Réforme des retraites : les arbitrages et les enjeux

Age légal de la retraite à 62 ans d'ici 2018, augmentation de la fiscalité pour les plus hauts revenus, alignement partiel des cotisations des fonctionnaires sur celles du secteur privé, ... L'avant-projet de réforme sur les retraites, présenté ce mercredi matin, sera de nouveau soumis au président Nicolas Sarkozy vendredi. Tour d'horizon des premiers arbitrages.

Eric Woerth, ministre du Travail, l'a confirmé ce mercredi matin en présentant l'avant-projet de loi sur les retraites : l'âge légal sera porté de 60 à 62 ans à l'horizon 2018, à raison d'un allongement de quatre mois par an à partir de juillet 2011. Cette mesure permettra d'économiser 19 milliards d'euros en 2018.

L'avant-projet de réforme sur les retraites sera à nouveau soumis au président Nicolas Sarkozy vendredi, après de nouvelles consultations avec les partenaires sociaux, a indiqué mardi soir un communiqué de l'Elysée. L'Elysée réaffirme également que le projet sera finalement présenté en conseil des ministres le 13 juillet, "afin que le parlement puisse en débattre au début du mois de septembre". Les réactions sont très nombreuses tant du côté politique que syndical  A lire également, notre interview d'un économiste de l'OFCE, professeur à Paris X Dauphine, Henri Sterdyniak.

Voici les principaux aspects de cette réforme :

L'AGE LEGAL DE LA RETRAITE PORTE A 62 ANS

L'âge auquel les Français peuvent demander leur pension de retraite (le fameux "âge légal de la retraite") est fixé à 60 ans depuis 1983. Le report de cet âge est désormais acté par le gouvernement. Les Français nés en 1956 ou après cette date ne pourront donc pas partir en retraite avant leur 62e anniversaire. Eric Woerth assure que cette mesure permettra d'économiser 19 milliards d'euros.

Pour parvenir à une économie de même ampleur en utilisant l'allongement de la duréee de cotisation, il aurait fallu, selon le ministre du Travail, passer de 41 ans et demi à 47 années de cotisations ."Compte-tenu des estimations actuelles de l'Insee, la durée de cotisations devrait être de 41,5 ans en 2020", indique le gouvernement, suggérant que ce rythme n'était pas gravé dans le marbre.

Le relèvement à 62 ans en 2018 vaut aussi pour tous les fonctionnaires dont l'âge d'ouverture des droits est aussi fixé aujourd'hui de 60 ans. Toujours dans la fonction publique, les agents en "catégorie active", disposant de droits à un départ anticipé, verront leur âge de départ anticipé reculer d'autant (à 52 ans lorsqu'ils pouvaient partir à 50 et à 57 ans lorsque l'âge est de 55 ans). Quant aux régimes spéciaux, ils ne seront pas épargnés, mais le recul s'appliquera avec un décalage dans le temps, à partir de 2017 pour tenir compte du calendrier de la réforme de 2008.

Le report du départ à 60 ans conduira à repousser d'autant l'âge minimum auquel il est possible de liquider sa retraite sans souffrir de décote, même si l'on a pas cotisé suffisamment longtemps. Cet "âge légal du taux plein", fixé actuellement à 65 ans sera lui aussi repoussé progressivement de deux années.

Le PS s'oppose au report du départ à 60 ans, de même que les syndicats. La CFDT  a voté lors de son congrès la semaine dernière en faveur du principe de l'allongement de durée de cotisation. 

LES CONTRIBUTIONS DEMANDEES AUX PLUS RICHES

Les "plus aisés" contribueront au financement de la réforme, avaient annoncé sur tous les tons le ministre du travail Eric Woerth et le Premier ministre François Fillon.

Un certain nombre de mesures annoncées ce mercredi matin vont dans ce sens

- le prélèvement dsur la derniere tranche d'impôt sur le revenu est relevé de 1%.

- les plus-values de cessions immobilières seront taxées au premier euro.

- pour les stocks options, la contribution employeur passera de 10% à 14%, et la cotisation du salarié bénéficiaire de 2,5% à 8%.

- le gouvernement avait souhaité également taxer les retraites "chapeaux". Une contribution sociale de 14% est instaurée. Elle sera payée par le bénéficiaire et non par l'entreprise qui finance cette retraite.

LES FONCTIONNAIRES CONCERNES

Dans le cadre d'une convergence entre les régimes du privé et du public et d'une "équité" de la réforme, le gouvernement prévoit d'aligner en dix ans le taux de cotisation des fonctionnaires sur celui du privé, le faisant passer de 7,85% actuellement à 10,55%, qui est le taux du privé. Les syndicats de fonctionnaires dénoncent une baisse du pouvoir d'achat à venir.

Le gouvernement prévoit également de fermer dès 2012 le dispositif de départ anticipé pour les fonctionnaires parents de trois enfants ayant 15 ans de service. Seuls les parents ayant déjà trois enfants en 2012 pourront encore bénéficier de ce dispositif, qui concerne en majorité les femmes.
En 2008, près de 14.600 fonctionnaires (des femmes à 99%) ont pu partir à la retraite grâce à ce dispositif.

LA PRISE EN COMPTE DE LA PENIBILITE

Le projet de réforme des retraites prévoit de maintenir l'âge légal de départ à 60 ans, avec une pension à taux plein, pour les salariés ayant une incapacité physique d'au moins 20%. Par ailleurs le gouvernement entend maintenir le dispositif "carrières longues", qui, explique Eric Woerth, "a constitué une avancée sociale considérable de la réforme Fillon". Il sera "poursuivi et même élargi aux salariés qui ont commencé à 17 ans". Cela représente "un effort financier important, puisqu'elle conduira 50.000 personnes par an à ne pas être concernées par la retraite à 62 ans et 90.000 personnes en 2015".

LE RESERVE DE RESERVES DES RETRAITES UTILISE

Oui, le Fonds de Réserve pour les Retraites sera utilisé pour financer intégralement le déficit du régime général d'ici 2018, a proposé mercredi le gouvernement français.  Le FRR, doté de 34,5 milliards d'euros d'actifs, est censé couvrir à partir de 2020 une partie des besoins de financement des régimes de retraite du secteur privé.

"En ce qui concerne le financement des déficits accumulés jusqu'au retour du régime à l'équilibre, en 2018, ils seront repris au fur et à mesure par la Caisse d'amortissement de la dette sociale (Cades), qui pourra compter sur les ressources du Fonds de réserve", a dit le ministre du Travail Eric Woerth lors de la présentation de la réforme des retraites. "Grâce à ces ressources, la Cades pourra reprendre l'intégralité des déficits accumulés d'ici 2018", a-t-il ajouté. "Je ne serai pas de ceux qui racontent aux Français que le FRR est une solution pour dans 20 ans, et qu'y toucher maintenant serait criminel", a expliqué Eric Woerth.

DES MESURES POUR L'EMPLOI DES SENIORS

Eric Woerth annonce "une aide à l'embauche d'un an pour les chômeurs de plus de 55 ans" qui devrait permettre de favoriser l'emploi des seniors. La réforme prévoit aussi "le développement du tutorat, pour assurer une transmission des savoirs au sein de l'entreprise et favoriser une fin de carrière plus valorisante pour les seniors ".

Mais le ministre du Travail se dit persuadé que "l'augmentation de l'âge légal va permettre d'améliorer le taux d'emploi des seniors ", a-t-il jugé, car "à partir du moment où les paramètres de la retraite changent, la conception même que les entreprises ont des salariés âgés change également".

DES MESURES EN FAVEUR DES FEMMES ET DES JEUNES

Le gouvernement entend aider les jeunes dont le début de carrière est de plus en plus souvent fragmenté et les femmes qui doivent concilier l'éducation des enfants et leur vie professionnelle.  "Les jeunes en situation précaire bénéficieront de trimestres validés supplémentaires lorsqu'ils sont au chômage non indemnisé. Aujourd'hui, ils peuvent valider jusqu'à 4 trimestres d'assurance au titre de la première période de chômage non indemnisé. Le gouvernement propose de porter le nombre de trimestre validés à six", a assuré le ministre du Travail.

"Second point, nous devons encore agir pour améliorer les retraites des femmes. Nous avons fait des progrès majeurs dans ce domaine. L'écart de pensions s'est réduit et aujourd'hui les femmes ont au moins autant de trimestres que les hommes", a-t-il noté.

Il faut encore selon lui "empêcher que le congé maternité ne fasse chuter la pension de retraite ", ce qui "nécessite, contrairement à aujourd'hui, que l'indemnité journalière perçue pendant le congé maternité entre désormais dans le salaire de référence sur lequel sera calculée la pension de retraite ".

En outre, il faut "lutter plus activement contre les inégalités salariales au cours de la carrière". "Les entreprises ne s'investissent franchement pas suffisamment dans la réduction des écarts salariaux tout au long de la carrière". "Depuis 27 ans, les entreprises de plus de 300 salariés doivent faire un diagnostic de la situation comparée des femmes et des hommes. Seule une entreprise sur deux fait effectivement ce rapport", a-t-il souligné. "Le gouvernement a donc décidé de prévoir un dispositif de sanction de l'absence de diagnostic de situation comparée."

QUID DU REGIME DE RETRAITE DES PARLEMENTAIRES ?

C'est le dernier scandale du moment : les retraites très généreuses des sénateurs et des députés. Eric Woerth a demandé aux présidents des deux chambres d'annoncer une réforme, "dans les jours qui viennent". Le Premier ministre François Fillon a déjà annoncé qu'il allait interdire aux ministres de cumuler une indemnité ministérielle avec une retraite de parlementaire.

Le président UMP de l'Assemblée, Bernard Accoyer, s'est prononcé ce mardi en faveur d'une réforme en profondeur du régime et a promis des décisions "cet automne".

L'IMPACT FINANCIER DES MESURES ANNONCEES :

Voici l' impact des mesures fiscales proposées tel que le prévoit le gouvernement :

CONTRIBUTIONS DES HAUTS REVENUS : 410 millions d'euros en 2010, 630 millions en 2011
- Augmentation de 40 à 41% du taux marginal du barème de l'impôt sur le revenu : 230 millions en 2010, 290 millions en 2011
- Retraites-chapeaux : 110 millions en 2010, 140 millions en 2011
- Stock-options : 70 millions en 2010, 200 millions en 2011

CONTRIBUTIONS DES REVENUS DU CAPITAL : 1.090 millions en 2010, 1.340 millions en 2011
- Hausses des prélèvements proportionnels :
Plus-values de cessions mobilières (18 à 19%) : 90 millions en 2010, puis 110 millions
Plus-values de cessions immobilières (16 à 17%) : 45 millions, 50 millions
Prélèvement sur dividendes et intérêts (18 à 19%) : 130 millions, 160 millions
- Suppression du crédit d'impôt sur les dividendes : 645 millions, 800 millions
- Imposition des plus-values de cessions de valeurs mobilières : 180 millions, 220 millions

TOTAL DES TAXES SUR LES MÉNAGES : 1.500 millions en 2010, 1.970 millions en 2011
- Annualisation des allègements de charges sociales : 2.000 millions en 2010, 2.400 millions en 2011
- Suppression du plafonnement sur dividendes reçus par une société mère de ses filiales : 200 millions, 250 millions

TOTAL TAXES SUR LES ENTREPRISES 2.200 millions en 2010, 2.650 millions en 2011

TOTAL : 3.700 millions en 2010, 4.600 millions en 2011

La réforme contribuera à réduire le déficit public de la France de 0,5 point d'ici 2013, date à laquelle le gouvernement s'est engagé à le ramener à 3% du PIB, selon Bercy. Et d'ici 2020, les mesures annoncées par le gouvernement "diminueraient le déficit public de 1,9 point de PIB", selon la même source.

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Commentaires 3
à écrit le 04/06/2012 à 3:16
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Mère de 4 enfants travaillant depuis l Age de 15 ans dont 33,5ans comme surveillante de nuits dans le secteur prive pré retraite ou retraite a quel Age?

à écrit le 04/09/2011 à 6:18
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je suis neé juillet 1955, j'ai commencé à travailler en octobre 1970 et je n'ai pas arreté de travailler depuis,je suis garde malade dans une maison de retraite , je souhaiterais savoir à quelle age je pourrais partir en retraite et si enventuellemen...

à écrit le 29/01/2011 à 7:15
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l age de départ anticipe est-il possible 60 ans pour les personnes ayant commencer avant 18 ans tout régime confondu, privé et fonctoinnaire.

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