Bercy dévoile 5 mesures pour l'emploi et l'investissement dans les télécoms

Arnaud Montebourg et Fleur Pellerin viennent d'annoncer le train de mesures promis en juillet aux opérateurs et aux syndicats dans un secteur bousculé par l'arrivée du quatrième opérateur mobile. Une mission est lancée sur la politique de subventions des terminaux.
Arnaud Montebourg, le ministre du Redressement productif. Copyright Reuters

«C'est le retour de l'Etat pilote», résume un haut fonctionnaire. Arnaud Montebourg, le ministre du Redressement productif, et Fleur Pellerin, la ministre déléguée à l'Economie numérique, ont annoncé mardi soir le fameux «train de mesures» promis en juillet aux opérateurs et aux syndicats reçus peu après les annonces de plans sociaux chez SFR et Bouygues Telecom, dans un secteur bousculé par l'arrivée du quatrième opérateur, Free Mobile. Cinq «mesures qui vont améliorer sensiblement les modèles économiques des acteurs», veulent croire les ministres, mais qui sont plutôt des orientations générales. A Bercy, on considère que l'arrivée de Free en janvier a été «mal anticipée» et qu'il faut «mieux l'accompagner». L'idée est de trouver un meilleur équilibre et de laisser un espace économique à tous les acteurs.

? Inciter aux investissements dans la transparence
Les deux ministres affirment qu'il est «primordial que l'ensemble des opérateurs s'inscrivent dans un modèle d'investissement». Leur souhait est que les processus de déploiement des réseaux soient «plus transparents» ce qui les conduit à lancer un «observatoire des investissements et des déploiements des réseaux mobiles», s'appuyant «sur l'expertise conjointe de l'Arcep et l'ANFR», le régulateur des télécoms et l'agence nationale des fréquences. L'objectif est de veiller à ce que les engagements des opérateurs, pris dans leurs licences, soient respectés à la lettre. Une première publication est annoncée pour la fin octobre sur les déploiements 3G au troisième trimestre. L'observatorie s'étendra ensuite à la 4G.

? Trouver un équilibre entre déploiement et mutualisation
Pour les ministres, la règle doit être celle du déploiement par chaque opérateur de son réseau «y compris pour le dernier entrant», en dehors des zones moins denses. C'est la consécration de la fameuse concurrence par les infrastructures. Il faut «trouver un équilibre» entre l'investissement de tous et la nécessaire mutualisation ou le partage d'infrastructures «dans les territoires moins rentables». Mais pour Bercy, «l'itinérance ne saurait servir de modèle économique» et ne saurait être que «transitoire». Free Mobile est ouvertement visé et c'est un gage donné à Martin Bouygues, qui avait écrit à tous les parlementaires pour leur expliquer que le contrat d'itinérance entre Free et Orange ne devait pas être prolongé. Des lignes directrices sur les conditions de mutualisation et d'itinérance seront publiées début 2013.

? Accélérer le très haut débit mobile (la 4G)
La quatrième génération de téléphonie mobile devrait permettre aux opérateurs de mieux monétiser leurs investissements dans les réseaux. Le gouvernement est donc «mobilisé pour accélérer le déploiement du très haut débit mobile», car ces investissements «sont créateurs d'emplois non délocalisables». Trois chantiers sont lancés sur les fréquences: libération des fréquences en 2,6 Ghz par l'aviation civile, création d'une structure de coordination sous l'égide de l'ANFR pour accélérer le déploiement en bande 800 Mhz sans brouillage, ouverture d'une réflexion avec l'Arcep sur la réutilisation des fréquences 1800 Mhz en 4G, que demande Bouygues Telecom. «Les travaux commenceront au début de l'année prochaine», selon le souhait des ministres, pour déterminer un calendrier et le montant des redevances. Ce sera une façon de donner un coup de pouce à Bouygues, l'opérateur le plus durement touché par l'arrivée de Free Mobile, mais pas trop tôt, pour ne pas soulever l'ire des concurrents.

? Maintenir l'emploi des centres d'appels
Le gouvernement est «mobilisé pour le maintien de l'emploi dans la relation client en France» sans passer par des mesures coercitives, difficilement applicables. Le député UMP des Côtes-d'Armor Marc Le Fur a déposé le 23 août une proposition de loi instituant «l'obligation d'informer de la localisation des centres d'appels» (voir la PPL n°143). Les ministres ne vont pas aussi loin mais propose d'utiliser davantage les engagements volontaires en matière d'emploi en France des centres d'appels dans les critères d'attributions de fréquences mobiles à venir, éventuellement pour les fréquences 1800 Mhz. La création de lignes téléphoniques d'assistance à valeur ajoutée "premium" (avec un surcoût) est citée comme un moyen de générer de l'emploi dans le secteur. Un label de responsabilité sociale d'entreprise serait aussi créé.

? La politique de subventions des terminaux
Le gouvernement souhaite rassurer opérateurs et syndicats: il ne veut pas remettre en cause le système de subventionnement des téléphones, souvent décrié pour son manque de transparence par les associations de consommateurs et le régulateur des télécoms. Free a d'ailleurs attaqué SFR pour concurrence déloyale sur certains forfaits avec subvention qu'il assimile à du crédit déguisé (voir le compte-rendu de l'audience hier). Mais Bercy s'interroge sur ces subventions, auxquelles sont «drogués» les consommateurs et les opérateurs et qui représentent des sommes colossales («environ 5 milliards d'euros par an» selon un conseiller de Bercy), revenant essentiellement à des fabricants américains ou asiatiques (comprendre Apple et Samsung). Les ministres parlent même d'accompagner «la politique commerciale des opérateurs en matière de terminaux». Selon nos informations, une mission sur le sujet a été confiée au Conseil général de l'économie, de l'industrie, de l'énergie et des technologies (CGEIET). Les ministres évoquent une instruction en cours afin de définir, d'ici à janvier 2013, d'éventuelles évolutions réglementaires afin de veiller à «la sécurisation juridique du modèle de subventionnement et à la modération du rythme de renouvellement des terminaux». L'objectif est d'aboutir à un «réajustement du partage de la valeur» entre les opérateurs et les fabricants, «dans l'intérêt du consommateur».
 

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Commentaires 7
à écrit le 13/10/2012 à 12:21
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pour quelle raison le consommateur aurait il le droit de savoir lorsque son t shirt est produit en Chine et n aurait t il pas le droit de savoir lorsque des patrons voyous délocalisent les centres d appel.

à écrit le 10/10/2012 à 10:08
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Un observatoire, comme les Jardins de l'Observatoire........Ce qu'on veut :LA FIBRE ET LA CONCURRENCE;

à écrit le 10/10/2012 à 9:30
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Et on est étonné que la France va mal? De quoi ils se mêlent tous ces politiciens qui n'ont jamais travaillé en tant que dirigeant dans les entreprises privé. Ils l'ont déjà montré maintes fois qu'ils n'en sont pas capable non plus surtout M. Monteb...

à écrit le 10/10/2012 à 7:47
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Cet interventionnisme forcené de l'Etat mènera uniquement à de la destruction de valeur pour les entreprises. En plus de nous coûter beaucoup d'argent en études, commissions, autorités indépendantes, experts, etc.

à écrit le 09/10/2012 à 22:08
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«observatoire des investissements et des déploiements des réseaux mobiles»: il me semble que l'ARCEP ex ART en était déjà en charge ?

à écrit le 09/10/2012 à 21:31
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Saint Montebourg , priez pour eux !!! (Bon sang, mais qu'est-ce qu'il doit passer comme temps à genoux !!)

à écrit le 09/10/2012 à 21:11
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Un observatoire a été créé. On est sauvé. Le plus inquiétant est que l'on se dirige vers une économie administrée (type ex URSS) avec des décideurs qui manquent cruellement d'expérience en gestion d'entreprise.

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