La Hongrie possède des marges de manoeuvre rassurantes

Dotée de réserves de change importantes et bénéficiant d'une marge de manœuvre monétaire en tant que non membre de la zone euro, la Hongrie apparaît moins vulnérable que la Grèce, d'après les observateurs.

"Il est absolument évident que la Hongrie n'est pas la Grèce". Le ministre hongrois de l'Economie, Gyorgy Matolcsy, a "ramé" ce lundi matin pour essayer d'effacer l'effet désastreux produits la semaine dernière par des propos de responsables du Fidesz, parti du Premier ministre Viktor Orban (photo), vainqueur des dernières élections d'avril, propos qui comparaient la situation hongroise à celle de la Grèce.

Le ministre n'a pas convaincu dans un premier temps puisque, dès les premiers échanges, ce lundi, la Bourse de Budapest perdait plus de 5%, tandis que le forint reculait vis-à-vis de l'euro, lui-même en baisse par rapport au dollar depuis plusieurs semaines. 

Au-delà du cafouillage gouvernemental total de ces derniers jours, en termes de communication, l'inquiétude principale porte sur le parallélisme avec la Grèce. "Ce n'est pas le cas", affirme Juan-Carlos Rodado, économiste chez Natixis, "les craintes sur la soutenabilité de la dette hongroise sont disproportionnées". Il rappelle que la situation hongroise était dégradée avant la crise de 2008-2009, avec une faible croissance (3% de rythme annuel contre 5,3% pour les autres pays d'Europe centrale entre 2003 et 2008), des déficits jumeaux (budgétaire et courant) à répétition, un endettement massif en devises des secteurs privé et public et un niveau de dette publique élevé (80% du PIB). 

Mais après avoir sollicité le Fonds monétaire international (FMI) et l'Union européenne à l'automne 2008, le pays a vu son déficit courant se résorber tandis que la banque centrale réussissait à assouplir sa politique monétaire, de sorte que, depuis début 2010, les taux d'intérêt réels étaient négatifs, ce qui a relancé l'économie. Parallèlement, le déficit (au sens de Maastricht) est retombé à 3,9% du PIB en 2009, ce qui constituait plutôt une performance par rapport aux déficits nettement plus élevés des autres pays d'Europe centrale. 

"Les déclarations de la semaine dernière ont tout effacé", souligne Juan-Carlos Rodado, qui craint "une forte volatilité à court terme". Mais, pour autant, l'économiste voit pour la Hongrie des atouts spécifiques : à 80% du PIB, sa dette publique est nettement inférieure à celle de la Grèce (124% attendu cette année) ; avec un cycle industriel proche de celui de l'Allemagne, la Hongrie possède une spécialité productive qui devrait profiter de la croissance européenne dopée par un euro plus faible ; en tant que non membre de la zone euro, sa politique monétaire peut dynamiser la croissance en cas de besoin ; son risque de change existe mais ses réserves de change, de l'ordre de 44 milliards de dollars, soit environ la moitié de la dette publique, couvrent la totalité de sa dette à court terme ; enfin, "l'intervention du FMI, qui surveille régulièrement les progrès accomplis par Budapest, est un important facteur de confiance", souligne l'économiste de Natixis.

En revanche, la fondation Robert Schuman, dans une récente étude, rappelle une vulnérabilité de l'économie hongroise, le poids très important de son secteur public. Pour 10 millions d'habitants, quelque 740.000 personnes sont employées par l'Etat. Au surplus, le pays vieillit et compte 3 millions de retraités, "une situation intenable à moyen terme, soit au-delà de trente ans", insiste la fondation Schuman.

Pour contribuer à assainir la situation financière du pays, le gouvernement a entamé ce samedi une réunion de trois jours et l'annonce d'un programme de mesures est attendue d'ici ce lundi soir. Le ministre Gyorgy Matolcsy a notamment fait état d'une proposition prévoyant la suppression de 20% des 58 différentes catégories de taxes. Il a dit espérer qu'un programme radical de réduction des impôts de trois ans pourrait être lancé dès cette année.

"Nous nous en tiendrons à 3,8% de déficit budgétaire cette année; cela a été convenu avec le FMI et l'Union européenne et accepté par le gouvernement et il n'y aucun doute à ce sujet; nous nous en tiendrons à ce chiffre", a encore déclaré le ministre. "D'une part, il évident qu'un plan d'austérité ne s'impose pas. D'autre part, aucun plan de relance par le budget n'est envisagé. Nous réduirons les dépenses budgétaires et nous augmenterons les recettes; c'est le plan d'action du nouveau gouvernement".

Autre personnalité à s'exprimer sur le cas hongrois, le commissaire européen aux Affaires économiques et monétaires, Olli Rehn, a rejeté ce lundi toute comparaison avec la situation budgétaire catastrophique de la Grèce. Enfin, Dominique Strauss-Kahn, directeur général du FMI, a indiqué n'avoir "aucun élément particulier d'inquiétude" concernant la Hongrie.

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