Le Parti communiste chinois célèbre cette semaine ses 90 ans en col Mao

Alors qu'une nouvelle génération de dirigeants va s'installer au pouvoir, une évolution du rôle dirigeant du PCC sur la deuxième économie mondiale n'est pas à l'ordre du jour.
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"L'avenir est radieux, mais la route est sinueuse." L'adage du président Mao Zedong est plus que jamais d'actualité pour le Parti communiste chinois (PCC), qui souffle en ce 1er juillet ses 90 bougies. A cette occasion, il est d'ailleurs difficile d'échapper au renouveau de la culture maoïste. Des chants révolutionnaires, qui résonnent ces jours-ci dans les parcs et tournent en boucle sur les écrans de télévision, aux opéras "rouges" et danses "rouges", en passant par le nouveau "blockbuster" chinois simplement intitulé "la Fondation d'un parti", le Parti communiste a placé les festivités sous le signe du "grand timonier" et des valeurs nationalistes et révolutionnaires. L'ex-empire du Milieu, devenu en 2010 la deuxième puissance économique mondiale, devrait détrôner les Etats-Unis dès 2025 selon certains spécialistes. En trente ans, le pays s'est complètement métamorphosé, en abandonnant les principes du marxisme-léninisme revus à la lumière du maoïsme, pour embrasser le pragmatisme sous la férule d'un des compagnons de Mao, Deng Xiao Ping. La Chine a également connu une autre révolution, celle de l'urbanisme et de l'industrie.

Nombreux défis à relever

Grâce à des taux de croissance annuels moyens de l'ordre de 10% durant cette période, des millions d'individus ont été arrachés à la pauvreté par une dynamique inédite dans l'histoire. En 2010, le revenu moyen annuel par habitant s'élevait à 4.400 dollars. Si cette transformation doit beaucoup à la libéralisation de l'économie, en revanche, elle reste orchestrée par le "despote éclairé" qu'est le Parti communiste.

En 2012, la cinquième génération de dirigeants accédera au pouvoir. Elle s'y est préparée en apprenant ces dernières années à se mouvoir dans les arcanes d'une organisation où la figure tutélaire de Mao lui permet de faire la synthèse des anciens et des modernes. Le parti reste en effet divisé entre ceux qui soutiennent qu'une ouverture du système politique est indispensable, et ceux qui prônent une mainmise sur l'économie et la société. Pour le moment, ces derniers ont le dessus.

Les deux camps vont toutefois devoir relever de nombreux défis économiques et sociaux pour une population de plus de 1,34 milliard de personnes, qui a sociologiquement changé et compte bien s'exprimer, comme le montre aujourd'hui la multiplication des conflits. Et l'autoritarisme même pragmatique du Parti pourrait ne plus suffire.

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"Le parti agit comme un Rotary Club et les chefs d'entreprises du secteur privé y adhèrent"

Dans la Chine ouverte et capitaliste d'aujourd'hui, le Parti communiste chinois (PCC) est-il encore le centre du pouvoir ?

Il n'existe pas d'institution équivalente à l'intérieur de l'Etat chinois aussi importante, capable de revendiquer 80 millions de membres. Le PCC reste très puissant car non seulement il tient mais il construit l'Etat, et il peut aussi s'adosser à une myriade de structures à vocation sociale, qui forment la culture populaire. Il s'agit d'associations, d'amicales ou de réseaux, liés au Parti communiste chinois, lequel agit comme un Rotary Club et sert d'ascenseur social. Tous les patrons des grandes entreprises publiques sont évidemment membres du Parti communiste. Mais les chefs d'entreprises du secteur privé y adhèrent aussi, et appartiennent au même club ! Il est tout à fait possible de faire carrière et développer sa fortune à l'extérieur du parti, mais très rapidement celui-ci vous propose de devenir membre. Le Parti règne sur la politique économique, sociale ou culturelle du pays.

De l'extérieur, il est souvent perçu comme une structure archaïque...

Depuis 1989 et la répression de la place Tiananmen, le PCC a essayé de se réformer, par exemple en intégrant un très grand nombre d'entrepreneurs privés. Contrairement à un cliché, le Parti, dans sa composition sociale, est tout sauf archaïque : il est au contraire moderne, composé d'une élite urbaine, jeune et diplômée. On y trouve aussi bien une aile réformatrice, favorable à la réforme politique, que des conservateurs nostalgiques de l'époque maoïste. En réalité, la priorité du PCC, c'est sa survie tant il est vrai que l'idée domine toujours que la construction du Parti et la formation d'un État-nation chinois moderne sont liées. Beaucoup de ses membres estiment ainsi que si ce dernier disparaissait, c'est la Chine qui imploserait.

Mais que lui reste-t-il de communiste ?

Le PCC fonctionne toujours selon le principe léniniste du centralisme démocratique et le lien entre l'Etat et le Parti demeure toujours aussi fort. C'est surtout à l'approche des transitions de pouvoir que l'on voit apparaître des courants ou des groupes de pensée différents, comme c'est le cas en ce moment. En 2012 aura lieu la prochaine transition et on voit plusieurs tendances s'affronter : d'un côté, les intellectuels éclairés, cosmopolites, certes prudents mais qui mesurent les avantages de la mondialisation. De l'autre, les nostalgiques de l'époque maoïste (ou ceux qui feignent de l'être) et cependant fervents supporters d'un nationalisme chinois éventuellement revanchard, qui restent animés par une fibre populiste. Un dernier courant est représenté par les nostalgiques du confucianisme, favorables au retour a une "pure tradition" chinoise.

Le parti est donc immortel ?

C'est toute la question. En même temps, la fin du communisme en Chine n'a pas signifié la fin du Parti. Soit, à l'avenir, le Parti trouvera une issue idéologique de secours : une forme de constitutionnalisme aux caractéristiques chinoises par exemple, issue d'une tradition républicaine modernisée nous fêtons cette année non seulement les 90 ans du PCC mais aussi les 100 ans de la fin du système impérial) ; soit le Parti continuera à durcir sa ligne, en particulier sur le plan politique et social. La forme désormais collégiale des processus de décision rend certes impossible le culte du chef suprême, comme du temps de Mao, mais elle empêche aussi l'émergence de réformes institutionnelles ambitieuses, dont la Chine a précisément besoin.

Propos recueillis par Eric Chol

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La nouvelle génération des "princes rouges"

La nouvelle gauche menée par Bo Xilai prône un retour à certaines valeurs révolutionnaires et communistes, avec succès.
 

La Chine n'a pas attendu les célébrations du 1er juillet pour se teinter de rouge. Le mouvement a en fait commencé il y a près de trois ans à Chongqing. C'est dans cette mégalopole que le très médiatique et populiste secrétaire du Parti Bo Xilai, lui-même fils d'un imminent révolutionnaire, a éradiqué avec succès une ville gangrenée par la corruption. Le mouvement a séduit une génération nostalgique de certaines valeurs et quelque peu bousculée par des décennies à 10 % de croissance annuelle.

"Après trente ans de réformes, quelque chose manque à la Chine", explique Zhang Xusen, qui a fondé il y a plus d'un an l'association de la chorale chinoise à Chongqing. Grand amateur de chants populaires et révolutionnaires, il archive et recherche tout ce que la Chine a produit en ce domaine dans le but "de remettre la jeunesse sur le droit chemin".

"Le modèle de Chongqing"

"Il y a trop de culture qui vient de l'extérieur. Nous devons nous recentrer sur ce qu'ont vécu les générations précédentes et retrouver l'esprit révolutionnaire", affirme ce quinquagénaire, qui a connu la Révolution culturelle. La campagne rouge de Bo Xilai qui a réussi à y englober le concept de "PIB rouge" - logements sociaux, lutte anti-corruption - a pris du temps pour remonter à Pékin. Pendant longtemps, il a été snobé par le pouvoir central qui avait un moment remis à l'ordre du jour les valeurs de Confucius. Mais progressivement, même les discours du président Hu Jintao se sont imprégnés d'un renouveau de culture maoïste.

Et une visite inattendue à Chongqing en décembre dernier du futur président Xi Jinping, lui-même un prince rouge qui doit prendre ses fonctions en 2012, a couronné le succès de ce qui est devenu "le modèle de Chongqing". Depuis, les hommes politiques s'y succèdent dont Li Yuanchao, proche de Hu Jintao et de la ligue de la jeunesse communiste, dont l'adhésion n'était pas jusqu'alors acquise.

"C'est ce que voulait Bo Xilai dont le but était clairement de se positionner politiquement pour avoir une place au "politburo" en 2012", explique Jean-Pierre Cabestan, professeur de sciences politiques à l'université Baptiste de Hong Kong. Selon certaines rumeurs, Bo Xilai viserait soit le poste du ministère de la Propagande soit celui de la Sécurité, les deux permettent d'avoir une vue précise du fonctionnement du Parti communiste.

Commentaires 7
à écrit le 16/05/2013 à 12:40
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votre article est éclairant sur certains point et la chute de certains cadres qui en avaient trop fait pour leur individualisme , mais en chine monte actuellement une bulle immobilière , un nationalisme dangereux , des produits alimentaires douteux ,...

à écrit le 03/07/2011 à 9:17
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je ne suis pas sûr que la situation en chine tiendra éternellement, entre les luttes internes et les courants divergents, la sphère politique qui vit sur un nuage et avec une grande partie de la population dans les campagnes qui n'ont pas bénéficié d...

à écrit le 02/07/2011 à 11:27
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Une criminalité étrangement acceptée.... on se posera indéfininiment la question de la relation du marxisme au service de l'hyper capitalisme. Ce sont les deux mondes banalisés comme on ne les aime pas.

à écrit le 02/07/2011 à 6:36
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Les états capitalistes et ultra libéraux (nous) vont se prendre une bonne claque en se rappelant que la Chine est communiste et qu'elle va limiter au maximum les importations de nos produits. Les naïfs occidentaux y voient un marché juteux bourré de ...

à écrit le 02/07/2011 à 6:18
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Ils ont le droit de rouler en FERRARIE les communistes?je pensais que les communistes ils n'avaient pas d'argent!

à écrit le 02/07/2011 à 6:17
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@Mais ils roulent en FERRARIE les communiste,ha? ils ont le droit!

à écrit le 02/07/2011 à 1:47
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@communiste la Chine à bon!!!

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