Bruxelles salue un accord ambitieux

Pour le commissaire européen au commerce, Karel de Gucht, c'est l'accord le plus ambitieux jamais conclu" avec l'UE.
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Alors que la "démondialisation" fait parler d'elle en France, Bruxelles croit plus que jamais aux vertus du commerce international pour porter la croissance. En témoigne l'accord de libre échange entre l'Europe et la Corée du Sud qui entre en vigueur ce vendredi. "C'est l'accord le plus ambitieux que nous ayons jamais conclu", déclarait récemment le commissaire au commerce Karel de Gucht. Bruxelles prévoit de faire économiser d'emblée à ses exportateurs 850 millions d'euros de droits de douane dès 2011, le double annuellement à partir de 2012. Elle anticipe un doublement sur 20 ans d'échanges commerciaux qui atteignent déjà 66 milliards d'euros par an.

Jusqu'à présent, l'Europe négociait plutôt ces accords bilatéraux avec des pays au niveau de développement plus faible qu'elle. "Avec la Corée du Sud, dixième économie mondiale, on change vraiment de perspective et de contenu", explique Alexis Massot, avocat chez Gide Loyrette Nouel à Bruxelles. L'accord "va très au-delà de ce que s'est fait jusqu'à présent en matière d'accès au marché", y compris pour l'investissement et les marchés publics, dit-il. L'accord abolit totalement ou quasi-totalement les droits de douane dans une vingtaine de secteurs, donc l'agroc-alimentaire ou encore les services qui devraient sortir gagnants de cette ouverture.

Au plan diplomatique, cette nouvelle approche fait des émules. Le dernier sommet UE-Japon a béni des travaux exploratoires en vue de lancer la négociation d'un accord comparable en 2012. La Commission est également dans la "dernière phase" de négociation de son accord avec l'Inde. Il pourrait être "conclu dès cette année", d'après Karel de Gucht. Des discussions sont en cours avec Singapour et la Malaisie.

Mais cet engouement pour les accords de libre échange suscite aussi des craintes. L'industrie automobile coréenne est soupçonnée d'être le cheval de Troie des équipements chinois. Les constructeurs européens ont ainsi négocié une "clause de sauvegarde" qui permet d'ériger des protections si la part de la valeur ajoutée non coréenne dans les produits envoyés en Europe dépasse 45%. Les experts de la Commission étaient encore ce mois ci à Séoul pour mettre au point les outils de surveillance adéquats. "Les Coréens indiquent que les produits chinois ne représentent pas plus de 10% de la valeur des véhicules, nous croyons que c'est le double", explique Eric Bergelin. Cet expert de l'Association des constructeurs européens d'automobiles se dit également "très inquiet" des négociations avec l'Inde.

La Commission de Bruxelles aurait-elle perdu la foi dans les négociations multilatérales à l'OMC qui patinent depuis plusieurs années ? Les accords bilatéraux sont "clairement un plan B", estime Alexis Massot, avocat chez Gide Loyrette Nouel. Mais ils ne sont pas forcément en contradiction avec l'ambition ou les méthodes de l'OMC. Une grande part de l'accord sud-coréen est un "copier-coller" des règles de l'OMC, explique Olivier Prost, associé dans le même cabinet. "L'OMC s'oriente vers la définition de règles générales, mais avec 153 personnes autour de la table, elle a de plus en plus de mal à définir des droits de douane ou des conditions d'accès au marché" précises. D'où sa complémentarité avec les accords bilatéraux. "Nous n'avons pas affaire à deux ordres juridiques contradictoires", insiste l'avocat.

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