L'Insee broie du noir pour la conjoncture et l'emploi en France

Par latribune.fr  |   |  686  mots
Selon l'institut de conjoncture, le recul du PIB pourrait atteindre 2,9% cette année. C'est deux fois plus que les prévisions de Bercy. Seule lueur positive, le pouvoir d'achat progresserait modérément au premier semestre.

L'Insee brosse un sombre tableau de l'économie française dans sa note de conjoncture de mars: l'institut table désormais sur une baisse d'activité de 1,5% au premier trimestre (du jamais vu depuis le premier trimestre 1975 lorsque la France subissait de plein fouet le choc pétrolier) puis de 0,6% au deuxième, qui entraînera près de 400.000 destructions d'emplois.

La chute du PIB (produit intérieur brut) devrait ensuite se modérer au deuxième trimestre, les plans de relance français et étrangers permettant de limiter un peu l'impact de la crise internationale, prévoit l' Insee. Si la croissance devait être nulle au deuxième semestre, la France achèverait l'année 2009 sur un recul du PIB de 2,9%, prévient l' Insee, soit deux fois plus que les prévisions de Bercy qui table sur un recul de l'activité de seulement 1,5% sur l'année.

Les prévisions de l'Institut national de la statistique ne vont pas au-delà de la fin juin mais son scénario continue de suggérer un retour à la croissance en fin d'année. Selon l'Insee, il faudrait une croissance de 1,9% au troisième comme au quatrième trimestres - des hypothèses peu réalistes dans le contexte actuel  - pour atteindre l'objectif gouvernemental sur l'ensemble de l'année.

Dans sa précédente note de conjoncture en décembre, l'Insee anticipait un repli du PIB de 0,8% au dernier trimestre 2008, puis de 0,4% au premier trimestre 2009 et de 0,1% au deuxième.

Au premier trimestre, l'industrie restera la plus touchée par la crise, au prix de pertes d'emplois massives, mais la consommation devrait faire de la résistance grâce à la désinflation qui préserve le pouvoir d'achat. Confrontées à la faiblesse de la demande intérieure et étrangère - l'Insee prévoit une chute de 5,6% du commerce mondial au premier trimestre - les entreprises continueront de rogner sur l'investissement qui devrait chuter de 5,1% au premier trimestre et encore de 3,4% au deuxième, pour un acquis 2009 de -8,8% à la fin juin.

Les conditions de financement toujours difficiles ne les inciteront pas non plus à investir, tout comme leurs capacités excédentaires. Le taux d'utilisation des capacités est actuellement à 76%, trois points et demi en dessous du niveau atteint à l'occasion de la récession de 1993. Le fort mouvement de déstockage qui a amputé la croissance de 0,9 point au quatrième trimestre devrait en outre se prolonger avec une contribution négative de 0,6 point au PIB du premier trimestre puis de 0,2 point au deuxième. La production manufacturière, en baisse de 7,6% au quatrième trimestre 2008, chuterait encore de 7% au premier trimestre et de 3% au deuxième, pour un acquis 2009 de -15% à fin juin.

Conséquence du repli de l'activité, le marché du travail devrait perdre 333.000 emplois au premier semestre, un chiffre qui atteindrait même 387.000 dans le secteur marchand non agricole (197.000 au premier trimestre, 190.000 au deuxième). Le recul de l'emploi s'accélérerait dans l'industrie mais aussi dans les services, notamment dans l'intérim dont l'automobile et la construction sont fortement utilisateurs. La construction, grand pourvoyeur d'emplois ces dernières années, commencerait aussi à en perdre en 2009.

Le taux de chômage, qui avait baissé de deux points entre le début 2006 et le début 2008, devrait poursuivre sa remontée amorcée fin 2008 pour atteindre 8,8% en France métropolitaine au deuxième trimestre 2009, soit une hausse d'un point en six mois.

Seule lueur positive dans ce sombre tableau : l'Insee s'attend à ce que le pouvoir d'achat des ménages progresse légèrement (de 0,2% au premier trimestre, 0,3% au deuxième) grâce au dynamisme des prestations sociales et à la désinflation. Le taux d'inflation, redescendu à 1% fin 2008 après avoir culminé à 3,6% pendant l'été, devrait même passer temporairement en territoire négatif (-0,6% à fin juin) mais l'Insee écarte le risque d'une déflation.

La résistance du pouvoir d'achat permettrait à la consommation de progresser encore légèrement (de 0,2% au premier trimestre, 0,1% au deuxième) même si la dégradation du marché du travail et l'incertitude des perspectives de revenus favorisent une épargne de précaution.