France Télécom condamné à réduire son dividende ?

Pour les experts de Groupama Asset Management, les opérateurs télécoms européens doivent privilégier les investissements dans les réseaux au détriment de la rémunération des actionnaires. France Télécom est sous pression pour réduire son dividende.
Le débat sur une baisse du dividende de France Télécom a été relancé il y a un mois par le régulateur des télécoms, l'Arcep. Photo : Reuters

Telekom Austria, Telefonica et Mobistar l'ont déjà fait. France Télécom sera-t-il le prochain opérateur européen à réduire son dividende pour privilégier l'investissement ? Les experts de Groupama Asset Management ne l'excluent pas et même l'appellent de leurs vœux. En effet, selon Gabrielle Capron et Luisa Florez, analystes télécoms dans la filiale de gestion d'actifs de l'assureur, « compte tenu de l'impérieuse nécessité d'investissement pour répondre aux besoins de communication extensifs des consommateurs, certains acteurs ont ou devront se résoudre à réduire leur dividende. » Les cas les plus probables sont, selon elles, au vu de leurs dettes, KPN, France Télécom, Telecom Italia et Portugal Telecom. Ironie du calendrier, Pages Jaunes, ex-filiale d'annuaires de l'opérateur français, a annoncé ce mercredi qu'elle suspendait son dividende, en raison du refinancement de sa lourde dette à venir.

Un débat relancé avec l'arrivée de Free Mobile

Le débat sur une baisse du dividende de France Télécom a été relancé il y a un mois par le régulateur des télécoms, l'Arcep : son président Jean-Ludovic Silicani avait déclaré, dans une interview , que dans le contexte d'un recul prévisible des marges suite à l'arrivée de Free Mobile, « si l'Etat, qui est le principal actionnaire de France Télécom, souhaite que cet opérateur maintienne ses investissements à un haut niveau, il peut accepter une baisse du dividende. » Le courtier Raymond James Equities envisage lui aussi une baisse pouvant aller jusqu'à 30% du dividende de France Télécom, Vivendi et Bouygues, les maisons-mères des trois opérateurs de réseau bousculés par Free Mobile.

Le conseil d'administration de France Télécom s'est engagé à maintenir le dividende à 1,40 euro par action pour 2012 et au-delà. Mais lors d'une audition devant la commission des affaires économiques de l'Assemblée nationale le 1er février, le PDG Stéphane Richard, a déclaré que « cette politique n'est pas gravée dans le marbre. Tous les ans, nous débattons sur le dividende. Même si un engagement a été pris il y a deux ans, nous allons devoir reprendre cette discussion dans le courant de l'année 2012, de façon à évaluer notre politique de distribution à la lumière du nouveau contexte » concurrentiel. Le sujet sera de nouveau abordé la semaine prochaine, jeudi 22, lors de la publication des résultats annuels du groupe.

Les syndicats vent debout contre ce dividende jugé « exorbitant »

Or les syndicats de l'opérateur historique critiquent depuis plusieurs années cette « politique du dividende fort, mortifère et inefficace, dans un contexte économique tendu et de crise financière de la zone euro », dixit la CFDT en décembre dernier, et « le montant exorbitant du dividende, supérieur au bénéfice courant, qui entrave le développement de l'entreprise » selon la CFE-CGC Unsa qui a appelé à voter contre ce dividende à la dernière assemblée, proposant de le ramener à 1 euro contre 1,40 euro depuis 2008, soit une somme totale de 3,7 milliards d'euros, dont 1 milliard revient à l'Etat, premier actionnaire avec 27% du capital. Les analystes de Groupama AM remarquent que le rendement élevé des opérateurs télécoms européens (de l'ordre de 12%) n'a pas empêché la forte baisse de leurs cours de Bourse.

La rémunération des dirigeants aussi une variable d'ajustement

« Sans être révolu, le temps des dividendes est pour le moins revu : ils endosseront le rôle de variable d'ajustement » considèrent les expertes de Groupama AM. Plusieurs acteurs l'ont fait récemment. En décembre, Telekom Austria a annoncé une baisse de moitié de son dividende (ramené à 0,38 centime contre 0,76 par action) pour les deux années qui viennent, en invoquant l'environnement macro-économique dégradé et la volatilité des marchés des changes. Pour les mêmes raisons, le géant espagnol Telefonica a, également en décembre, prévenu que le dividende versé au titre de l'exercice 2012 diminuerait et serait en partie en actions.

Enfin, la semaine dernière, c'est le belge Mobistar, contrôlé par France Télécom, qui a averti d'une baisse de 14% de son dividende. De nombreuses rumeurs circulent sur une réduction de celui de Telecom Italia, qui annoncera la décision du conseil fin mars. Enfin, les analystes de Groupama AM citent une seconde variable d'ajustement possible : la rémunération des dirigeants. Elles relèvent que chez les opérateurs télécoms européens, la part du salaire fixe et variable est élevée, en moyenne de 30% et 40% respectivement contre 10% et 20% aux Etats-Unis où l'on privilégie la rémunération long terme (stock options, actions) ce qui constitue selon elle une incitation aux investissements...
 

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Commentaires 2
à écrit le 16/02/2012 à 22:39
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Il paraît difficile de distribuer tout le bénéfice aux actionnaires, dont je suis. Il faut une part importante pour l'investissement, comme pour toute entreprise. Cependant, il est curieux que d'autres opérateurs puissent être les premiers bénéficiai...

le 17/02/2012 à 9:58
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Je suis persuadé qu'un opérateur de Télécom pur, c'est à dire sans vente de triple ou quadruple play, ni de services aux entreprises, serait bien plus rentable qu'un opérateur qui cherche à attaquer des dizaines de fronts commerciaux simultanément. C...

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