Pourquoi le gouvernement a fait de l’innovation sa priorité

Selon une étude du Trésor, si la compétitivité hors-prix des produits français a résisté au cours de la dernière décennie, la compétitivité-prix a souffert de la montée en puissance des pays émergents. Bien que déclarée cause nationale par l’État, les entreprises rechignent à se lancer dans la course à l’innovation, la seule porte de sortie de l'économie tricolore.
Fabien Piliu
Les entreprises peinent à se lancer sur le chemin de l'innovation
Les entreprises peinent à se lancer sur le chemin de l'innovation (Crédits : Décideurs en région)

Depuis 2002, dernière année où la France pouvait se targuer d'afficher une balance commerciale excédentaire - de 3,5 milliards d'euros -, le solde de la balance commerciale est continuellement dans le rouge. La multiplication des plans gouvernementaux pour stimuler les exportations, tout particulièrement dans les pays émergents en forte croissance, n'auront pas permis de d'inverser la tendance.  

Après le record de 2011 - 74 milliards d'euros -, le déficit s'est élevé à 67,5 milliards en 2012. En 2013, tout laisse à penser qu'il se maintiendra à un niveau élevé, le déficit des douze derniers mois atteignant en octobre 60,6 milliards d'euros.

Pour expliquer cette dégradation de la balance commerciale, une étude du Trésor publiée ce mercredi mesure la contribution des produits à dominance « qualité », « prix » ou « intermédiaire » au solde commercial français. Trois groupes de produits sont définis : le premier regroupe des produits dits « prix » car leurs exportations sont les plus sensibles au prix ; le dernier tiers regroupe des produits dits « qualité », car leurs exportations sont les moins sensibles au prix ; enfin le tiers intermédiaire est dit « médian ».

Trois groupes de produits

Selon le Trésor, la France a vu les composantes « médian » et « prix » de son solde commercial se dégrader au cours des années 2000. " Son déficit « prix » se détériore continûment sur cette période pour atteindre 1,5 point de PIB en moyenne sur la période 2007-2011. Ce déficit s'explique notamment par un fort déficit français en textile, principalement en vêtements pour femmes, et en appareils électriques et électroniques. Un déficit apparaît également en fin de période sur les produits médians, porté par un solde négatif en voitures de tourisme. L'excédent « qualité » permettait à la France de dégager un solde global positif en début de période, mais il ne suffit plus à compenser la dégradation des autres composantes en fin de période, même s'il a doublé pour atteindre 1,2 point de PIB ", expliquent Romain Sautard, Amine Tazi et Camille Thubin, les auteurs de cette étude qui reprennent en partie les conclusions du rapport Gallois.

" L'industrie française n'a pas une spécialisation internationale sectorielle très différente de celle de l'Allemagne. Mais hormis certaines niches, elle est plutôt positionnée, à la différence de son concurrent d'Outre-Rhin, sur le milieu de gamme en matière de qualité et d'innovation. Elle a peu de facteurs différenciants et elle est de ce fait très exposée à la concurrence par les prix, alors même que ses coûts sont relativement élevés - à l'exception du coût de l'énergie - par rapport aux autres pays européens. Pour la même raison, elle a été particulièrement sensible à la hausse de l'euro tout au long de la décennie écoulée ", expliquait le rapport Gallois 

L'innovation, la solution

Le soutien à l'innovation est vite apparu comme l'une des solutions à mettre en place en priorité pour favoriser la montée en gamme des exportations tricolores. En 2004, le statut de jeune entreprise innovante (JEI) a été créé. Un an plus tard, les pôles de compétitivité ont été lancés. En 2007, le crédit impôt recherche (CIR) a été simplifié et doublé. En 2010, c'est le Programme des investissements d'avenir (PIA) qui a été proposé aux entreprises et aux chercheurs dans le cadre du Grand emprunt. En 2012, le crédit d'impôt innovation a vu le jour.

En 2013, l'État a ouvert 14 milliards d'euros de crédits budgétaires au titre du financement de la recherche civile, auxquels s'ajoutent dans le cadre des investissements d'avenir du PIA, des financements d'environ 1 milliard par an entre 2012 et 2020. En octobre, le gouvernement de Jean-Marc Ayrault a lancé un plan Innovation dans lequel figure pas moins de quarante mesures. Etc, etc.

Pour quels résultats ? Malheureusement, ils tardent assez logiquement à venir, l'innovation, que la recherche & développement (R&D) sous-tend bien souvent, n'étant pas une science exacte. Toutes les prises de risque intégrées dans des démarches innovantes ne se soldent pas de succès. Par ailleurs, longs sont les délais entre le lancement d'un projet innovant et le lancement d'un produit sur le marché dont le succès est par définition aléatoire. Créatrice du cœur artificiel, Carmat n'a-t-il pas été créé en 2008, quinze ans après le premier dépôt de brevet de son invention ?

De piètres résultats

Ce ne sont pas les seules explications. Malgré les incitations mises en place par le gouvernement et les collectivités territoriales, les entreprises peinent à se lancer sur le chemin de l'innovation. Sur les 3,6 millions d'entreprises recensées en France par l'Insee en 2011, dont 198.905 PME, seules 14.882 entreprises ont bénéficié du CIR.

" En dépit de financements publics croissants, la France n'a pas progressé par rapport à l'objectif de consacrer 3 % du PIB à la R&D. La dépense intérieure de R&D publique et privée s'est maintenue depuis dix ans à 2,2 % du PIB, pendant que, de 2000 à 2012, ce ratio passait en Allemagne de 2,47 % à 2,84 %. Ce résultat tient principalement à la faiblesse de la R&D des entreprises, qui stagne à 1,43 % du PIB, contre 1,58 % pour la moyenne des pays de l'OCDE ", constatait la Cour des comptes dans son rapport sur le financement public de la recherche publié en juin. 

Une bouffée d'air pour l'emploi

En ne parvenant pas à stimuler l'export via le soutien à l'innovation, le gouvernement rate également l'occasion de faire une pierre deux coups. En effet, quatre millions d'emplois, sur les 28 que compte la population active, seraient liés à l'activité exportatrice selon une étude du Sénat... 

Fabien Piliu
Commentaires 4
à écrit le 09/01/2014 à 13:51
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Les logorrhées inutiles parce que sans suite réelle sur l'innovation ne sot pas nouvelles ; bref des échecs assurés. - de Chirac à Sarkozy et de Raffarin à Fillon ... - puis maintenant Hollande Ayrault tous sont d'une totale ignorance de ce...

à écrit le 09/01/2014 à 10:53
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innover ,alors que les pays asiatique nous procurent tout ce dont ont a besoin, dans peut de temps les programmes spatiaux ce seront eux qui prendront le relais , il vous lancerons un satellite pour deux franc six sous

le 09/01/2014 à 12:10
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Vous comprenez ce que vous écrivez ? Si vous ne produisez et ne vendez rien, vous pensez acheter avec quoi, aux pays asiatiques ?

à écrit le 09/01/2014 à 9:38
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Innover pour délocaliser ne semble pas raisonnable!

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