"Obama Care" : la réforme de l'assurance maladie sur le gril

Après des mois de bataille judiciaire, la réforme clé du mandat Obama sur l'assurance maladie passera son oral devant la Cour suprême de lundi à mercredi. Quelque 28 États attaquent le gouvernement contre la loi qui impose à chacun de se doter d'une assurance maladie. La décision de la Cour suprême pourrait faire basculer l'élection présidentielle.
Photo Reuters

La réforme phare du président Barack Obama sur l'assurance maladie, qui suscite les passions aux Etats-Unis, jouera sa survie en début de semaine devant la Cour suprême, lors de débats d'ores et déjà qualifiés d'historiques. "Sans précédent", "extraordinaire", les experts rivalisent de superlatifs pour qualifier l'audience que la plus haute juridiction du pays va consacrer lundi, mardi et mercredi, à la plus grande réforme du président démocrate, en pleine campagne pour sa réélection.

Deux ans presque jour pour jour après son adoption, la loi, destinée à assurer une couverture maladie à 32 millions d'Américains, sera dépecée par une Cour de tendance conservatrice, saisie par plus de la moitié des Etats américains, une organisation patronale et des particuliers. Au coeur de la controverse: la mesure clé de la loi qui rend obligatoire, pour tous les Américains, de se doter d'une couverture maladie avant 2014, sous peine de sanctions.

Les opposants refusent d'être contraints

"S'ils peuvent vous contraindre à acheter une assurance santé, ils peuvent vous forcer à acheter une voiture, des asperges, un abonnement à un club de sport", a déclaré à l'AFP Kenneth Cuccinelli, le ministre de la Justice de Virginie, un des 28 Etats qui attaquent le gouvernement. "Jamais dans notre Histoire, un gouvernement fédéral n'a exercé un pouvoir si étendu", a ajouté ce républicain.

Cinq plaintes affirment que le Congrès a outrepassé ses prérogatives constitutionnelles. Dans sa propre requête, le gouvernement estime au contraire que cela relève bien de la compétence du Congrès. Pour Neal Katyal, ancien conseiller juridique de l'administration Obama, "le Congrès a réagi face aux 50 millions de personnes qui ne sont pas assurées dans ce pays". "Cette loi régule le marché de l'assurance maladie", a-t-il dit, car "l'absence d'assurance se répercute sur l'économie. Tout le monde a besoin un jour ou l'autre d'une couverture santé et nous ne pouvons pas prédire quand nous tombons malades".

Deux tiers des Américains sont contre

Adoptée aux forceps le 21 mars 2010, la loi, qui prévoit aussi d'étendre la prise en charge à 16 millions de pauvres, recueille un record d'opinions défavorables et mobilise les opposants qui ont prévu de manifester devant l'élégant édifice à Washington. Deux-tiers des Américains estiment que la Cour suprême devrait abroger la loi tout entière ou supprimer sa mesure clé, selon un sondage ABC News/Washington Post.

"C'est de loin l'article de loi le plus impopulaire", a écrit l'éditorialiste du Post Ruth Marcus, parlant d'une "opposition publique fondamentalement irrationnelle". La Cour suprême a accordé six heures d'audience à ce dossier colossal, un record en 45 ans quand elle consacre en général une heure à chaque affaire. Tout aussi exceptionnellement, elle rendra public le jour même l'enregistrement audio des débats. Car la majestueuse salle aux colonnes de marbre, prise d'assaut pour cette audience, ne peut accueillir habituellement qu'une cinquantaine de spectateurs et une centaine de journalistes. Le ministre de la Justice Eric Holder y assistera.

Un tournant dans l'élection présidentielle

Les neuf sages, dont cinq nommés par un président républicain et quatre par un démocrate, devront déterminer si la loi peut survivre si on la dépouille de sa mesure clé. "Une fois qu'on arrache le coeur du corps, cela n'a pas d'importance si les doigts bougent encore", a estimé Michael Carvin, avocat de l'organisation patronale National Federation of Independent Business, qui compte parmi les plaignants.

Pour l'analyste Ilya Shapiro, de l'institut Cato, un centre de réflexion conservateur, ce dossier pourrait bien coûter son poste au président Obama. "Si la loi est invalidée, la plus grande réalisation de l'administration Obama sera effacée. Si elle est confirmée, cela dynamisera non seulement le "Tea party" ultraconservateur et la base républicaine mais aussi les indépendants (non affiliés à un parti, ndlr) qui majoritairement sont contre l'Obamacare". Mais, selon lui, le juge Anthony Kennedy, qui vote tantôt à droite, tantôt à gauche, devrait voter en faveur de la réforme et le président conservateur de la Cour, John Roberts, pourrait "en tant que garant de l'intégrité institutionnelle, se joindre à lui et confirmer la loi par 6 voix contre 3". Réponse en juin, à la fin de la session de printemps de la Cour suprême.

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