Karl-Friedrich Stracke ne tarit pas d'éloges sur... l'alliance avec PSA. "J'ai une excellente relation avec Philippe Varin (président de PSA). Il y a une bonne compréhension entre nos deux entreprises. Nos points forts sont complémentaires " explique à latribune.fr Karl-Friedrich Stracke, le nouveau PDG d'Opel, la filiale allemande en difficulté de General Motors. L'américain a pris 7% du constructeur français au terme de l'alliance stratégique nouée fin février entre les deux groupes. "Les premières conclusions concrètes des équipes de travail communes devraient voir le jour en juin dans la logistique. Suivront ensuite les achats, puis l'ingénierie ", assure Karl-Friedrich Stracke, lors d'un entretien en marge de la remise officielle à l'Opel Ampera hybride (et à sa s?ur jumelle la Chevrolet Volt) du prix de la Voiture de l'année octroyé par un jury européen spécialisé (dont nous faisons partie). "Dans les achats, nous apprenons l'un de l'autre. Nous comparons nos prix d'achat des composants ", assure le patron de la firme de Rüsselsheim.

Europe, Chine, Amérique du sud

« PSA peut apporter ses diesels. Il a aussi le confort de ses modèles comme point fort », reconnaît le PDG, qui confirme que les premiers produits communs « sortiront en 2016 ». L'homme semble notamment apprécier la nouvelle petite Peugeot 208, dont il nous a vanté les mérites. « Nous voulons avoir une relation égalitaire. Si l'un fait un véhicule pour l'autre, ce sera sur la base d'une exacte réciprocité », indique Karl-Friedrich Stracke, tout en précisant : " nous parlons ensemble de l'Europe, mais aussi de la Chine, de l'Amérique du sud ".

Nouvelle mini-citadine

S'il mise sur les économies d'échelles avec PSA pour se redresser, le PDG table aussi sur des nouveaux modèles, qui ne devront rien... à PSA. La firme allemande va ainsi commercialiser fin 2012 un petit 4x4 de 4,28 mètres de long, le Mokka, produit par GM en Corée. Par ailleurs, le constructeur présentera au prochain Mondial de l'automobile parisien début octobre une mini-urbaine chic et snob avec quelques clins d'?il rétro, l'Adam (du prénom du fondateur de la firme). Cette anti-Fiat 500 et anti-Mini de 3,70 mètres de long sera produite à Eisenach, en ex-RDA, et commercialisée début 2013. Cette voiture « mode » originale proposera notamment un grand choix de coloris extérieurs et intérieurs. Une première pour Opel, dont les produits sont traditionnellement plutôt ternes. « Elle sera fabriquée à raison de 100. 000 unités annuelles », nous assure le PDG. Viendra ultérieurement une petite voitures, plus démocratique et spacieuse, pour remplacer la Corsa actuelle, qui avait repris la plate-forme de la Fiat Punto dans les cadre des accords avortés avec l'italien.. Cette dernière nouveauté, prévue avant l'alliance avec PSA, ne sera pas non plus sur une plate-forme commune avec le français.

Restructuration inévitable

L'alliance avec PSA et la sortie de nouveaux modèles attractifs n'empêcheront pas Opel de devoir supprimer des emplois. « En 2011, nous avons gagné de l'argent pendant les trois premiers trimestres. Puis, il y a eu la chute du marché. Nous avons besoin d'une restructuration. Il faut réduire les coûts pour revenir à l'équilibre », affirme le PDG qui refuse de s'engager sur une date pour... le retour aux profits. GM a encore perdu 256 millions de dollars (200 millions d'euros) sur le Vieux continent au premier trimestres 2012, après un déficit avant impôts de 700 millions (540 millions d'euros) pendant l'année 2011 et une perte de 2 milliards durant l'exercice 2010. GM est en perte depuis plus de dix ans en Europe.

Grand plan stratégique

Karl-Friedrich Stracke doit présenter le 28 juin prochain un grand plan stratégique, que redoutent les syndicats. Le puissant syndicat allemand IG Metall a d'ailleurs menacé en mai dernier la direction d' Opel d'une "confrontation dure" pour conserver tous les sites du constructeur outre-Rhin. Opel a en effet annoncé récemment qu'il produirait son modèle phare, la future compacte Astra, uniquement en Angleterre et en Pologne, à partir de 2015. Ce modèle, le plus vendu de la marque, est aujourd'hui assemblé à Rüsselsheim (près de Francfort) - qui emploie 3.500 personnes -, Ellesmere Port (nord-ouest de l'Angleterre) et Gliwice (sud de la Pologne). A Ellesmere Port, cette décision va se traduire par 700 créations d'emplois, ainsi qu'un investissement de 155 millions d'euros. L'usine de Gliwice aura droit à un investissement d'un montant similaire.

Fermeture d'une usine en Europe

Les experts affirment régulièrement que General Motors va fermer une usine en Europe, où il est chroniquement surcapacitaire et déficitaire. Malgré la retrait de la production de l'Astra, Rüsselsheim pourrait toutefois être sauvé, au détriment de... Bochum. Rüsselsheim est en effet plus moderne et abrite le siège social historique de la firme germanique. En compensation pour la perte de l'Astra, Rüsselsheim pourrait produire des véhicules pour PSA, comme les futures familiales Peugeot et Citroën. L'usine de Bochum, qui emploie 3.100 personnes pour une capacité de production de 160.000 unités annuelles, risque, elle, de souffrir.. Le responsable du comité d'entreprise de l'usine de Bochum, Rainer Einenkel, déclarait à la mi-mai au magazine « Wirtschaftswoche » que la direction d'Opel préparait le transfert de la production du futur monospace Zafira vers une autre usine, ce qui rendrait la survie de Bochum aléatoire.

Après 2015, tout est possible

GM s'était engagé il y a deux ans à ne procéder à aucun licenciement ni fermeture d'usine dans sa filiale européenne jusqu'en 2014. Hormis l'usine belge d'Anvers, qui a été bel et bien fermée début 2011. Mais l'actionnaire de Detroit a exigé un nouveau plan de redressement. GM avait failli vendre sa filiale allemande en 2009, mais s'était ravisé in extremis.