Résidences seniors : attention à l’emballement !

Le potentiel évident du marché des résidences seniors ne doit pas faire oublier la complexe réalité.
Mathias Thépot
Actuellement, 0,5% des personnes âgées vivent dans des résidences seniors.

Portée par le gouvernement, qui en fait une des ses 34 filière d'avenir, la "silver économie" a de l'avenir. Près de 12 millions de personnes auront plus de 75 ans en 2060, dont 5,4 millions auront plus 85 ans. A titre de comparaison, en 2007, 5,2 millions de séniors avaient plus de 75 ans, dont 1,2 million plus de 85 ans.

Bien loger cette population à l'avenir est un enjeu de taille pour les professionnels de l'immobilier… et une promesse potentielle de pérennité économique pour eux.

L'action du secteur privé pourra notamment être utile à la collectivité dans le cadre de la lutte contre l'isolement des personnes âgées en bonne santé. Il est en effet à prévoir que, parallèlement au vieillissement de la population, le progrès médical allonge l'espérance de vie et le bien-être de la population. Les résidences seniors, composées d'appartements autonomes et de parties communes, pourraient ainsi tirer leur épingle du jeu.

L'offre ne répond qu'à 10% de la demande...

D'autant que pour l'instant, "l'offre en résidences seniors ne répond aujourd'hui qu'à 10% de la demande", explique Benjamin Nicaise, président de Cerenicimo, une plateforme dédiée à l'investissement immobilier. En outre, seulement "0,5% des séniors vivent dans des résidences seniors alors qu'en Angleterre ou en Allemagne, cette part dépasse les 5%", constate Alexis Moreau, directeur général de Cogedim Club. Le marché français a donc un réel potentiel. Il est d'ailleurs en hausse de 20% en 2013, selon Cerenicimo. 

Reste que beaucoup de professionnels du secteur mettent en garde contre le risque d'emballement. Car il n'est pas aisé de convaincre un senior d'emménager dans une résidence dédiée. "Ces populations non dépendantes ne sont pas contraintes. Elles changent d'habitat par choix, à cause de l'isolement, d'un domicile qui n'est plus adapté, ou encore de la crainte d'un accident à venir", note Benjamin Nicaise. Elles sont du coup très exigeantes en matière "de convivialité, de services de proximité, de qualité de l'environnement et de cadre de vie", ajoute-t-il.

Difficile de faire accepter le changement de logement

Un senior prend ainsi en moyenne huit mois pour se décider à changer de domicile, entre le premier jour de visite et le déménagement effectif, explique Cerenicimo dans une étude. Il faut aussi dire que pour une population propriétaire à 75% en moyenne, attachée sentimentalement à son logement, il est difficilement concevable de quitter son domicile à un âge tardif.

Les sites retenus pour construite des résidences seniors sont donc "nécessairement de grande qualité et donc très convoités, raréfiant de fait le nombre de fonciers éligibles", explique Benjamin Nicaise. La plupart des projets de résidences seniors se lancent dans les centres-villes. Ce qui rend l'équilibre économique de l'opération plus difficile à atteindre. 

Un marché encore loin d'être à maturité

 "Le marché de la résidence senior n'a pas encore trouvé sa maturité. Le bon modèle économique n'est pas facile à trouver ", constate ainsi François Bertière, le président directeur général de Bouygues Immobilier, même si "par le biais des projections démographiques, nous savons très bien qu'il est appelé à se développer fortement. C'est inévitable", ajoute-t-il. Pour l'instant, Bouygues Immobilier privilégie le maintien à domicile des personnes âgées "dans des logements adaptés ou adaptables si la santé de la personne âgée occupante se dégradait", explique François Bertière.

Le développement du marché des résidences seniors pourrait du reste œuvrer pour l'intérêt général en "contribuant modestement à rendre le marché du logement plus liquide ", note Alexis Moreau. Et notamment libérer des logements trop grands pour des seniors vivants seuls, et davantage adaptés à d'autres besoins.

Mathias Thépot

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Commentaires 2
à écrit le 30/05/2014 à 19:49
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"La plupart des projets de résidences seniors se lancent dans les centres-villes..." où les jeunes sont contraints d'aller bosser... Normal, normal : Le bien-être de million d'électeurs n'a pas de prix! Espérons qu'on mette à contribution les subvent...

à écrit le 30/05/2014 à 18:50
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Ce n'est pas que le senior, ne veut pas y aller, c'est qu'il n'a pas la retraite assez grosse pour payer ce genre de structure........................

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