Les producteurs de lait français annoncent l'épandage "massif" de leur production

Par latribune.fr  |   |  571  mots
Certains producteurs de lait français ont annoncé l'épandage massif de leur production pour protester contre la baisse des prix et la dérégulation mise en marche par Bruxelles. Le ministre français de l'Agriculture reçoit ce vendredi les représentants des producteurs. Il rencontrera également, samedi, les syndicats agricoles, et, lundi, les banques et les assurances, pour discuter d'un allègement de la dette des professionnels de la filière.

Les éleveurs de la filière laitière, en grève depuis jeudi dernier pour protester contre la baisse des prix du lait, lancent ce vendredi une "journée blanche", avec un épandage "massif" de leur production, répondant ainsi à l'appel de l'Association des producteurs de lait indépendants (Apli) et de l'Organisation des producteurs de lait (Coordination rurale), soutenus par la Confédération paysanne.

Un rassemblement "gigantesque" ayant pour objet le déversement de centaines de milliers de litres de lait est entre autres annoncé à Tanis (Manche), à proximité du Mont Saint-Michel. Hier jeudi, dans le Calvados à Isigny-sur-mer, environ 300.000 litres de lait ont déjà été épandus, selon les gendarmes et un membre de l'Apli.

Le ministre de l'Agriculture, Bruno Le Maire, qui reçoit ce vendredi les représentants des producteurs, a déclaré dans la matinée sur RTL qu'il trouvait cette grève "choquante", "parce que nous voyons des producteurs de lait désespérés et il faut leur apporter des solutions" et parce que "dans un continent qui a 500 millions d'habitants et 33 millions de citoyens mal nourris, voir le lait jeté dans les champs ou ailleurs cela a quelque chose de choquant".

"Le choix mauvais de la dérégulation"

"Les premières évaluations que nous donnent les industriels c'est que la baisse d'approvisionnement en lait (est) de l'ordre de 10% sur le territoire national mais il n'y a pour le moment pas de problème d'approvisionnement", a annoncé le ministre.

"Nous avons fait le choix mauvais de la dérégulation il y a quelques années. Ce choix il faut le renverser et remettre en place une régulation européenne", a-t-il aussi déclaré.

Le ministre, qui doit rencontrer samedi les organisations syndicales agricoles, a annoncé qu'il recevrait également lundi les banques et les assurances pour discuter d'un allègement de la dette des producteurs. "De jeunes producteurs de lait […] se retrouvent avec des dettes de l'ordre de 800 à 1.000 euros chaque mois et des revenus de 800 euros, il ne s'en sortent pas", a-t-il souligné sur RTL.

Les propositions de Bruxelles rejetées

Le mouvement de grève est désormais actif dans plusieurs pays d'Europe comme l'Allemagne, la Belgique, les Pays-bas, l'Espagne. Le président de la FNSEA (premier syndicat agricole français), Jean-Michel Lemétayer, jusqu'à ces dernières jours peu favorable à la grève, a estimé jeudi en marge du salon de l'élevage (Space) à Rennes que les dernières propositions de Bruxelles n'étaient "pas supportables" et a demandé "le départ" de la commissaire européenne à l'Agriculture, Mariann Fischer Boel.

La Commission européenne a en effet proposé jeudi une série de mesures dont un assouplissement des règles de recours à des sortes de "primes à la casse" pour la restructuration du secteur. Elle a toutefois fermement campé sur son refus de revenir sur la hausse des quotas de 1% par an et leur suppression programmée pour 2015, à l'origine de la baisse des prix, selon les grévistes.

Trois régions françaises, Bretagne, Pays-de-La-Loire et Basse-Normandie, représentant 40% de la production laitière française, ont fait savoir jeudi au Space qu'elles lançaient un "cri d'alarme" aux élus territoriaux européens et demandaient le gel de l'augmentation des quotas. "Sinon, nous allons entrer dans une période de violence et de désespérance", a prévenu le président PS de la région Bretagne, Jean-Yves Le Drian.