Belgique : sortir...ou ne pas sortir du nucléaire

Le Royaume est sensé sortir du nucléaire progressivement entre 2015 et 2025. Mais l'impréparation de la transition et l'intérêt financier de l'État fédéral pourraient bouleverser ce calendrier. Un enjeu considérable pour Electrabel, la filiale de GDF Suez qui gère l'ensemble du parc belge.
La centrale nucléaire de Tihange, en Belgique. Copyright Reuters

Sortira, sortira pas? Officiellement, les cheminées des trois plus anciennes centrales belges à Doel, dans le nord du pays, et Tihange, dans le sud, doivent cesser de fumer en 2015. Et celles des quatre autres au plus tard en 2025. Voilà pour la théorie. En pratique, rien n'est moins sûr que la Belgique arrive à cette échéance relativement brève à se passer d'une énergie qui couvre actuellement plus de la moitié de ses besoins en électricité et dont le seul substitut réel à ce jour est le gaz importé.

Retour en arrière. 2003, Ecolo, le parti écologiste francophone, est au gouvernement fédéral et parvient à faire adopter une loi planifiant la sortie du nucléaire. L'Allemagne est sur cette pente. Un mouvement semble s'esquisser en Europe. Dans le Royaume, les écologistes "labouraient le terrain" depuis des années, raconte l'eurodéputé écologiste Isabelle Durant qui siégeait à l'époque au gouvernement fédéral. Cette loi, "on a dû l'arracher. Il a fallu trois ans de travail", dit-elle. Cela ne fut pas sans compromis. "On a dû glisser une petite phrase sur la sécurité énergétique. C'était la clé pour avoir à bord le CdH", le parti des démocrates-chrétiens francophones, traditionnellement pro-nucléaire.

Un "plan d'équipement" en préparation

Or le CdH, justement, a aujourd'hui le portefeuille de l'Energie dans le gouvernement formé laborieusement fin 2011 par le socialiste Elio Di Rupo. Chez le secrétaire d'Etat Melchior Wathelet, on affiche la plus grande prudence. Un "plan d'équipement" est en préparation sur la base de "questionnaires envoyés aux producteurs d'énergie belge" dans le but d'"analyser les capacités de production". En clair, on ne sait pas par quoi on remplacera les trois centrales à fermer dans trois ans et a fortiori les quatre suivantes.

"Quand nous avons quitté le gouvernement, raconte Isabelle Durant, les autres ont mis la loi au placard sans préparer ce qui était nécessaire" pour sortir effectivement du nucléaire. "Notre orientation était que les opérateurs avaient besoin de sécurité juridique pour investir dans les renouvelables", dit-elle. Chez Electrabel, la filiale de GDF Suez qui gère l'ensemble du parc belge, c'est effectivement la ligne officielle : la décision est politique, l'essentiel est que l'on ait de la visibilité.

Le "saut qualitatif" de l'éolien offshore

Après des années de tergiversation, en dépit de la loi, l'accident de Fukushima a "changé la musique ambiante", selon Isabelle Durant, et remis l'abandon du nucléaire sur l'agenda. La grande question est de savoir comment financer les installations de substitution. Jusqu'à présent, le recul du charbon s'est fait au profit du gaz, dont les centrales sont à la fois relativement souples à gérer et faciles à rentabiliser. Mais le gaz présente le double inconvénient d'aggraver la dépendance et de rejeter du CO2. Pour la députée écologiste, seul l'éolien offshore permettrait de faire un "saut qualitatif" vers un nouveau mix énergétique.

Le gouvernement fédéral, lui, préfère laisser toutes les options ouvertes, y compris celle d'un prolongement de la durée des centrales (dont les plus vieilles auront 40 ans en 2015), au-delà du terme inscrit dans la loi de 2003. Or, l'Etat fédéral est intéressé financièrement à la production nucléaire dont il partage la "rente" grâce à un accord historique passé avec l'opérateur de centrales largements financés sur fonds publics. Cette année, elle rapportera 550 millions d'euros au budget.
 

Commentaire 1
à écrit le 10/03/2012 à 12:48
Signaler
La question est très mal posée : la vraie question devrait être :Tripler ou ne pas tripler le prix de l'électricité ?

Votre email ne sera pas affiché publiquement.
Tous les champs sont obligatoires.

-

Merci pour votre commentaire. Il sera visible prochainement sous réserve de validation.