Duel au sommet du parti travailliste australien

Lundi, les parlementaires travaillistes australiens devront dire s'ils confirment leur confiance à l'actuel premier ministre Julia Gillard, ou s'ils lui préfèrent son prédécesseur Kevin Rudd. Un combat entre deux personnalités à l'opposé l'une de l'autre, sur fond de débat autour de la politique fiscale du parti.
Julia Gillard, l'actuel premier ministre Copyright Reuters

Julia ou Kevin ? Lundi 27 février, les 103 parlementaires travaillistes australiens devront décider par un vote du nom de leur leader, autrement dit de celui du premier ministre de l?île continent. Un choix qui peut décider de l?avenir de leur parti et du destin politique du pays.

Putschs

Tout a commencé mercredi, lorsque l?ancien premier ministre Kevin Rudd annonce avec fracas sa démission du portefeuille des Affaires étrangères. Le premier ministre actuel, Julia Gillard, décide alors de demander un vote de confiance aux parlementaires travaillistes pour le 27 février. Vendredi, deuxième coup de tonnerre, ce vote se mue en duel : Kevin Rudd se présente officiellement devant les députés pour prendre la tête du parti à la place de Julia Gillard. Ces deux-là se détestent cordialement depuis longtemps. En juin 2010, Kevin Rudd, à la tête du gouvernement depuis 2007, est chassé par un putsch interne au parti monté par Julia Gillard. Depuis, il rumine sa vengeance?

Rudd populaire

Le principal atout de Kevin Rudd est sa popularité qui est actuellement au plus haut dans les sondages. Volontiers hâbleur, il plait aux Australiens et attaque de front une femme premier ministre assez austère. « Je veux finir le travail pour lequel le peuple australien m?a élu comme premier ministre », a-t-il insisté lors de sa déclaration de candidature en rappelant qu?il avait emporté haut la main en 2007 les élections fédérales. A cette époque, le parti travailliste avait raflé 44 % des voix et mis fin à onze ans de domination conservatrice sur l?Australie.

En août 2010, Julia Gillard avait certes également remporté le scrutin, mais le parti avait alors perdu sa majorité absolue à la chambre basse et n?avait glané que 37 % des voix. Surtout, depuis, le soutien à la gauche australienne s?est effrité. Les derniers sondages ne donnent que 32 % aux Travaillistes contre 46 % à la coalition libérale-nationale menée par Tonny Abbott, le perdant du scrutin de 2010. Avant les prochaines élections fédérales de 2013, Kevin Rudd entend donc se présenter comme le seul capable de redresser le parti et de faire barrage à ce qu?il appelle « le pire gouvernement conservateur et droitier que va connaître l?Australie ». « Julia a perdu la confiance du peuple », résume-t-il.

L'actuel premier ministre reste favori

En face, Julia Gillard peut compter sur l?appareil du parti travailliste. La plupart de ses caciques ont en effet conservé un souvenir horrifié des méthodes autoritaires de Kevin Rudd, même si ce dernier prétend « avoir changé ». C?est le cas de son ancien ministre de la santé, Nicola Roxon qui affirmait vendredi à la chaîne Sky News que pour rien au monde il n?accepterait de revenir dans un cabinet dirigé par Kevin Rudd. « J?ai été le témoin de pas mal de comportements déplorables envers les équipes et les officiels », se souvient-il.

Rien d?étonnant donc à ce que l?actuel premier ministre fasse figure de favori. Selon le quotidien The Australian, 66 parlementaires la soutiendraient. Elle entend aussi s?appuyer sur ses compétences et son sérieux. « Il ne s?agit pas là d?un épisode de « Big Brother Celebrity » [une émission de télévision où les participants sont éjectés par vote, ndlr] mais de savoir qui va devenir premier ministre », a-t-elle déclaré en réponse à l?argument de la popularité de son opposant.

Une économie qui se porte bien

Au-delà du duel des personnalités, c?est la politique des Travaillistes qui pourrait être remise en cause. L?économie australienne se porte pourtant très bien. On s?attend à une croissance de 3 % cette année et le chômage a récemment reculé à 5,1 % de la population active. Mais deux projets travaillistes inquiètent les milieux d?affaires : un impôt sur les émissions de dioxyde de carbone qui frapperait 500 grandes entreprises à partir du 1er juillet à raison de 23 dollars australiens, soit 18 euros, par tonne de CO2 émise et une taxe sur les bénéfices du secteur minier, un des plus important du pays, de 30 %. Le vote de lundi devra également être analysé au regard de ces lois très discutées dans l?île. Kevin Rudd a notamment appelé à la « prudence » sur la « mise en ?uvre » de la taxe carbone au cours des six prochains mois.

Des élections anticipées ?

Mais l?élément le plus décisif sera sans doute politique. Si Julia Gillard tombe, il n?est pas certain que les parlementaires indépendants, indispensables à la majorité travailliste, soutiennent un gouvernement de Kevin Rudd. On aurait alors des élections fédérales anticipées qui seraient défavorables au parti. Un argument qui devrait jouer en faveur du statu quo.
 

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