Le Grenelle de l'environnement au scanner de la Cour des comptes

Par Rémy Janin  |   |  653  mots
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La Cour des comptes juge "contrasté" le bilan du Grenelle de l'environnement.

C'est un sévère réquisitoire de la politique environnementale du gouvernement qu'a rendu public mercredi 18 janvier, la Cour des comptes. Les hauts magistrats, dans leur référé sur l'impact budgétaire et fiscal du Grenelle de l'environnement, constatent d'une part que l'Etat n'a pas engagé les sommes qu'il avait prévu de dépenser dans sa mise en oeuvre et d'autre part, que son volet fiscal a été très négligé.

Sur la période 2009-2011 le budget triennal affecté au Grenelle de l'environnement par le gouvernement était de 4,5 milliards d'euros. "La dépense exécutée ne s'élève finalement qu'à 3,5 milliards", constate la Cour. Soit une baisse des dépenses prévues d'un milliard d'euros. Le gouvernement a su "limiter l?impact (du Grenelle, ndlr) sur le budget de l?Etat en le finançant majoritairement par des redéploiements ou en exploitant les marges de manoeuvre offertes par la mise en oeuvre de la révision générale des politiques publiques en ce qui concerne les créations de postes explique la Cour. D'autres y verront surtout un manque d'ambition du gouvernement en faveur des questions environnementales.

Mais c'est surtout le volet fiscal qui "a été nettement moins maîtrisé". Alors qu'au départ le gouvernement et sa majorité avaient convenu que la fiscalité environnementale serait équilibrée voila qu'en définitive elle a "représenté un coût de 2,5 milliards d'euros", pour la collectivité. Ce constat est le fruit de plusieurs phénomènes que le bonus-malus automobile illustre à lui tout seul : créé pour voir ses dépenses (les bonus versés) être équilibrées par ses recettes (les malus) son déficit atteint in fine, la lourde facture de 1,5 milliard d'euros. Il a toutefois " permis une diminution des émissions moyennes de gaz carbonique des véhicules neufs, mais des études ont montré qu?il aurait entraîné une augmentation des émissions totales de CO2", relativisent les sages de la rue Cambon.

Le déficit fiscal du Grenelle fut par ailleurs, aggravé par les nombreux reports techniques mais aussi politiques, de mesures susceptibles de générer de nouvelles recettes. La taxe carbone fut abandonnée en rase campagne dès mars 2010 alors qu'elle devait apporter environ 2 milliards d'euros dans les caisses de l'Etat. Et ceci alors qu'en septembre 2009, le chef de l'Etat avait expliqué que la création de la taxe carbone était un engagement de sa campagne qu'il entendait respecter. Cet engagement, "je l'ai signé, je le fais, c'est une question d'honnêteté", avait-il déclaré. D'autres recettes ont également manqué comme celles de l'écotaxe poids-lourds estimées à plus d'un milliard, dont la mise en oeuvre à été repoussée de trois ans par rapport à la date prévue initialement.

La Cour explique encore que "dans le domaine des transports ou de l?agriculture, les objectifs fixés par le Grenelle pour 2012 ne pourront être atteints". lle constate en effet que " la part du fret non routier est en constante diminution depuis 2007 et l?objectif de 6% de la surface agricole utile exploitée en agriculture biologique ne sera pas atteint en 2012".

Pour autant la Cour juge que le bilan du Grenelle n'est pas totalement négatif. Elle relève "de bons résultats dans les secteurs du bâtiment, des énergies renouvelables et de la politique de l?eau". Un tiers des bâtiments neufs construits en 2011 respectent les normes "basse consommation" ; les émissions de gaz à effet de serre du secteur résidentiel ont été réduites de 7,5% en deux ans et les stations d?épuration les plus importantes ont été mises aux normes européennes". Enfin, "l?objectif intermédiaire fixé pour 2012 pour la production d?énergie renouvelable", que le Grenelle de l'environnement a établi à 14% d?énergies renouvelables "devrait être atteint sans difficulté". Le bonus-malus automobile a coûté 1,5 milliard d'euros entre 2008 et 2011 et ses résultats sont contrastés.