partir du mois d'octobre 2017. Mais le point qui fâche concerne « l'obligation de couverture des réseaux ferrés - les TER, les Transilien et les RER - [qui] nous apparaît potentiellement très coûteuse ».

Plusieurs analystes et experts sondés par La Tribune partagent ces observations. L'un d'entre eux détaille :

« Effectivement, même s'il s'agit de 'fréquences en or', le prix de réserve semble assez élevé par rapport à l'enveloppe globale initialement souhaitée par l'Etat. L'autre point important est qu'aujourd'hui, les opérateurs n'ont pas besoin de ces fréquences. C'est un investissement important pour l'avenir et le trafic futur. Mais ces fréquences ne leurs seront vraiment nécessaires qu'à compter de 2020... En clair, cela fait beaucoup d'argent à débourser, alors que tous les acteurs sont confrontés à des structures de coûts contraignantes. Les obligations de couvertures vont bien sûr renchérir la facture : par nature, les voies ferrées traversent des zones sans population, et donc très peu couvertes. »

En d'autres termes, il faudra y déployer de coûteuses infrastructures. Ce qui n'est, en outre, jamais facile : ces déploiements font par exemple souvent l'objet de contentieux juridiques.

Free « ne peut pas laisser passer l'occasion »

Dans ce contexte, comment les opérateurs vont-ils se positionner ? Au petit jeu des pronostics, les experts sondés par La Tribune parient qu'Orange décrochera deux lots, c'est-à-dire 10 MHz. Il en irait de même pour Free, « qui ne peut pas laisser passer l'occasion », insiste un analyste. La situation se complique en revanche concernant les positionnements de Numericable-SFR et Bouygues Telecom. Pour le premier, « c'est Patrick Drahi (le patron d'Altice, la maison-mère de Numericable-SFR, Ndlr) qui va décider combien il veut mettre », nous dit un expert, pour qui « il serait étonnant que le groupe ait plus de 5 MHz au final ». Ainsi, chez Numericable-SFR, « pas question de faire n'importe quoi, il faut rembourser la dette », nous rappelle un autre.

Pour Bouygues Telecom, les avis sont partagés. « Ce sera 5 MHz ou zéro », estime un bon connaisseur du secteur. Reste que les avis divergent sur les raisons qui pourraient pousser le groupe à investir - ou pas - la bande 700 MHz. Certains jugent par exemple que si les dirigeants de Bouygues Telecom se préparent à une revente - en dépit de la stratégie standalone défendue officiellement depuis des mois -, la mariée sera plus belle avec un portefeuille de fréquences plus garni. D'autres ne sont pas d'accord. Ils jugent que le groupe n'en a pas forcément besoin et que ses 20 MHz actuels pourraient suffire étant donné son nombre de clients.

Pierre Manière

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Commentaires 3
à écrit le 21/06/2015 à 20:58
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Et c'est quand qu'on s'occupe des gens ,qui comme moi ont la 0G ????

à écrit le 20/06/2015 à 6:40
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Et la VAI c'est du bon travail comme les importations de fraises, on n'est pas dans la fraise royale sous les défenestrations avec des rois aux mignons pour des relances textiles. modeste rescapé d’un trou d’obus de 14 officier d’infanterie de 26 ans...

à écrit le 19/06/2015 à 19:43
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il faudrait forcer free a acheter plein pot toutes les frequences pour absorber les couts fixes , puis les revendre a prix symbolique en cout variable a ses concurrents qui pourraient aussi proposer des lors des forfaits tt gratuits tt illimites pour...

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