"Le crédit impôt recherche est vital pour Alcatel en France"

L'équipementier télécoms français vient d'annoncer une perte et un plan de réduction de coûts, passant par 5.000 suppressions d'emplois. Le directeur général Ben Verwaayen revient sur les défis que le groupe affronte.
Le directeur général d'Alcatel-Lucent, Ben Verwaayen. Copyright Reuters

Une semaine après son sévère avertissement sur résultats, Alcatel-Lucent a annoncé des pertes et un plan de réduction de coûts passant par 5.000 suppressions de postes dans le monde. L'action a dévissé jeudi et touché un nouveau plus bas historique sous 0,80 euro (-6% à la clôture à 0,82 euro); en recul de 77% en un an, elle ne pèse plus 1,9 milliard d'euros et se voit menacée d'une sortie du CAC 40 en septembre. Le directeur général Ben Verwaayen revient sur les défis qu'affronte l'équipementier télécoms. Le bouillant néerlandais était parvenu à faire sortir du rouge le groupe en 2011, pour la première fois depuis la fusion du français d'Alcatel et de l'américain Lucent en 2006. Mais la situation s'est détériorée depuis l'automne dernier. Pour le fabricant d'équipements de réseaux, dont le siège est à Paris, la France représente 12% de ses effectifs, soit 9.560 personnes en France sur 76.000 salariés, et 7,8% de son chiffre d'affaires consolidé.

Les investisseurs ont très mal réagi à vos annonces jeudi....
Ben Verwaayen : Je le comprends et je crains que cela ne soit pas que pour un trimestre. Il y a six mois, nous avions dit que nos résultats de 2012 seraient meilleurs qu'en 2011 et aujourd'hui nous annonçons une perte substantielle (254 millions d'euros en net pour un chiffre d'affaires de 3,5 milliards). Notre structure de coûts n'est pas adaptée à la réalité nouvelle du marché. Il nous faut être réaliste, aujourd'hui, l'heure est à la fermeté. Le marché attend des résultats. Mais il n'est pas possible de se redresser en un trimestre. Je leur dis patience, il est important d'avoir le soutien de ses actionnaires.

Tous vos concurrents souffrent, même les chinois. N'est-ce pas lié au marché même des équipements télécoms, durablement touché par la déflation ?
C'est un peu une excuse. Maintenant, nous avons surtout besoin d'activité, de business. Problème : le marché est difficile à lire. En Amérique latine, nous avons enregistré notre septième trimestre consécutif de croissance, aux Etats-Unis nous sommes très bien placés, même s'il y a un effet de mix défavorable, car les marges sont moins élevées dans le LTE (la 4G) que dans les équipements plus matures comme le CDMA*. Il n'y a pas de formule magique. Nous allons réduire nos coûts de 1,25 milliard d'euros d'ici à fin 2013, mais aussi trancher dans les contrats qui ne sont pas assez rentables. C'est difficile de dire non à un client mais nous sommes une entreprise de technologie et d'innovation et certains contrats de services gérés, qui ne sont que de l'opération et de la maintenance, ne comportent pas assez de valeur ajoutée, même s'ils sont sains. Nous devons être une entreprise à la profitabilité durable.

La France sera-t-elle touchée par les 5.000 suppressions d'emplois annoncées d'ici à fin 2013 ?
Je puis vous apporter deux réponses à ce stade. Tout d'abord, la France reste un pays très positif pour la recherche, grâce au crédit impôt recherche qui est un très bon dispositif. C'est essentiel pour notre centre de recherche et d'innovation de Villarceaux dans l'Essonne. Deuxièmement, notre programme Performance de réduction de coûts est mondial. Nous allons engager les discussions avec les différents partenaires sociaux et pourrons peut-être en dire plus en septembre.

Le gouvernement français veut soutenir la filière télécoms. Peut-il faire quelque chose pour l'équipementier français que vous êtes ?
Le marché des équipements télécoms n'est pas national, ni même régional mais mondial. Il n'y a rien qu'un pays puisse faire, sinon favoriser l'environnement de la recherche. Nous sommes très heureux des qualités et des talents que nous avons en France. Villarceaux est notre premier centre de R&D en Europe et un pôle d'excellence au niveau mondial. L'investissement des opérateurs reste du ressort de ces derniers, et non du gouvernement.

* CDMA : standard de téléphonie mobile concurrent du GSM, utilisé par Verizon aux Etats-Unis par exemple.

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Commentaires 21
à écrit le 04/09/2012 à 17:24
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Je crois savoir que les opérateurs américains privilégient leurs propres équipementiers pour les infrastructures télécoms à cause de forts soupçons (info ou intox) d'espionnage de la part des chinois; mais ceux ci en ont-ils réellement les capacités ...

à écrit le 27/07/2012 à 19:23
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La réponse à la dernière question est vraiment lamentable. Au lieu de dire que le gouvernement français et les autres gouvernements européens ne peuvent rien faire, il devrait affirmer qu'ils peuvent faire énormément en passant des commandes à Alcate...

à écrit le 27/07/2012 à 17:34
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ça serait bien dommage si alcatel déposait le bilan. Les parachutes dorés de tchûruck et sa taupe russo disparaitraient du même coup. Quelle catastrophe!

à écrit le 27/07/2012 à 16:56
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La tribune sert la soupe à Alcatel-Lucent alors même que cette entreprise n'est pas plus française que Huawei ou Cisco, le seul équipementier Telecom encore européen est Ericsson. Le figaro a même titré le 15 fevrier 2011 sur "Alcatel-Lucent n'est pa...

à écrit le 27/07/2012 à 14:53
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C'est affligeant de constater que seuls les fabricants de sacs à main ; de sellerie ou encore de parfums peuvent créer de la valeur en France. Tant mieux pour eux mais quid de notre "légendaire" créativité industrielle.

le 27/07/2012 à 16:20
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On a des français créatifs encore, pour frauder, draguer les nanas et boire de l'alcool, faire la fête. Je plaisante. Surement y a plein de domaines ou on est créatifs, mais c'est pas l'industrie, c'est plutôt l'artistique.

à écrit le 27/07/2012 à 12:32
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le crédit d'impôt recherche devrait être recentré autour de la recherche industrielle et imposer comme contrepartie le dépôt de brevets. Actuellement, il est galvaudé et bénéficie surtout à des activités de services ou de commerce. Bref, un gaspillag...

à écrit le 27/07/2012 à 10:34
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Quand va-t-on se rendre compte de la détresse financière de notre ancien « fleuron » et des erreurs stratégiques qui ont entaché son parcours depuis presque dix ans. Je ne sais pas ce que ses salariés en pensent mais l?omerta ou la peur du vide sembl...

à écrit le 27/07/2012 à 10:17
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Alcatel est à l'image des sociétés françaises: formidable destruction de valeur pour les actionnaires depuis 10 ans. Et ce Monsieur voudrait que les actionnaires apprennent la patience! Nous allons vers une perte de confiance généralisée des actionna...

à écrit le 27/07/2012 à 9:59
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Il faut être contre toutes les subventions de l?état. Il faut que les entreprises françaises soient suffisamment adultes pour ne pas nécessiter l'aide d'un papa et d'une maman, c'est a dire, nos impôts. Donc supprimons toutes les subventions et autre...

à écrit le 27/07/2012 à 1:02
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Tout le monde dit du bien du crédit impôt recherche (sauf dans les commentaires ci-dessous...), mais franchement... Ce n'est qu'une subvention massive à l'aveuglette ! Toutes les entreprises se jettent sur cette niche fiscale, même celles qui ne font...

le 27/07/2012 à 11:43
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je confirme, j'en suis un bel exemple. Bon parfois c'est vrai je fais un peu de recherche (mais la recherche la vraie, n'est plus en France).

à écrit le 26/07/2012 à 22:50
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parce qu on veut vendre des airbus, des chars et centrale nucleaire au chinois, on accepte que huawei et ZTE vendent leur produit telecom a des prix insoutenable pour alcatel. des produits suspect d'ailleurs (voir article de la tribune sur le meme s...

le 27/07/2012 à 5:19
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Tout le monde fait la même chose, mais seuls les Chinois te gênent.

à écrit le 26/07/2012 à 20:59
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Voila bien l'une des rares, même être la seule véritable, mesure de Sarko en direction des plus riches. Le crédit impôt recherche est une pure niche fiscale qui est formatée pour bénéficier aux grandes entreprises, il n'y a rien d'étonnant que Alcate...

le 26/07/2012 à 22:21
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On s'en fout qu'alcatel licencie, ce n'est pas notre problème. C'est SON problème. Notre problème, c'est qu'Alcatel nous pompe des impôts spoliés par la force brutale et aveugle du voleur fiscal. Et non content de ce premier recel, criminel certain d...

à écrit le 26/07/2012 à 20:44
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"grâce au crédit impôt recherche qui est un très bon dispositif" Eclat de rire ! Encore un GROS pompe budget sans contrepartie !

le 26/07/2012 à 21:08
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pour le coup, la contrepartie, c'est d'avoir des Bac+5, payés en moyenne 80K?/an localisés, avec leur famille en France. C'est ca la contrepartie pour le pays. De plus, l'innovation qui permet la création de valeur immatérielle (par ex, brevets) qui ...

le 26/07/2012 à 22:17
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Oui mais chaque fois qu'il y a 80k de salaire versé dans ces conditions, il y a 80k d'impôts prélevés avant par la force. Donc opération nulle, sans aucune création de richesse : ça ne sert à rien et chaque jour qu'on prélève ces impôts nuisibles, l'...

le 27/07/2012 à 7:56
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Franchement, de tous les impots le moins nule est sans doute celui qui favorise la R&D sur notre territoire. Au dela, le credit d'impot recherche a un impact tres positif sur le soutien a l' innovation dans les sme francaises.

le 27/07/2012 à 16:03
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Non Gnochi, le CIR est un instrument pour grandes entreprises qui ont du personnel largement sous employé et qui peuvent donc faire des choses aussi ineptes qu'écrire et faire écrire des fiches CIR. D'ailleurs elles en sont les principales bénéficiai...

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