Immobilier de bureau : ville par ville, le vrai coût de la taxe foncière

Le taux n'est pas le seul élément pour comparer les impôts fonciers pour les entreprises en France. Alma Consulting Group a calculé leur coût réel dans les 45 plus grandes villes. Les collectivités locales ayant moins de marges de manœuvre financières, la pression fiscale devrait continuer à progresser.
La Tribune Infographie/BHEDOUIN

N'est pas la plus chère celle que l'on croit. Quand une entreprise veut évaluer le niveau d'une taxe foncière, elle se réfère généralement à son taux. Or le taux, voté par les collectivités locales, n'est qu'un des éléments permettant de calculer la charge réelle de cet impôt local. En agrégeant la taxe foncière, la taxe d'enlèvement des ordures ménagères (TOEM, sur le même avis d'imposition) ainsi que l'assiette sur laquelle s'applique le taux de la taxe foncière (la valeur locative varie en fonction des lieux d'implantation et des catégories de « locaux-types » professionnels), le cabinet Alma Consulting Group a réalisé un baromètre classant en fonction de leur "coût par mètre carré réel" les taxes foncières des 45 plus grandes villes de France. Comme les années précédentes, La Tribune publie en exclusivité ce "benchmark" à destination des entreprises.

En prenant en compte ce coût réel, certaines villes réputées pour leur faible taux, arrivent en fait en tête de palmarès. C'est le cas, comme en 2010, de Saint Denis qui, tiré par la zone du Stade de France, se retrouve la ville la plus chère avec un coût de 38,4 euros/m2 malgré un taux relativement modéré (41,71 %). Inversement, une ville comme Tourcoing est en fond de classement avec un coût au m2 de 10,4 euros en dépit d'un taux de 66 %. Tout dépend des spécificités de chaque zone. Si le coût médian atteint 19 euros le m2 (18 euros en 2010), « l'amplitude entre les villes reste importante, tant pour les taux (de 19,4 % à 66 %) que pour les coûts (de 9 euros à 38,4 euros)", note le cabinet de conseil. Cas atypique, Paris concentre à lui seul une forte amplitude avec un coût variant entre 8 et 54 euros le m2 avec deux "spots" traditionnels, les Champs-Élysées et Montparnasse rejoints depuis peu par la "cité financière" du 9e arrondissement. Autre particularisme de la capitale, une stabilité du coût médian (23 euros/m2, comme Lille ou Nantes) par rapport à 2010. Mais celui-ci "avait augmenté de 40 % sur les deux années précédentes", précise Pascal Martinet, directeur des audits fiscaux d'Alma Consulting Group.

Faible conscience de la part des entreprises

Ce baromètre a donc l'intérêt d'offrir plus de lisibilité aux entreprises, alors que le paysage fiscal local se complique, notamment depuis la réforme de la taxe professionnelle (dont le remplacement par la contribution économique territoriale, basée en partie sur les valeurs locatives foncières, s'est traduit par une hausse d'impôt pour 845.000 entreprises, selon un récent rapport du Sénat). Du coup, "les entreprises n'ont pas conscience que le cumul de toutes les taxes peut atteindre de 25 % à 40 % des loyers payés par l'occupant", constate Pascal Martinet. Et mis à part Paris, les coûts d'imposition de taxe foncière ont en fait augmenté de 4 % en moyenne. Ce alors que dans le même temps, les frais de gestion, réformés, ont baissé de 5 points. Par conséquent, cette "accalmie n'est que de pure apparence". Pour preuve, selon Pascal Martinet, alors que le taux global national (qui associe la taxe foncière, de 34 % en moyenne, et la TOEM, de 9 % en moyenne) est de 43 %, celui des 45 villes du baromètre atteint pour la première fois les 50 %. Le cabinet table pour les prochaines années sur une croissance "à un rythme soutenu".

De fait, la hausse moyenne de 4 % du coût réel de la taxe foncière n'est qu'un début. Pourquoi ? La réforme de la taxe professionnelle (TP) ayant profondément remanié la fiscalité locale, "la taxe foncière devient le principal impôt pour le financement des communes et les départements [Ndlr : elle n'est plus perçue par les régions depuis 2011], qui disposent d'un pouvoir de taux", estime le cabinet. S'est en effet substituée à la TP une taxe plafonnée que les collectivités locales ne peuvent plus moduler : la contribution économique territoriale (CET), composée d'une cotisation foncière des entreprises (CFE, basée sur les valeurs locatives foncières et destinée aux communes) et d'une cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE, destinée aux régions, aux départements et aux communes), dont le taux est fixé au niveau national.

Moins d'investissements

Par ailleurs, les difficultés d'accès au crédit des collectivités, qui a conduit le gouvernement à débloquer vendredi 3 milliards d'euros via la Caisse des Dépôt (une rallonge n'est pas exclue une fois connu le 30 novembre l'état des lieux précis du financement des collectivités demandé par le Premier ministre) et les contraintes budgétaires que leur impose parallèlement ce même gouvernement (gel de la dotation de l'Etat en 2011-2013 et baisse de 200 millions de recettes dans le cadre du premier plan de rigueur) ont réduit significativement leurs marges de manoeuvre financières alors même qu'elle doivent assumer des charges supplémentaires du fait de la décentralisation. Déjà, leurs capacités de désendettement (lire La Tribune du 14 septembre 2011) mais aussi d'investissement se sont réduites. C'est bien simple, les collectivités n'assurent plus désormais que 63 % de l'investissement public contre 71 % auparavant. "Le gel de la dotation de l'Etat équivaut cette année à 1,3 milliard d'euros de recettes en moins et de nouvelle dépenses s'annoncent notamment avec l'entrée en vigueur en 2012 de la péréquation horizontale. Il faut prendre garde à ne pas entamer un cycle récessif !", a prévenu Jean Launey, le trésorier général de l'Association des maires de France, jeudi dernier, en présentant les grandes lignes du prochain congrès des maires des de France (du 22 au 24 novembre) qui s'annonce tendu.

Dans ces conditions, "les impôts locaux sont les premiers impôts des entreprises avec l'impôt sur les sociétés et la première ressource des collectivités territoriales", constate Pascal Martinet. Alors que la taxe foncière augmente déjà en moyenne de 5 % par an (son produit est passé en 10 ans de 12 à 23 milliards d'euros), sa croissance devrait se poursuivre, anticipe le cabinet. Reste à savoir quel impact aura la révision prévue en 2014 des valeurs cadastrales, inchangées depuis 1970 (le décret déterminant les catégories de locaux vient d'être publié). La TOEM (6 milliards en 2011), dont le taux est passé en moyenne en 10 ans de 7 % à 9,3 % et qui a l'avantage de n'être ni encadrée, ni plafonnée, ni affectée, devrait aussi poursuivre sa hausse. Quant à la taxe d'habitation, dont les avis viennent d'arriver chez les particuliers, son produit a été transféré au bloc communal. En fonction de la politique d'abattement des communes et communautés, certains ménages ont vu cet impôt s'alléger mais en général, la plupart ont été perdants.

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Commentaire 1
à écrit le 07/11/2011 à 6:47
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La CFE est même levée en l'absence totale de locaux dédiés à une activité professionnelle. Quand à la TOEM, suivant la taxe foncière, celle-ci devrait se mesurer "à tant la corbeille à papier" pour un résultat décoiffant....

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