Jacques Chirac n'assistera pas à son procès

Par latribune.fr  |   |  957  mots
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Vendredi, les avocats de l'ancien président de la République ont présenté un dossier médical justifiant son absence. Lundi, le tribunal correctionnel de Paris ainsi que le parquet ont annoncé qu'ils acceptaient l'excuse médicale.

Jacques Chirac sera jugé "en son absence". Le tribunal correctionnel de Paris, après le parquet, a déclaré lundi accepter l'excuse médicale de l'ancien président de la République à son procès pour détournement de fonds publics.

"Il me semble que la demande présentée par ses conseils peut être acceptée", a déclaré le procureur, Michel Maes, lors du premier jour d'audience au tribunal correctionnel de Paris.

Ses avocats ont confirmé à l'ouverture de l'audience qu'ils souhaitaient représenter l'ancien président de la République à ce procès qui doit durer jusqu'au 23 septembre. Ils ont transmis vendredi au tribunal un rapport médical privé concluant que Jacques Chirac n'était pas apte à comparaître.

Le président du tribunal Dominique Pauthe a expliqué à l'audience qu'il statuerait plus tard sur la tenue éventuelle du procès en l'absence de l'ancien chef de l'Etat.

Agé de 78 ans, l'ancien président de la République est poursuivi pour détournement de fonds publics à la mairie de Paris entre 1992 et 1995, la dernière d'une longue série d'affaires de corruption dans lesquelles plusieurs de ses proches ont été condamnés ces quinze dernières années.

Après douze années d'immunité pénale à l'Elysée et quatre années d'atermoiements judiciaires sur ce dossier d'emplois fictifs présumés, avec deux renvois pour raisons de procédure, c'est maintenant la santé du prévenu qui est avancée pour épargner la comparution à Jacques Chirac.

Après avoir affirmé aux médias toute la semaine que Jacques Chirac viendrait au procès, sa défense a transmis au tribunal vendredi le dossier médical de l'ancien chef d'Etat avec un rapport du professeur Olivier Lyon-Caen, chef du service de neurologie à l'hôpital parisien de la Pitié- Salpêtrière.

"M. Chirac est dans un état de vulnérabilité qui ne lui permet pas de répondre aux questions sur son passé", dit ce rapport. Il parle selon le Journal du dimanche d'un trouble neuropsychique appelé "anosognosie", caractérisé lorsque le patient n'est pas conscient des problèmes dont il souffre.

Le tribunal, présidé par Dominique Pauthe, n'est pas lié par cette expertise privée réalisée à la demande de la famille de Jacques Chirac. Il peut ordonner une contre-expertise médicale judiciaire, ce qui le contraindrait à un nouveau renvoi. Il peut aussi accepter directement l'absence de Jacques Chirac.

DEUX OPTIONS, PROCÈS SANS LUI OU PAS DE PROCÈS

Si un problème de santé est retenu pour le dispenser de comparaître, deux options seront alors possibles.

Les juges peuvent tenir jusqu'au 23 septembre comme prévu un procès contradictoire, qui ne serait pas techniquement un "défaut", où Jacques Chirac serait représenté par ses avocats. C'est, officiellement, la voie proposée par les avocats de la défense Jean Veil et Georges Kiejman dans un communiqué.

La défense devrait cependant suggérer une autre voie, un "sursis à statuer" en attendant une hypothétique guérison, c'est-à-dire que Jacques Chirac ne serait sans doute jamais jugé. Cette demande peut être tranchée dans le jugement final après une audience normale.

Le dossier, dans lequel seront aussi jugés neuf proches de l'ancien président, vise 28 emplois présumés fictifs à l'Hôtel de Ville entre 1992 et 1995, des faits considérés par l'instruction comme emblématiques de l'utilisation des fonds publics parisiens pour la carrière politique de son maire.

Une partie civile, l'association anti-corruption Anticor, a envoyé samedi un courrier au tribunal pour fustiger l'orchestration médiatique de l'excuse médicale de Jacques Chirac et exiger sa présence au procès.

"On est dans le chiraquisme pur, faire de la stratégie politicienne de bas étage à un procès", a dit son avocat, Jérôme Karsenti.

Le parquet n'a pas fait connaître sa position, mais il est plus que probable qu'il accepte l'absence de Jacques Chirac, le procureur Jean-Claude Marin ayant déjà annoncé qu'il ne demanderait pas de condamnation, les charges étant selon lui "insuffisamment caractérisées".

La victime présumée de l'infraction, la Ville de Paris, ne sera pas représentée, le maire PS Bertrand Delanoë ayant retiré sa constitution de partie civile après le remboursement de 500.000 euros par Jacques Chirac et de 1,7 million par l'UMP.

L'audience de lundi sera aussi occupée par les ultimes demandes d'annulation des poursuites pour prescription et violation du droit à un délai raisonnable, transmises au tribunal vendredi par Me Jean-Yves Leborgne, avocat de Rémy Chardon, ex-directeur de cabinet de Jacques Chirac.

Poursuivi pour "détournement de fonds publics, abus de confiance et prise illégale d'intérêt", Jacques Chirac encourt en théorie jusqu'à dix ans de prison, mais les juges ne prononcent en pratique, dans ces dossiers anciens, que des peines avec sursis, en cas de déclaration de culpabilité.

ANOSOGNOSIE

Qu'est-ce que l'Anasognosie ? L'étymologie provient grec nosos signifiant maladie et gnosis qui porte la signification de connaissance. Le préfixe a- privatif donne à l'ensemble la signification d'absence de conscience de la maladie.

Il s'agit de la méconnaissance par un malade de la maladie dont il est atteint alors que celle-ci apparaît de façon évidente.

Plus précisément ce terme employé en neuropsychologie et en psychiatrie dénote une attitude d'un patient qui ne peut absolument pas reconnaître les troubles dont il est atteint.

Cette pathologie se rencontre essentiellement quand il existe des lésions de l'hémisphère mineurs c'est-à-dire de l'hémisphère droit chez le droitier essentiellement à la suite d'un accident ischémique cérébrale (attaque cérébrale) due à une interruption de l'irrigation sanguine.