Dans les trente ans qui viennent, les Français seront - sans surprise - plus nombreux et plus vieux, et continueront d'aimer le soleil et la mer, selon une étude de l'Insee publiée mardi sur la population des régions en 2040.
La population de la France augmentera de 15% entre 2007 et 2040, pour atteindre 73 millions d'habitants. La croissance démographique continuerait de se concentrer vers le Sud et l'Ouest : dans les régions méridionales, dans celles de la façade atlantique et en Rhône-Alpes, "si les tendances récentes démographiques perdurent", précise bien l'Insee, qui, à une telle échéance, ne maîtrise pas tous les paramètres, comme l'évolution des bassins d'emploi par exemple.
Ainsi, la population augmenterait de 27,9% en Midi-Pyrénées, de 28,5% en Languedoc Roussillon, de 26% dans les Pays de la Loire, de 24,1% en Bretagne, de 22,8% en Rhône-Alpes.
En perte de vitesse
Fait notable, une partie du Midi perdrait de son attractivité par rapport à la période précédente (1990-2007). En Provence-Alpes-Côte d'Azur (PACA) et en Corse, la population continuerait bien de s'accroître, mais à un rythme désormais proche de la moyenne nationale, entre 15% et 17% environ.
Le Midi finirait ainsi par suivre les pas de l'Ile-de-France, dont l'attractivité s'essouffle depuis les années 80, en raison des prix élevés de foncier et d'un cadre de vie parfois dégradé. L'Insee prévoit que la population d'Ile-de-France ne progresse que de 10% seulement d'ici à 2040, c'est-à-dire au même rythme que les régions rurales du centre, l'Auvergne et le Limousin, que l'on a si souvent décrites comme sinistrées et qui redeviennent attractives (lire ci-dessous).
Autres régions en perte de vitesse : le Nord-Pas-de-Calais, la Bourgogne, la Lorraine et la Champagne-Ardenne. Le dynamisme démographique y sera "moindre qu'ailleurs", souligne l'Insee, "dans le prolongement des tendances passées". La Champagne-Ardenne serait particulièrement marquée par la décroissance de sa population (-2%), "même si, après 2030, une phase de décroissance pourrait s'amorcer en Nord-Pas-de-Calais et en Lorraine", note l'Insee.
Les départements de la Haute-Marne et des Ardennes ont rencontré de fortes difficultés économiques, rappelle Olivier Léon, statisticien à l'Insee. A cela s'ajoute "l'absence d'une grande métropole et de pôles universitaires susceptibles d'attirer la population jeune et les activités tertiaires". La proximité de l'est francilien accentue encore cette immigration économique, souvent faite de "départs sans retours", explique Olivier Léon.
Doublement de la population des plus de 60 ans
Ensuite, est-il besoin de le rappeler, la population française vieillit et le nombre de décès va augmenter avec "l'arrivée aux grands âges des générations du baby-boom". Sur la décennie 2030-2040, dans les deux tiers des régions, le nombre de décès dépassera celui des naissances... L'Auvergne et le Limousin seront dans cette situation dès 2007 !
Dans le détail, le nombre de personnes de 60 ans et plus progresserait de 67 % en 2040, atteignant 22,6 millions, contre 13,5 millions en 2007. De même, les personnes âgées de 80 ans et plus passeraient de 3 millions à 7 millions.
Dans certaines régions, comme les Pays de la Loire et le Languedoc-Roussillon, qui exercent un fort attrait pour les retraités, la population des plus de 60 ans pourrait augmenter de 83% et 79% respectivement d'ici à 2040. Les plus de 60 ans représenteront ainsi 12,6% de la population en Limousin et en Corse. Concernant la Corse, le désir des retraités de s'y installer pourrait en faire la région la plus vieille de France, d'autant que les quadra et quinqua y sont déjà sureprésentés.
Où sont les jeunes ?
Avec 16,5 millions d'individus en 2040, le nombre des personnes de moins de 20 ans devrait globalement peu progresser en France d'ici à 2040 (+ 4 %).
En Corse, on observe un profil migratoire déficitaire pour les 15-22 ans (il y a plus de départs que d'arrivées), en raison des départs liés aux études. Ce profil redevient excédentaire ensuite, ce qui suggère que les individus reviennent après leurs études, contrairement à la Lorraine et la Champagne-Ardenne, où il y a une "évaporation systématique entre 18 et 30 ans", souligne Olivier Léon.
Les régions d'Outre-mer évolueraient de manière très différente en termes de répartition des âges. La Guadeloupe et la Martinique, "avec un âge moyen en augmentation de plus de 10 ans, rejoindraient les régions les plus âgées", explique l'Insee. A titre de comparaison, la population d'Ile-de-France va vieillir de 3 ans et demie seulement. La Guyane et la Réunion resteront quant à elles les régions les plus jeunes en 2040. Cette différence s'explique par les flux migratoires. Plus ouvertes aux migrations, la Réunion et surtout la Guyane resteront plus jeunes.
En métropole, l'Ile-de-France et le Nord-Pas-de-Calais, régions les plus jeunes en 2007, devraient le rester en 2040. La région capitale notamment reste "attractive aux jeunes âges", c'est-à-dire à l'âge des études, et déficitaire dès la trentaine, rappelle l'Institut de la statistique.
Enfin, mauvaise nouvelle, la population des 20-59 ans, qui regroupe l'essentiel des ressources en main d'?uvre, devrait baisser légèrement de 1 %.
Le centre de la France redevenu attractif
Depuis le début des années 2000, la plupart des espaces ruraux sont redevenus «largement attractifs» pour une population à la recherche d'un meilleur cadre de vie et d'un foncier abordable. Ainsi, selon l'Insee, la croissance démographique des régions rurales du centre de la France (Auvergne, Limousin) se rapprochera de celle de Ile-de-France. Les «politiques d'aménagement du territoire ont désenclavé certaines zones», explique Olivier Léon, statisticien à l'Insee. «Il est désormais possible de rejoindre certaines capitales régionales avec un TGV ou une quatre voies, là où c'était impossible il y a vingt ans.» Dans le cas du Limousin et de l'Auvergne, elles bénéficient de plus du dynamisme démographique de la région Rhône-Alpes, dont le «trop-plein» profite à ses voisines. L'Auvergne devient une «extension de la grande périphérie lyonnaise», souligne Olivier Léon. Tous les espaces ruraux ne sont pas cependant pas logés à la même enseigne : en témoigne la situation de la Champagne-Ardenne (voir article ci-dessus).