La société française en "usure psychique", selon le médiateur de la République

Par latribune.fr  |   |  477  mots
Jean-Paul Delevoye, médiateur de la République.
Le médiateur de la République Jean-Paul Delevoye a remis son rapport annuel au Président de la République ce mardi. Il y dénonce notamment "l'excès de zèle de l'administration en matière de renouvellement des papiers d'identité" et le sentiment d'injustice qui traverse la société française et une qualité des rapports humains qui se "dégrade".

Le médiateur de la République, Jean-Paul Delevoye, a remis ce mardi son rapport annuel au président de la République. Au total, 76.286 affaires ont été transmises en 2009 à ses services, soit une augmentation de 16% par rapport à 2008. L'institution a traité 43.481 réclamations.

Pour la dernière année de son mandat, Jean-Paul Delevoye a dénoncé "l'excès de zèle de l'administration en matière de renouvellement des papiers d'identité" ainsi que "l'émergence de plus en plus prononcée d'un usager consommateur de droits, qui a rompu tout dialogue avec l'administration".

Selon le médiateur, les citoyens se sentent par ailleurs "ballottés" par "d'incessants changements censés l'avantager" (comme l'ouverture à la concurrence d'EDF-GDF, parfois "source de préjudice"), et désorientés par un "vertigineux empilement de lois et de règlements".

"Société en tension"

Le médiateur a également évoqué le sentiment d'injustice qui traverse la société française, un ressentiment des citoyens à l'égard de l'administration et une banalisation de la violence. "Je sens une société en tension et en usure psychique", a-t-il ainsi déclaré en présentant son rapport à la presse. "Avant, on était crevé au boulot, maintenant on est usé dans sa vie, on est tendu tout le temps".

"La qualité des rapports humains se dégrade avec des montées d'agressivité au sein des familles, des entreprises, des espaces publics", a-t-il ajouté, déplorant une "banalisation de la violence" et une judiciarisation excessive des conflits, preuves selon lui d'un manque de dialogue.

Il est à ses yeux "important de retrouver des lieux d'apaisement, de compréhension, d'explication, pour reconstruire un 'vivre ensemble', sinon c'est le chacun pour soi qui l'emportera, et c'est la fin du pacte républicain".

Propositions de réforme

Le médiateur a rappelé avoir aussi pour rôle de faire des propositions de réforme. Il l'a fait en 2009 pour les victimes d'essais nucléaires, la redevance audiovisuelle en prison ou les autopsies judiciaires. Il le fera en 2010 pour les retraites ou encore la "maltraitance des patients". Le médiateur s'est en effet inquiété d'une montée des "phénomènes de maltraitance" à l'égard des patients et d'agressivité envers le personnel hospitalier.

La fonction de médiateur de la République, créée en 1973, doit devenir prochainement le "Défenseur des droits", intégrant les fonctions du "défenseur des enfants" et de la Commission nationale de déontologie et de sécurité (CNDS). Les projets de loi organique et ordinaire nécessaires à cette réforme seront examinés au printemps par le Parlement, a annoncé l'Elysée.

Le futur défenseur des droits aura "les capacités de peser plus dans l'équilibre enatre le fort et le faible, entre l'administration et l'administré, c'est un point d'équilibre aujourd'hui plus nécessaire que jamais", a estimé Jean-Paul Delevoye.