Mesure de la croissance : Nicolas Sarkozy veut changer la donne

Par latribune.fr  |   |  530  mots
Le prix Nobel d'économie Joseph Stiglitz (photo) a remis ce lundi matin à Nicolas Sarkozy un rapport portant sur la rénovation des instruments actuels de mesure de la croissance et notamment du PIB (produit intérieur brut). La France "se battra" sur la scène internationale pour imposer les recommandations de la commission Stiglitz, a affirmé le président français.

Le prix Nobel d'économie Joseph Stiglitz a été reçu ce lundi à l'Elysée pour remettre son rapport sur "la mesure de la performance économique et du progrès social". Constituée en février 2008 à l'initiative de Nicolas Sarkozy et composée de vingt-deux experts, la commission Stiglitz avait pour objectif de mettre fin à la domination du PIB (produit intérieur brut) comme principale mesure de la richesse créée par les Etats.

Dans la matinée, après la remise officielle du rapport, le président français s'est ainsi exprimé à la tribune du grand amphithéâtre de la Sorbonne lors d'une conférence internationale. Il  a déclaré que "la France se [battrait] pour que toutes les organisations internationales modifient leur système statistique en suivant les recommandations" de la commission.

Ces recommandations sont en tout au nombre de douze. Elles proposent, non de supprimer le PIB, mais de l'enrichir, notamment en regardant "le revenu et la consommation plutôt que la production" et en se plaçant du point de vue des ménages.

Le rapport propose également de créer de nouveaux indicateurs qui tiennent compte du bien-être des individus. Ces indicateurs inclueraient ainsi les activités non-marchandes (travaux domestiques, bénévolat), les conditions de vie matérielles (revenu par catégorie sociale), la santé ou l'insécurité, tout en reflétant davantage les inégalités sociales, générationnelles, sexuelles et celles tenant à l'origine culturelle. La Commission plaide également pour des indicateurs prenant en compte l'environnement et le développement durable.

Des chiffres qui ont mauvaise presse

"Une réflexion collective est désormais engagée, elle ne s'arrêtera pas", il "y aura un avant et un après cette commission", a assuré le chef de l'Etat.  Appelant à "un autre avenir, un autre modèle, un autre monde", Nicolas Sarkozy a souligné que "la crise nous y obligeait". "Dans le monde entier, les citoyens pensent qu'on leur ment, que les chiffres sont faux et pire, que [les chiffres] sont manipulés", a-t-il enchaîné.

Toute la question est désormais de savoir comment les gouvernements et les instituts de statistique, par exemple l'Insee en France et Eurostat pour l'Union européenne, mettront en oeuvre les recommandations du rapport. En fin de journée ce lundi, l'Insee a déclaré par la voix de son directeur général Jean-Philippe Cotis que le rapport Stiglitz serait une "référence" pour les statistiques françaises, qui "influencera le cours de ses activités". Il a fait valoir que l'institut français publiait déjà des données sur le revenu et la consommation par catégories de ménages, et a promis de créer un "tableau de bord d'indicateurs" permettant de suivre "l'évolution du patrimoine collectif sous toutes ses formes: capital physique, humain, social ou environnemental".

De son côté, l'OCDE doit présenter en octobre prochain les premiers résultats de son projet "Comment mesurer le progrès des sociétés" lancé en 2007. Et la Commission européenne a annoncé la semaine dernière son intention de publier dès l'an prochain "un indice de pression environnementale".