Forte déception après le choix des nouvelles têtes de l'Europe

"Falot", "sans éclat et sans vision", "sans expérience", "deux inconnus", "figures ternes et de bas profil"... La presse européenne et plusieurs responsables politiques ont exprimé ce vendredi des jugements pour le moins explicites sur les nominations des deux nouvelles personnalités fortes de l'Union, Herman Van Rompuy à la présidence et Catherine Ashton au poste de Haut représentant de l'UE aux affaires étrangères.
Herman Van Rompuy, nouveau président de l'UE

La presse européenne n'était pas tendre ce vendredi matin vis-à-vis des nominations du belge Herman Van Rompuy comme président de l'Union européenne et de la britannique Catherine Ashton au poste de Haut représentant de l'UE aux affaires étrangères.

Pour le Parisien/Aujourd'hui en France, c'est un "un homme discret" qui prend la tête de l'Europe ; "Un président pour la déco", titre Libération, qui ajoute : "les Vingt-Sept ont au moins réussi à désigner une femme, mais pas la plus brillante".

Dans un commentaire en ligne, le journal espagnol El Mundo (centre-droit) s'est également montré dubitatif à propos de "ces deux inconnus". Et pour El Pais, "la nouvelle Europe concrétisée par le Traité de Lisbonne sera commandée par deux figures ternes et de bas profil".

Même son de cloche en Allemagne où la Frankfurter Allgemeine Zeitung (FAZ, conservateur) s'interroge : "ces deux personnalités (...) peuvent-elles incarner cet élan promis par ceux qui nous gouvernent ?" Pour la Frankfurter Rundschau, "l'Union européenne s'est trouvé des dirigeants sans éclat, sans vision voire en partie sans expérience dans le domaine requis".

Le Financial Times s"est montré tout aussi dur, affirmant que "ces nominations jettent un doute sur leur capacité [des intéressés] à rivaliser avec Washington et Paris". Pour le Guardian, ce choix a réduit à néant "tous les espoirs de l'Europe de forcer le monde à lui prêter une attention nouvelle". "Le continent, la nuit dernière, s'est éloigné de la table des grands, manquant une chance réelle de se maintenir au niveau du monde du G2 dominé par les pôles jumeaux Washington et Pékin", conclut le quotidien.

Le président français Nicolas Sarkozy s'est ainsi employé jeudi à assurer aux journalistes que le nouveau président n'était "pas un choix par défaut", mais au contraire un "président fort".

Herman Van Rompuy est "profondément européen", c'est "un homme extrêmement décidé qui sait où il va, un parfait connaisseur de la politique européenne", et "un homme de très grande qualité dont j'ai toujours apprécié les prises de position volontaristes à la table du Conseil", a-t-il dit. C'est un "habitué au compromis, au bon sens du terme, qui est la base du fonctionnement des institutions européennes. Je suis persuadé qu'[il] portera fièrement le drapeau européen", a-t-il soutenu.

Une "mauvaise décision", l'Europe "a touché le fond"

Mais les déçus étaient également nombreux au sein de la classe politique ce vendredi. "Qui va se reconnaître, en France et en Europe, en M. Herman Van Rompuy, connu seulement en Belgique comme pourfendeur acharné des facilités linguistiques accordées aux francophones dans les communes de la banlieue bruxelloise?", a déclaré pour sa part Jean-Pierre Chevènement, président du Mouvement républicain et citoyen (MRC) et fervent opposant au Traité de Lisbonne.

Le Premier ministre belge "a été choisi pour ne faire d'ombre à personne" et parce qu'on voudrait qu'il soit un "exécutant effacé", a critiqué vendredi le leader centriste français François Bayrou.

"Je pense que c'est une mauvaise décision, je la regrette profondément", a déclaré Michel Rocard, ancien Premier ministre socialiste, sur France Inter. "Le président de l'Europe doit être quelqu'un qu'on a vu au travail depuis quinze ou vingt ans avant et qu'on connaît. Un petit nouveau, même s'il est bien, il va lui manquer ce ressort", a-t-il dit. "Quant à l'idée de confier la diplomatie de l'Europe à l'Angleterre, c'est-à-dire à un pays qui ne veut de diplomatie européenne en aucun cas, là on est dans la caricature", a-t-il jugé.

"Les Britanniques voulaient tuer le poste (de Haut représentant), ils ont réussi", a également critiqué une source diplomatique italienne.

Avec un président "falot" et une chef de la diplomatie "insignifiante", "l'Europe a atteint le fond", a dénoncé jeudi le chef de file des Verts au parlement européen, Daniel Cohn-Bendit. En somme, "les chefs d'Etat et de gouvernement ont poursuivi leur politique d'affaiblissement des institutions européennes".  Pour la co-présidente des Verts Rebecca Harms, la nomination de Catherine Ashton est néanmoins "un succès" dont peuvent se targuer "les femmes au parlement européen".

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