Barack Obama face à la Cour suprême

Les neuf juges de la plus haute juridiction des Etats-Unis débutent ce lundi l'examen de la réforme-phare du président sortant. Il ne rendront leur verdict qu'en juin, cinq mois à peine avec l'élection présidentielle de novembre.
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Devant la Cour suprême des Etats-Unis à Washington, la queue a débuté en fin de semaine dernière pour décrocher l'une des 60 places allouées au public. Quelques curieux, désireux d'assister au moment historique qui s'annonce. Mais surtout des personnes payées plusieurs centaines de dollars par des organisations et des lobbies pour attendre à leur place et obtenir l'un de ces précieux sésames.

Car les neuf juges de la plus haute juridiction des Etats-Unis débutent ce lundi l'examen de la réforme du système de santé (rebaptisée "Obamacare"), votée et promulguée il y a deux ans. La plus importante affaire depuis 2000 lorsque la Cour avait ordonné l'arrêt du recompte des voix en Floride, entérinant la victoire de George W. Bush à la présidentielle, estiment certains experts judiciaires. Pour d'autres, il faut remonter aux années 30 quand elle avait dû se prononcer sur la constitutionalité du "New Deal" de Franklin Roosevelt.

Mandat individuel

La décision la plus attendue de la Cour suprême concerne la constitutionnalité du "mandat individuel": l'obligation pour tous les Américains de souscrire à une assurance-maladie d'ici à 2014, sous peine de sanction financière. Cette mesure fait l'objet d'un recours déposé par les procureurs généraux et gouverneurs de 26 Etats américains. "Le Congrès a outrepassé son pouvoir", assure Ken Cuccinelli, procureur général de l'Etat de Virginie. "C'est sans précédent", ajoute Paul Clement, ancien avocat de l'administration Bush qui représentera ces 26 Etats face devant la Cour Suprême. "Cela illustre l'incapacité du gouvernement à établir des limites".

"Nous savons que la réforme est constitutionnelle, et sommes confiants dans le fait que la Cour suprême sera d'accord", assure de son côté la Maison-Blanche. L'administration Obama sera défendue par Donald Verrilli. "Il va tout mettre en ?uvre pour montrer pourquoi cette loi est constitutionnelle et pourquoi elle est importante", a expliqué, dimanche sur CNN, David Plouffe, haut-conseiller de la Maison Blanche.

Aucune caméra

Les neuf sages - dont cinq ont été nommés par des présidents républicains - entendront les arguments des deux parties au cours de 6 heures d'audience, reparties sur les trois prochains jours. Du jamais vu depuis plus de 40 ans. Ils devront notamment interpréter la "clause de commerce", une disposition particulièrement vague de la Constitution. Quatre Cours d'appel fédérales ont déjà statué sur cette loi, rendant des jugements opposés. Les deux premières l'ont considérée conforme à la Constitution, la troisième anticonstitutionnelle et la quatrième a estimé qu'il fallait attendre 2015 pour se prononcer.

A l'intérieur, aucune caméra, aucun appareil photo, aucun téléphone. La Cour se contentera de rendre public des enregistrements audio une fois les audiences terminées. Le verdict n'est attendu que pour la fin juin, soit cinq mois à peine avec l'élection présidentielle de novembre 2012. Les juges pourraient également repousser leur décision à 2015 s?ils considèrent le mandat individuel comme un impôt (les débats ne pouvant constitutionnellement se tenir qu'après son entrée en vigueur).

Sacro-sainte liberté individuelle

Votée difficilement et au prix de nombreuses concessions, la réforme de la santé est devenue un symbole aux yeux de la droite américaine - celui d'un État interventionniste et qui ose s'ingérer dans la sacro-sainte liberté individuelle. Usant et abusant de contre-vérités et violences verbales, les détracteurs de la réforme n'ont jamais baissé les bras, sur le plan médiatique et judiciaire. Et ce, d'autant que l'opinion publique reste majoritairement hostile à cette réforme. Même si, selon une étude du Centre de prévention et de contrôle des maladies (CDC), près de 50 millions d'Américains ne bénéficient pas d'une couverture santé. Beaucoup y renoncent tout simplement, car il faut compter plusieurs centaines de dollars par mois pour une assurance privée aux États-Unis.

La décision de la Cour Suprême pourrait avoir un impact important sur la campagne. Si les sages décident d'invalider tout ou partie du texte, cela constituerait une défaite majeure pour Barack Obama qui avait de la réforme de la santé l'une des priorités de son premier mandat. Il se retrouverait affaibli au moment d'affronter son adversaire républicain. Mais si la Cour Suprême valide au contraire la réforme, cela pourrait galvaniser les conservateurs, notamment les militants du Tea Party, lancés dans une bataille contre le "Big Government".

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