L'incroyable rebond du Japon

Plus de quatre mois après le tsunami et l'accident de Fukushima, et malgré une classe politique aux abonnés absents, les entreprises ont relancé leurs activités, les Japonais recommencent à consommer, les investisseurs ont repris confiance.
La Tribune Infographie / SSAULNIER

«Le Japon, c'est comme une pieuvre : la tête est vide, le cerveau est dans les bras », observe un homme d'affaires familier de l'archipel. Quatre mois après la triple catastrophe du séisme, du tsunami et de l'accident nucléaire, le 11 mars, le processus politique est au point mort, paralysé par la Chambre haute et la Chambre basse qui, aux mains de deux formations politiques distinctes, se regardent en chiens de faïence. Le Premier ministre Naoto Kan, discrédité, reste au plus bas dans les sondages et est sommé de démissionner jusque par ses plus proches collaborateurs. Mais la zizanie qui règne dans la classe censément « dirigeante » du pays n'a d'égale que la vitesse de reconstruction du tissu économique du pays « sur le terrain ». Le rebond avait en réalité commencé alors que la terre continuait de trembler. « Si nous étions en retard à l'usine, on nous imposait une retenue sur notre salaire », se rappelle un cadre français détaché chez un équipementier automobile japonais. L'industrie manufacturière nippone, durement frappée par le séisme puis le tsunami qui a ravagé la côte nord-est du pays, n'a eu de cesse de se relever.

Appétit de vivre

Mi-juin, le ministère de l'Industrie, le METI, assurait que la production industrielle serait revenue à des niveaux normaux dès la fin juillet. « Le choc du 11 mars sera bien moindre que celui du séisme de Kobe en 1995, et que celui de la faillite Lehman », prédisait un rapport du METI paru à cette époque. Un sondage du Nikkei paru mi-juillet révèle que 60 % des grandes entreprises manufacturières s'attendent à une amélioration d'ici à septembre. « Hallucinant », commente un analyste de la filière industrielle. La région autour du tsunami, pendant ce temps, compte toujours environ 100.000 sans-abri. La reconstruction n'en est qu'à ses balbutiements. Elle n'aura peut-être jamais lieu pour ces villages côtiers proches de la centrale, qui se dépeuplaient depuis longtemps, et où plus aucun jeune couple ne veut désormais habiter.

Un temps, les Japonais avaient été tentés par le « jishuku », c'est-à-dire l'autolimitation. Ils se sont remis à consommer. Après un mois d'avril en berne, hôtels et restaurants ont tous senti une amélioration depuis mai. « Ça va beaucoup mieux », respire Dominique Corby, chef du restaurant étoilé Le Sixième Sens à Tokyo. Les grands hôtels enregistrent une hausse des niveaux moyens de dépense, et les grandes enseignes de luxe observent avec étonnement un bond des ventes de bagues de fiançailles, signe de l'appétit de vivre des Japonais. « Mais les Chinois sont partis, et ils ne reviendront pas », tempère un baron du luxe français, constatant que les touristes qui faisaient jadis la fortune de certaines boutiques du centre de Tokyo demeurent désormais à distance de l'archipel.

Commentaire 0

Votre email ne sera pas affiché publiquement.
Tous les champs sont obligatoires.

Il n'y a actuellement aucun commentaire concernant cet article.
Soyez le premier à donner votre avis !

-

Merci pour votre commentaire. Il sera visible prochainement sous réserve de validation.