"Les réseaux sociaux permettent de se désinhiber"

Michael Stora psychologue-psychanalyste réfléchit depuis plusieurs années sur le lien interactif de l'homme à l'ordinateur et de ses conséquences sur les processus mentaux. Il analyse les angoisses soulevées par le "bug" Facebook.
Michael Stora, psychanalyste

"Il y a toujours un moyen de rester caché dans l'espace dit «transparent». Sous couvert de messagerie à la msn on peut continuer à chuchoter dans un cadre collectif. On a évidemment besoin d'avoir des moments privés dans les espaces publics. Les réactions d'anxiété face à ce bug de Facebook prouvent à quel point il est si essentiel aujourd'hui pour les individus de «décharger» leurs pulsions...ce qui est somme toute très humain. Mais comme il est de plus en plus difficile de se montrer au grand jour dans une société finalement moins évoluée qu'il n'y paraît, et qui promeut une certaine forme d'hypocrisie sociale, les réseaux sociaux permettent la désinhibition dans les rapports sociaux. Ils permettent de s'autoriser à être «cet autre». Sur Facebook, les abonnés jouent à «l'Internet réalité» à l'image de la «téléréalité»: ils se dévoilent sous un jour très positif tout en ayant, dans leurs chuchotements, la possibilité d'être totalement incorrects.
Dans la vie réelle on est souvent plus craintif de l'autre, voire méfiant. Sur ce type de réseau le lien se noue beaucoup plus vite. Et une familiarité qui n'aurait jamais été possible dans une interaction réelle se met très vite en place... chacun projetant sur l'autre ses fantasmes. On s'y montre, mais paradoxalement, c'est comme si personne ne regardait.

Là, c'est l'anxiété, la panique tout le monde «voit tout». C'est l'angoisse que ces chuchotements s'entendent à voix haute. Tous les secrets qu'on a dans ces espaces, dit de «transparence» génèrent une foultitude d'angoisses du même ordre que celles de se faire prendre la main dans le sac... Or notre société fonctionne dans l'illusion de vouloir tout dire et tout montrer à la façon des enfants. Une société de l'entière transparence qui s'avère non seulement infantile mais aussi infantilisante. Les espaces privés des réseaux sociaux font alors figure de zones qui permettent d'échapper au regard des parents, réels ou fantasmés. Heureusement qu'ils ont cet espace qui leur ouvre une zone de liberté d'expression. Il est donc normal que ce «bug» déclenche autant d'émotions car il est vécu douloureusement comme une atteinte à la liberté d'expression des internautes. On va enfin prendre conscience que la réalité psychique et virtuelle sont très proches. Là où les choses se compliquent c'est que nous sommes habitués aux dévoilements sur la vie privée des stars ou des hommes politiques. Comme les individus sont en recherche de reconnaissance, à un niveau moindre, ils cherchent aussi sur ces réseaux et au travers des photos publiées à attirer le regard des autres, et se donner l'illusion d'exister tel un personnage public dans le regard de l'autre".

 

 


 

Commentaires 2
à écrit le 26/09/2012 à 15:44
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analyse juste

à écrit le 26/09/2012 à 13:50
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L'abus de connection aux réseaux sociaux peut être dangereux pour votre santé! A consommer avec modération!

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