La perte du "triple A" comme arme de campagne

Par Jean-Christophe Chanut  |   |  434  mots
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Nicolas Sarkozy s'estime conforté pour prendre des "décisions importantes" alors que, pour François Hollande, c'est "une politique, une stratégie, (...) , un gouvernement, un président" qui ont été dégradés.

« Je parlerai aux Français à la fin du mois, je leur dirai les décisions importantes qu'il faut prendre sans perdre de temps. » Dimanche, à Amboise, sans jamais commenter la perte du triple A, Nicolas Sarkozy a manifestement déjà intégré cet événement dans sa stratégie de campagne. Un sujet qui sera certainement martelé par le chef de l'État, mercredi, lors du sommet social où il recevra organisations patronales et syndicales. Mieux, la dégradation de la note de la France va le conforter dans son positionnement churchillien de celui qui ne peut promettre que du sang et des larmes. Rien de mieux que la décision de S&P pour montrer l'absolue nécessité d'instaurer une TVA sociale et des « accords de compétitivité » dans les entreprises modulant temps de travail et/ou les salaires. Une posture qui le conduira également à retarder à l'ultime moment l'annonce de sa candidature. Parallèlement, l'UMP et le gouvernement - Premier ministre et ministre de l'Économie en tête - ont été mobilisés pour faire passer le message que « c'est davantage l'instabilité et la gouvernance de l'Europe qui ont été sanctionnées que les réformes de structure »... Sauf que l'Allemagne a, elle, été épargnée par S&P.

Les opposants au chef de l'État ont trouvé là matière à réplique. François Hollande a ainsi souligné que « ce n'est pas la France qui a été dégradée, c'est une politique, c'est une stratégie, c'est une équipe, c'est un gouvernement, c'est un président ». Avis partagé sur iTélé par François Chérèque (CFDT) pour qui la loi Travail-emploi-pouvoir d'achat (Tepa) de 2007, en instituant le bouclier fiscal et la défiscalisation des heures supplémentaires, « a largement contribué à accroître la dette française ». Pour autant, l'annonce de S&P ne facilite pas non plus la vie des socialistes et, notamment, de Laurent Fabius, chargé d'élaborer le programme de la première année d'un éventuel gouvernement de gauche qui sera obligé de prendre en compte l'effet de la dégradation sur le renchérissement des emprunts des collectivités locales et de diverses institutions.

Politiquement, les conséquences de la dégradation de la note de la France ne se sont pas fait attendre : selon un sondage LH2 Yahoo, réalisé les 13 et 14 janvier, Nicolas Sarkozy recueillerait 23,5 points au premier tour, en baisse de 2,5 points, et François Hollande 30 % (? 1,5). À l'inverse, Marine Le Pen fait une percée de 3,5 points à 17 % et François Bayrou se hisse à 14 % (+ 1). Rarement, les jeux ont été aussi ouverts.