Mobilisation face à la souffrance au travail

Par Isabelle Moreau  |   |  645  mots
François Fillon a mis en place hier une mission sur le stress au travail. Après la vague de suicides à France Télécom, la mobilisation sur les risques psychosociaux dans l'entreprise est très forte.

L'heure de la mobilisation sur les risques psychosociaux au travail a sonné. Et aujourd'hui, les initiatives sur ce thème foisonnent. Après la récente vague de suicides à France Télécom, personne ne veut être en reste sur le sujet : le ministre du Travail, Xavier Darcos, a lancé un plan d'urgence pour la prévention du stress au travail, les partenaires sociaux négocient sur le harcèlement, les groupes UMP et Nouveau Centre de l'Assemblée ont mis en place une commission de réflexion sur la souffrance au travail coprésidée par Jean-François Copé et Pierre Méhaignerie, dont le rapporteur Jean-Frédéric Poisson conduira, parallèlement avec sa collègue socialiste Marisol Touraine, une mission d'information sur les risques psychosociaux, le Sénat a créé une commission spéciale...

Une démarche préventive
Dernière initiative en date, la mission sur le stress au travail mise en place hier à Matignon par François Fillon, en présence de Xavier Darcos. Dans la lettre de mission qui sera adressée à Henri Lachmann, président du conseil de surveillance de Schneider Electric, à Christian Larose, président de la section du travail du Conseil économique, social et environnemental, et à Muriel Pénicaud, DRH du groupe Danone, le Premier ministre précise que le gouvernement souhaite disposer d'analyses et d'outils pratiques complémentaires pour engager une démarche préventive sur les questions de santé psychologique au travail. Charge pour eux d'identifier les difficultés des entreprises à intégrer la thématique des risques psychosociaux dans leur démarche de prévention, de repérer les bonnes pratiques dans les entreprises et de prendre en compte ces questions lors des opérations de restructuration. Les propositions qu'ils formuleront courant décembre alimenteront le deuxième plan santé au travail en cours de préparation. Pour le cégétiste Christian Larose, auteur du livre "Violences au travail. Agressions, harcèlements et plans sociaux" (*), "il n'est pas inutile que les politiques réfléchissent à ce sujet. La situation est de plus en plus difficile pour les gens et il est pour le moins utile et urgent de trouver des solutions, notamment en termes de prévention, pour comprendre ce qui se passe et mettre en place des outils." Et de préciser qu'"en période de crise, les méthodes de management et d'organisation du travail sont à revoir. Le fait d'être un bon financier ne fait pas un bon patron."

La prévention des risques psychosociaux est donc au cœur des démarches initiées. "C'est une question centrale. Or, l'investissement dans ce domaine n'est pas un coût, mais un élément important de la compétitivité globale des entreprises", estime Pierre Méhaignerie, président de la commission des Affaires sociales de l'Assemblée, qui se montre  "très réservé" sur l'élaboration de nouvelles lois sur le sujet. Compte tenu de l'ampleur de la mobilisation des politiques, il reste à espérer que les résultats seront à la hauteur des enjeux.

Les risques psychosociaux en 40 indicateurs
Pour mieux cerner les "risques psychosociaux" au travail, un récent rapport remis au gouvernement propose 40 indicateurs classés en six catégories : exigences du travail, charge émotionnelle, autonomie et marges de manœuvre, rapports sociaux et relations du travail, conflits de valeurs et insécurité socio-économique. La quantité de travail (22,6 % des salariés estiment qu'elle est "souvent ou toujours excessive") ou la "pression temporelle" (30,9 % disent ne pas disposer du temps nécessaire pour faire correctement leur travail) constituent des indicateurs de stress. Tout comme l'absence d'écoute du supérieur (20,5 % des salariés la ressentent) ou l'exposition à des comportements méprisants de collègues ou de supérieurs (13,3 % des salariés s'en estiment victimes). Renseignements : www.mieuxvivreautravail.anact.fr

 

(*) Les Éditions de l'Atelier. Les Éditions ouvrières, 2003.