Le crédit d'impôt compétitivité, une fausse bonne idée ?

Dans une étude publiée par un laboratoire de Science Po (le LIEPP), un économiste estime que le crédit d'impôt compétitivité, mis en place à la suite du rapport Gallois, rate sa cible en ne se concentrant pas uniquement sur les hauts salaires et en étant, au contraire, limité aux salaires n'excédant pas 2,5 Smic. De ce fait, le "coût" des salaires élevés ne diminue pas. Ce qui n'incite pas les entreprises à investir dans une montée en gamme des produits qui aurait pu améliorer la compétitivité du "made in France" sur les marchés internationaux
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Faut-il étendre aux hauts salaires le dispositif d'allègements de cotisations sociales jusqu'ici réservé aux rémunération ne dépassant pas 1,6 Smic ? Le récent rapport Gallois sur la compétitivité préconisait cette solution pour aider l'industrie française à investir dans une montée en gamme afin d'améliorer sa compétitivité sur les marchés internationaux. Dans une note publiée par le Laboratoire interdisciplinaire d'évaluation des politiques publiques (LIEPP) de Sciences Po, Clément Carbonnier, maître de conférence à l'Université de Cergy-Pontoise, dresse les avantages et les inconvénients de cette préconisation et s'interroge sur l'efficacité du ccrédit d'impôt compétitivité et emploi (CICE).
On se rappelle que Louis Gallois, commissaire à l'investissement, dans son rapport remis fin 2012 au gouvernement, préconisait un élargissement des allégements de cotisations sociales jusqu'à 3,6 Smic alors qu'ils décroissent actuellement progressivement entre 1 Smic et 1,6 Smic. Finalement, l'Assemblée nationale à voté un crédit d'impôt (le fameux CICE), applicable en partie dès 2013, tenant compte des rémunérations jusqu'à 2,5 Smic.

Le crédit d'impôt ne permet pas de baisser le coût du travail des hauts salaires

Ce n'est sans doute pas suffisant pour l'auteur de la note car « les allégements de cotisations sur les bas salaires des vingt dernières années [le premier dispositif date de 1993], diminuant le coût du travail à bas salaire et augmentant le coût pour l'employeur d'accorder des salaires plus élevés, auraient incité les entreprises à investir dans les productions de moindre qualité, employant des salariés pour de faibles salaires. Un rééquilibrage des coûts des salaires faibles et élevés par un élargissement des allègements de cotisations aux hauts salaires inciterait symétriquement les entreprises à investir dans des production de meilleure qualité ».
Or, pour Clément Carbonnier, la décision du gouvernement de limiter le crédit d'impôt à la masse salariale inférieure à 2,5 Smic « ne correspond pas à cet objectif. Car si une telle mesure réduit le coût du travail, y compris qualifié, elle ne diminue pas l'écart entre les coûts du travail qualifié et peu qualifié. Elle ne diminue donc pas non plus la tentation de privilégier les investissements dans les productions de moindre qualité ».

Le crédit d'impôt n'incite pas à investir dans des productions de meilleure qualité

De fait, les allégements Fillon de cotisations sociales continuent de ne s'appliquer qu'aux seuls salaires compris entre 1 et 1,6 Smic... en plus du crédit d'impôt. Et pour les salaires supérieurs à 1,6 Smic, il n'y a « que » le crédit d'impôt (jusqu'à 2,5 Smic).  L'auteur insiste donc : « pour inciter à investir dans les productions de meilleure qualité, il conviendrait de diminuer le coût employeur d'une augmentation de salaire net, c'est-à-dire soit de cibler les nouveaux allègements sur les plus hauts salaires uniquement, soit de remonter les coûts des salaires inférieurs ». Mais cette deuxième proposition pose un problème. Car augmenter les coûts salariaux au niveau du Smic pourrait s'avérer pénalisant pour les emplois non qualifiés. Plusieurs études ont en effet montré que les allègements sur les bas salaires ont eu un impact positif pour l'emploi. Symétriquement, un retour sur ces allègements risquerait de détruire des emplois peu qualifiés.

Des alternatives au crédit d'impôt

Aussi, pour sortir de ce dilemme, l'auteur se demande si l'arme du crédit d'impôt est bien la meilleure pour inciter l'industrie française à monter en gamme. Selon lui « offrir un crédit d'impôt sur un marché ne permet pas de contrôler la répartition de ses avantages entre les différents acteurs de ce marché : les sommes bénéficieraient aux salariés en hausses de salaires et aux actionnaires en hausse de dividendes, et donc seulement partiellement à des investissements innovants ».
En conclusion, pour booster l'industrie française, l'auteur recommande d'utiliser « d'autres politiques publiques plus efficaces », dont certaines sont préconisées par le rapport Gallois : faire jouer à l'Etat un rôle plus direct et actif dans l'innovation en créant un Commissariat à la prospective ; renforcer les incitations directes à travers le maintien du crédit d'impôt recherche ; pour pallier les difficultés des entreprises à financer leurs innovations, il serait plus utile de créer un préteur public direct que d'instituer « un crédit d'impôt sur la masse salariale ». C'est en partie l'objectif dévolu à la nouvelle Banque publique d'investissement (BPI).
 

Commentaires 42
à écrit le 29/01/2013 à 20:02
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N'étant pas un économiste , je me bornerai donc tout d'abord à rappeler que le "rapport Gallois "devait être enterré par le nouveau gouvernement au pouvoir , comme d'ailleurs d'autres rapports préconisant à peu près les mêmes mesu...

le 30/01/2013 à 14:44
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hélas, aucun politique ou fonctionnaire n'est payé en fonction des résultats, donc aucune culture pour le moindre changement, la moindre amélioration d'efficacité, donc rien ne change, tant pis pour le privé qui doit travailler encore plus pour les f...

à écrit le 29/01/2013 à 15:32
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La vérité derrière ce crédit d?impôts et le sommet bidonné pour l'emploi est Moscovici, le vice président du cercle de l'industrie. Ce sont tout simplement des tractations en coulisses pour les futurs renvois d?ascenseurs et reconversions sur le dos ...

à écrit le 29/01/2013 à 14:45
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1/ Le niveau scolaire baisse "La Suisse vient de décider que les titulaires du bac L français ne pourront désormais plus s'inscrire dans un établissement universitaire helvète. La baisse du niveau scolaire des Français qui agite notre pays s'est d'or...

à écrit le 29/01/2013 à 11:32
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Ce Monsieur a raison : les sorties de crise des entreprises automobiles des USA sont l'exemple que l'innovation et la recherche sont nécessaires pour sortir des crises et recréer de l'emploi : à partir de là, il serait effectivement plus efficace de ...

à écrit le 29/01/2013 à 10:47
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La question fondamentale est simple: Est-ce que le crédit d'impôt peut rendre les entreprises plus compétitives? Les réponses sont multiples et édifiantes: D'une part, NON, un crédit d'impôt est un crédit d'impôt, il n'a pas d'effet direct sur la co...

à écrit le 29/01/2013 à 9:28
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Pour etre méchant je pourrais dire : "et un rapport de plus" .Sur le fond je pense que ce monsieur se trompe en se focalisant sur le cout du travail .Les freins à notre développement économique sont nombreux et à mes yeux la lourdeur administrative p...

le 29/01/2013 à 10:03
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Vous avez raison, je rajouterai qu'il faudrait aussi supprimer tous ceux qui "pondent" ces genres de propositions dont la philosophie est de pourquoi faire simple quand on peut faire compliquer! Le simple serait d'utiliser la masse salariale de l'ent...

le 29/01/2013 à 11:01
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A PNV Vous êtes encore de ceux qui considèrent les administratifs comme des improductifs ce qui est faux. Le coût des administratifs n'a pas un impact direct sur les coûts directs de production mais sont répartis sur l'ensemble des services de l'entr...

le 29/01/2013 à 11:41
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Vous prenez une entreprise de 20 salariés avec 15 productifs et 5 administratifs si du fait de la simplification administrative vous supprimez un administratif cela diminue d'autant vos charges salariales ( salaire+charges) avec incidence sur les pri...

le 29/01/2013 à 12:32
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@ pnv : L'administration produit également; d'ailleurs les économies des pays les plus riches se sont dotés d'un système normatif et administratif complexe. Le challenge aujourd'hui est d'être en mesure de gérer cette complexité d'une manière de plus...

le 29/01/2013 à 13:55
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Nous sommes donc d'accord quand vous écrivez " parlons de productivité de l'état et de sa compétitivité " c'est ce que j'appelle " les lourdeurs administratives" qui pèsent autant que les charges sociales .

le 29/01/2013 à 14:18
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@ pnv: oui, l'état n'est qu'une société de service : au servive des citoyens et soumis à la même pression que tous acteurs économiques. il doit être productif (efficience administrative), mais avant tout efficace. Dans ces 2 dimensions, il y a du pot...

le 29/01/2013 à 14:22
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Je suis désolé mais une entreprise de 20 personnes n'a pas 5 administratifs mais tout juste deux donc votre raisonnement est utopiste ou alors vous êtes dans une entreprise à fort résultat net et dans ce cas la question de productivité ne se pose pas...

le 29/01/2013 à 15:06
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Prenez le service après vente d'une concession automobile moyenne de marque française ou étrangère qu'importe .Pour 15 productifs mécaniciens,carrossiers,peintres vous avez 4 à 5 improductifs ; le chef d'atelier,une facturière et deux réceptionnaires...

à écrit le 29/01/2013 à 9:02
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C'est normal que le crédit d'impot ne frappe pas les hauts salaires, il y a un surplus de demande de travail qualifié. Il n'y a donc pas besoin de l'augmenter davantage avec un crédit d'impot. Par contre il y a un excès d'offre du travail peu qualifi...

le 29/01/2013 à 9:30
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Le but de ce crédit d'impôt devrait être de favoriser l'innovation pour assurer des emplois à l'avenir. Baisser les charges plus généralement, pour être plus compétitif et assurer des emplois à long terme. Mais à vouloir être juste un dispositif de ...

à écrit le 29/01/2013 à 8:15
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Bien qu'étant de droite, je m'astreins à lire "La Tribune" tous les matins. Je suis étonné par beaucoup de "commentaires" qui transpirent l'envie et la jalousie. Mon voisin gagne de l'argent, ce n'est pas parce que je suis plus bête ou plus fainéant ...

le 29/01/2013 à 15:07
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On ne doit pas lire les mêmes commentaires. Perso, je suis effarée par le prolibéralisme et le chacun pour soi égoïste prôné par la plupart des commentateurs ^^ Vous déplorez que certains estiment que si le voisin gagne plus, c'est un injustice. Moi,...

le 29/01/2013 à 15:35
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"notre école ...ne parvient plus" c'est délibéré notre élite n'a jamais admis la démocratisation de l'enseignement comme cela a existé pendant une courte période qui correspond à peu prét aux 30 glorieuses où un enfant d'ouvrier ou d'agriculteur pouv...

à écrit le 29/01/2013 à 8:13
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Voilà une affaire comique la grande majorité de nos élus passent par cette école ringarde sauf pour garder ses prévilèges. Lorsque l'on fait l' état de l'économie française gérée par les politiques qui nous viennent des deux plaies de notre Pays l'E...

à écrit le 29/01/2013 à 7:51
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Vous pouvez chercher dans toutes les directions,la seule solution,c'est une taxe sur l'énergie pour financer les retraites.Qui est capable de le faire comprendre à nos économistes?

le 29/01/2013 à 9:20
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@Gépé001: +1 ! Une taxe de 1% sur toutes les énergies (électricité, gaz, hydrocarbures) serait indolore pour les Français et permettrait de financer les retraites.

le 29/01/2013 à 9:37
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Une taxe sur l'énergie pour financer les retraites? Vous vous rendez compte de l'énormité de ce que vous dites? Le système de retraites doit muter pour assurer à terme son autofinancement, c'est à force de bricolages comme celui que vous suggerez que...

le 29/01/2013 à 10:55
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On a connu par le passer la vignette auto " pour les vieux ", la TVA à 33% sur les produits de luxe, des solutions il y en a, le financement des retraites actuel ne peut être supporté par les futures générations, il va bien falloir trouver un finance...

le 29/01/2013 à 11:16
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Comment pouvez-vous recommander comme retraité EDF une taxe supplémentaire après celle pour les nouvelles énergies au 1er janvier qui vient de renchérir l'électricité de 2,5% alors que lorqu'il s'est agit de faire passer la contribution des salariés ...

à écrit le 29/01/2013 à 6:06
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Ce n'est pas en compliquant les regles que l'economie Francaise va retrouver la forme!... C'est le coeur de certains Francais (ceux qui ne travaillent pas ou ne travaiellent pas dur) qui est a changer. Il faut pour cela une moralite... qui n'existe p...

à écrit le 29/01/2013 à 6:00
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Les Sciences Po feraient mieux de faire profil bas vu les scandales qui entourent cette vieille et couteuse institution. Quant aux analyses de professeurs simplets qui theorisent a tout va a l'appui de leurs statistiques frelatees...ca vaut pas un bo...

à écrit le 29/01/2013 à 4:49
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ce Liepp a-t-il quelques compétences en lieu et place de théoriser sur la théorie ?? combien est payé Clément Carbonnier pour nous sortir cela ?? combien de temps avez-vous passé dans une usine ?? tout cela n'est pas sérieux !!!!

le 29/01/2013 à 9:24
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Le Salaire minimum d'un maître de conférence à l'Université est 4000e/mois net et 6-7h/jour à l'école. Sérieux et pas sérieux, elle fait son boulot mais elle fait le boulot du gouvern;))

à écrit le 29/01/2013 à 2:45
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Dispositif type usine à gaz qui va surtout profiter aux grandes entreprises. Beaucoup de PME ou TPE n'auront droit qu'à des miettes. Bel effet d'annonce comme toujours (gouvernement de gauche ou droite c'est pareil) mais les conditions pour y avoir ...

à écrit le 29/01/2013 à 2:40
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Curieux cette proposition! Le crédit d'impôts même pour les hauts salaires. Les "enarques" viennent de s'apercevoir qu'ils ne peuvent plus venir "pantoufler" et se "goinfrer" dans le privé avec des très hauts salaires sans être ponctionner fortement....

à écrit le 29/01/2013 à 1:20
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la compétitivité c est rendre un produit plus atttrractif qu' un autre, l' image d' un pays c' est une compétition en été, quel est le rapport; innovation, un sujet à durement reflechir

à écrit le 29/01/2013 à 0:30
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Pourquoi faire simple quand on peut compliquer, c'est décidément, la politique de l'administration et de l'Etat. Pourquoi faire de montage d'impôt recherche, des niches fiscales des subventions par si, des confiscations par la, avec tout le travail e...

à écrit le 28/01/2013 à 21:07
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Comment faire croire que la mauvaise gestion et vision de nos entreprises sont lies au fait que l'etat ne cree pas une nouvelle niche fiscale.Allez a nos portes monnaies,les riches demandent plus d'argent,ils veulent faire main basse sur l'etat provi...

le 29/01/2013 à 4:46
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mauvaise gestion et vision ?? quelles sont vos preconisations monsieur l'industriel ???

à écrit le 28/01/2013 à 19:57
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un "commissariat à la prospective", ou comment permettre aux entreprises qui ne dépendent que des commandes d'états pour faire vivre leurs R&D et ponctionner encore un peu plus d'argent public.

le 28/01/2013 à 21:20
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+1 Je propose également un "centre national d'accompagnement de projet technologique" , un "pôle de conseil public en management et études de marché", un "centre ministériel d'étude de faisabilité technique et industrielle", le tout supervisé par un ...

le 29/01/2013 à 2:46
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Ce laboratoire de Sciences Po est devenu un "think tank" de l'oligarchie énarchique. La preuve il ne préconise que de comités "duschmol" et des machins "théodules qui ont pour seul objet de procurer des fromages juteux aux élites étatiques

à écrit le 28/01/2013 à 19:50
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Je ne vois pas où est le problème. Si il y a un crédit d?impôt même si cela ne s'applique qu'à une tranche de revenu , cela réduit mécaniquement le cout de la masse salariale, ce qui baisse le cout du travail et donc augmente la compétitivité. Si la...

à écrit le 28/01/2013 à 19:49
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L'ancien crédit d'impôts (CIR pour Crédit d'Impôts Recherche) est une aberration. En effet, et pour l'avoir vécu dans 3 entreprises différentes, aucunes de celles-ci ne faisaient de la recherche et de l'innovation ! Qui dit mieux ?

le 29/01/2013 à 12:10
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Le crédit d'impot compétitivité me semble avoir un impact très faible sur le coût du travail : dans ma société (TPE de 3 salariés ingénieur) après simulation, le crédit serait au mieux de 1000 ? par an à comparer avec la masse salariale qui dépasse l...

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