La bataille des chiffres monopolise le débat sur le chômage

Avec la publication des données sur le chômage en février, en hausse de 0,2%, la guerre des statistiques redouble entre les candidats pour connaître la réalité de l'évolution de la hausse des demandeurs d'emploi sur la durée du quinquennat. Explications.
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"Le chômage, c'est le naufrage du quinquennat de Nicolas Sarkozy", selon Benoît Hamon, porte-parole du PS. Le candidat-président, lui, voit dans les données de février (+ 0,2% sur un mois du nombre des demandeurs d'emploi en France métropolitaine inscrits en catégorie A) "une amélioration, avec une baisse tendancielle de l'augmentation du nombre des chômeurs". Il est exact qu'en janvier, l'augmentation avait atteint 0,5%. Et il était évident que les statistiques du chômage pour février, les dernières avant le premier tour de l'élection présidentielle, allaient être "récupérées" par les candidats qui savent que le chômage est la préoccupation première des  Français. Alors, bien entendu, la bataille des chiffres fait rage, les socialiste accusant Nicolas Sarkozy d'être responsable de un million de chômeurs en plus depuis son arrivée à l'Elysée

La progression du chômage en France moins forte que chez nos partenaires européens

Pour le président sortant, il n 'y a "que" 400.000 chômeurs de plus depuis 2007 et il estime que l'Hexagone a fait mieux sur cette période que les autres grands pays européens ( à l'exception de l'Allemagne), avec une augmentation du nombre des demandeurs d'emploi d'environ 15%, alors qu'elle est de 35% en Italie, 65% au Royaume-Uni et de quasi... 200% en Espagne. La guerre des chiffres aura donc bien lieu ! Un décryptage s'impose.
S'agissant des comparaisons européennes, le candidat président a raison de souligner la moindre progression du nombre des demandeurs d'emploi en France. Il n'empêche, selon les données du BIT à la fin 2011, publiées par Eurostat, le taux de chômage en France (y compris les DOM) atteint 9,8%, contre 5,5% en Allemagne, 8,5% en Italie, 8,3% au Royaume-Uni... Sans parler de l'Autriche avec ses 4,1%.
Concernant, cette fois, la progression du chômage sur la durée du quinquennat. Tout est une question d'indicateurs. Or, il y a deux sources. Il y a d'abord les données mensuelles du nombre des demandeurs d'emploi inscrits à Pôle Emploi, collectées par la direction de la statistique (Dares) du ministère du Travail. Il y a aussi le travail effectué chaque trimestre par l'Insee qui calcule un taux de chômage en mesurant le nombre de chômeurs par rapport au nombre des actifs, sur la bases de la définition établie par le Bureau International du Travail (BIT).


L'évolution du nombre des chômeurs durant le quinquennat varie selon l'indicateur

En février 2012, selon la Dares, il y a avait 4,3 millions de demandeurs d'emplois inscrits en catégorie (A, B et C) dont 2,87 millions dans la seule catégorie A (qui rassemble le demandeurs d'emploi n'ayant eu aucune activité le mois précédent). Au moment de l'élection de Nicolas Sarkozy en mai 2007, la France comptait 3,2 millions de chômeurs inscrit dans les catégories "1 et 6" (avec ou sans activité à temps partiel) dont 2,13 millions pour la seule catégorie "1". En mars 2009, un changement de méthodologie est intervenue (et a introduit les actuelles catégories A, B, C, D, E) qui a quelque peu modifié la façon de "répartir" les chômeurs, ce qui complique un peu plus les comparaisons entre 2007 et 2012. Cet élément mis de côté, en considérant que l'ancienne catégorie "1" correspond grosso modo à l'actuelle catégorie "A", la hausse du nombre des demandeurs d'emploi dans cette catégorie atteint donc 740.000. Elle est d'environ 1,1 million si, cette fois, l'on se concentre sur les demandeurs d'emploi inscrits dans les catégorie "A, B et C" (les anciennes 1 et 6). Pour Eric Heyer, directeur adjoint de l'Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE), cette méthode de calcul, basée sur les variations mensuelles, a ses limites "Il suffit d'avoir très peu travaillé le mois précédent pour passer de la catégorie A à une autre. Mais, in fine, la personne concernée reste toujours au chômage".


L'OFCE estime à 220.000 le nombre de chômeurs potentiels supplémentaires cette année

En revanche, Si l'on compare les données fournies trimestriellement par l'Insee, sur la base de la définition du chômage au sens du BIT, le nombre des demandeurs d'emploi est passé de 2,256 millions à la fin du deuxième trimestre 2007 à 2,678 millions à la fin 2011 (dernières données connues), ce qui donne bien une progression de 422.000 chômeurs, le chiffre régulièrement mis en avant par Nicolas Sarkozy. "Le problème, souligne Eric Heyer, c'est que le nombre des chômeurs va continuer d'augmenter en 2012 et sans doute en 2013 en raison de la faible croissance. A l'OFCE nous avons calculé que 100.000 emplois devraient être supprimés cette année, alors que la population active va continuer de croître d'environ 120.000. Cela représente donc 220.000 nouveaux chômeurs potentiels. Dans ce contexte, le gouvernement a raison de renouer avec le traitement social du chômage, via les emplois aidés pour les jeunes. C'est même pour cette raison que la hausse du chômage a été moins importante en février. Mais ces contrats aidés étant à durée limitée, ça ne fait que retarder le problème".
Bref, il y a l'embarras du choix : on peut considérer que sur cinq ans, le nombre des chômeurs a augmenté de 422.000, de 740.000, voire de 1,1 million. Toutes ces données sont vraies. Il n'en reste pas moins que  de toute façon la tendance est fortement à la hausse. Et si la perspective de l'Insee d'un taux de chômage atteignant 10,1% à la fin du premier semestre se révèle exact, on flirterait là avec le sommet historique de 10,7% du premier semestre 1997...

 

Commentaire 1
à écrit le 02/05/2012 à 16:28
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Merci Mr. Sarkozy, la France n'a pas atteint le niveau de chomage de l'espagne, la Grèce, le Portugal.... et.. n'est pas en récession comme ces pays. Si par malheur Hollande est élu , avec les dépenses annoncées, notre pays battra les records de chom...

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