Quel modèle économique pour l’agence bancaire de demain ?

Le Crédit agricole Ile-de-France a présenté son nouveau concept d'agence bancaire, le 13 novembre. La révolution numérique oblige les banques à repenser les fonctionnalités de leur réseau d'agences.
Christine Lejoux
L'agence du quai de la Rapée, à Paris, est l'une des illustrations du nouveau concept d'agence déployé par le Crédit agricole Ile-de-France.

"Oh, pardon, je croyais être entré dans mon agence bancaire !" "Vous ne nous êtes pas trompé, c'est bien là." Cette conversation imaginaire pourrait se tenir entre un client et un responsable de l'une des nouvelles agences du Crédit agricole Ile-de-France (Cadif). Mobilier design et coloré, tapis moelleux, cloisons transparentes, écrans interactifs aux murs, "bar à applications mobiles" équipé de tablettes tactiles... L'agence Cadif du quai de la Râpée, dans le 12ème arrondissement de Paris, ressemble davantage au hall d'un grand hôtel qu'à un point de vente bancaire traditionnel. Il faut dire qu'elle fait partie des huit succursales sur lesquelles Cadif a testé son nouveau concept d'agence, présenté le 13 novembre. Un concept qui vise à "fluidifier le parcours du client, à rendre l'agence plus transparente pour ce dernier", précise Bertrand Chevallier, directeur général adjoint de Cadif.

Finis, donc, le guichet et sa file d'attente, place à une borne d'orientation sur laquelle le client entre son nom, avertissant du même coup son conseiller de son arrivée. Ce dernier n'en a pas encore terminé avec un prospect ? Le client est invité à patienter dans un confortable salon situé au cœur de l'agence, avec café à disposition, avant de pouvoir s'isoler avec son conseiller dans l'un des bureaux vitrés prévus à cet effet. Trop beau pour être vrai ? Non, il ne s'agit même pas là "d'un concept-store ou d'une expérimentation" mais bel et bien "d'un format qui sera déployé dans l'intégralité de nos 280 agences d'ici à 2016", insiste Guy Poyen, directeur marketing et communication de Cadif.

Des investissements considérables en immobilier, technologie et formation

Un programme qui coûtera à la banque 250 millions d'euros, sur trois ans. Une somme "considérable", reconnaît Bertrand Chevallier, et qui comprend les investissements dans l'immobilier, à hauteur de 110 millions d'euros, dans la technologie (80 millions) et dans les compétences (60 millions), la moitié environ des 1.000 chargés d'accueil des agences Cadif étant appelés à devenir des conseillers commerciaux généralistes. Le 6 mai, BNP Paribas avait présenté un programme d'investissement du même ordre de grandeur (210 millions d'euros), dans le cadre de son plan à trois ans Préférence client 2016, qui vise lui aussi à transformer les quelque 2.000 agences que la banque compte en France.

Si les banques françaises ne lésinent pas sur les moyens pour repenser leur réseau d'agences, c'est parce que 86% des contacts entre les clients et leurs banques s'effectuent d'ores et déjà via le numérique, d'après l'Observatoire 2013 de l'opinion sur l'image des banques, publié par l'Ifop et la Fédération bancaire française. Consulter ses comptes, effectuer un virement... Pour procéder à ces opérations basiques, un nombre croissant de clients préfèrent désormais utiliser leur smarphone plutôt que de se rendre en agence. Résultat, la part des agences dans les contacts entre les clients et les banques est tombée à 8% aujourd'hui, contre... 33% il y a une dizaine d'années.

Des concepts d'agences du futur différents selon les banques

"Les clients fréquentant de moins en moins les agences, celles-ci doivent trouver une autre fonctionnalité", admet Bertrand Chevallier. Des clients qui, poursuit le dirigeant, "sont beaucoup plus exigeants que par le passé en matière de conseils, car eux-mêmes ont aujourd'hui une très bonne connaissance des produits et des tarifs bancaires, grâce à Internet." La principale fonction de l'agence bancaire de demain semble donc résider dans les prestations à valeur ajoutée que sont les conseils en matière de crédit immobilier, d'épargne ou de préparation de la retraite.

Mais si les établissements bancaires s'accordent sur ce point, leurs stratégies diffèrent en revanche sur le plan du modèle économique de l'agence du futur. Au sein même du groupe Crédit agricole, plusieurs expérimentations ont lieu, comme celle du "Store" ouvert à Grenoble par le Crédit agricole Sud Rhône Alpes, une sorte de grande magasin où les produits bancaires sont vendus en "packages" exposés sur des étagères et disponibles en libre-service.

L'époque de l'agence bancaire traditionnelle est bel et bien révolue

La stratégie de BNP Paribas est encore différente, la banque réorganisant son réseau selon trois formats d'agences : "express" pour les opérations de base, "conseil" pour les clients souhaitant dialoguer avec un conseiller bancaire, et "projet" pour les prestations plus complexes, comme l'octroi de crédits immobiliers. De son côté, la Société générale travaille, entre autres, au regroupement de petites agences afin d'en édifier de plus grandes, où des conseillers généralistes pourront orienter leurs clients vers des spécialistes du crédit immobilier, de la gestion de patrimoine, etc., un peu sur le modèle du milieu médical.

Plusieurs années seront vraisemblablement nécessaires pour savoir quels modèles d'agence du futur seront les plus pertinents. Une certitude, selon les experts de Capgemini Consulting : "Le modèle traditionnel, homogène, fournissant tous types de services à tous les segments de clientèle, n'est plus viable."

Christine Lejoux

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Commentaires 7
à écrit le 19/11/2014 à 16:59
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Les agences bancaires dans l'avenir seront de moins en moins nombreuses, c'est inéluctable. Les chargés d'accueil sont en train d'être supprimés (comme les pompistes il y a 20 ans et comme les caissières aujourd'hui) pour une question de rentabilité....

à écrit le 17/11/2014 à 23:40
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Pour avoir des machines, pas besoin d'agences, le GAB suffit. Sinon, on opère de chez de son PC. On pourrait encore raréfier les visites comme à la Poste avec ses machines qui ne fonctionnent que mal.

à écrit le 17/11/2014 à 12:26
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Ceux qui s'imaginent qu'une agence bancaire sert encore à quelque chose feraient bien de se renseigner sur Boursorama Banque ou Fortuneo.

le 17/11/2014 à 12:59
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Complètement d'accord ; mais il faut bien trouver un moyen de justifier des tarifs de banque de dépôt exorbitants. Compte tenu du prix de l'immobilier, des salaires des agents et du fait qu'il y a une agence à tous les coins de rue (c'est presque qu...

le 17/11/2014 à 14:16
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le taux de pénétration sur les banques en ligne n'est que de 7-8% à l'heure actuelle et encore il ne s'agit pas uniquement des comptes actifs.... sans nul doute que ce chiffre augmentera mais l'agence bancaire conserve encore un avenir surtout si ell...

le 17/11/2014 à 23:01
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N'importe quoi... Demandez donc à Boursorama ou autres des conseils en défiscalisation, placement autres que les livrest boustes ou encore des conseils pour des projets professionnels... La y a plus personne ! Si les agences arrivent à se redéfinir e...

le 16/03/2015 à 23:02
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Avez vous déjà retiré de l'argent dans un distributeur de bourso ou fortuneo ? voilà pourquoi il sont moins cher ! s'il y avait que des banques en ligne tout serait bien compliqué !

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