Un quinquennat de hausses d'impôts ?

Par latribune.fr  |   |  595  mots
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Par Ivan Best Éditorialiste

Évidemment, l'Élysée fera tout pour éviter que cette conclusion s'impose dans le débat public. Mais il est fort possible que le bilan fiscal de ce quinquennat se solde par des hausses d'impôts. Alors que le candidat Sarkozy avait fait de la baisse des prélèvements obligatoires (il faut quatre points de moins, affirmait-il au printemps 2007) un de ses principaux thèmes de campagne, le président élu les aurait finalement accrus. Il les a certes allégés dans un premier temps, en faisant adopter la fameuse loi Tepa, mais la multiplication des hausses de prélèvements depuis 2009 change la donne, avec surtout 11 milliards d'impôts et charges supplémentaires en 2011, auxquels s'ajouteront de nouvelles augmentations en 2012, sous forme de remises en cause des niches. Le bilan exact dépendra bien sûr des mesures annoncées ce mercredi.

Admettant à demi-mot cette réalité, le rapporteur général du Budget à l'Assemblée nationale, Gilles Carrez (UMP), écrit (*) que les décisions prises « auront, en revanche, permis de modifier la structure de la fiscalité dans un sens plus favorable au travail et à la compétitivité de l'économie ». C'est toute la question. À défaut d'allégements de la fiscalité, Nicolas Sarkozy l'a-t-il vraiment réformée, et dans quelle direction ?

L'économie était au coeur du programme sarkozyste, résumé en deux mots par le candidat : travail et propriété. S'agissant de la revalorisation du travail, la mesure phare fut l'exonération de cotisations sociales sur les heures supplémentaires. Plus personne ? même à Bercy ? n'estime aujourd'hui que cette décision a eu un véritable impact positif sur le travail. Elle a simplement permis de blanchir des heures supplémentaires. Quant à la promotion de la propriété, le crédit d'impôt pour achat d'un logement a disparu cette année (remplacé par un prêt à taux zéro plus restrictif), et la forte baisse de l'ISF votée au printemps a été compensée par un régime moins favorable pour les droits de succession. Cette orientation a donc été, pour le moins, perdue de vue.

Rapidement, même si cela ne figurait pas au programme, l'exécutif a actionné l'arme fiscale dans une optique de renforcement de la compétitivité des entreprises et de la croissance. L'augmentation du crédit d'impôt recherche est allée dans ce sens, de même que la suppression partielle de la taxe professionnelle, destinée à soutenir l'industrie. Ce sont donc près de 8 milliards d'euros qui ont été consacrés à cet objectif. Peut-on y ajouter la réforme-allégement de l'ISF ? Celle-ci est très favorable aux plus grosses fortunes (cf. graphique). Elle correspond à une logique d'économie de l'offre, à laquelle adhère Nicolas Sarkozy : en laissant les riches s'enrichir, on les incite à rester en France, et à y investir, ce qui est bon pour tout le monde. Le bilan des exils fiscaux ne permet pas de trancher en faveur de cette thèse.

Quant à la TVA réduite accordée à la restauration, l'une des plus importantes baisses d'impôt du quinquennat ? avec l'exonération des heures supplémentaires et la réforme de la TP ?, difficile de démontrer qu'elle renforce la compétitivité du site France. Comme nombre de ses prédécesseurs, Nicolas Sarkozy a navigué à vue en matière fiscale, entre engagements de campagne à la traduction économique contestable (exonération des heures sup), cadeaux politiques (aux restaurateurs) et volonté de renforcer la croissance.


(*) Rapport d'information préalable au débat d'orientation sur les finances publiques, juin 2001.