Égypte : face à un climat politique tendu, le FMI exige des avancées

Face au refus des Frères musulmans de voir un prêt du Fonds monétaire international (FMI) attribué au gouvernement de transition actuel, et à la rédaction d'une Constitution au point mort, l'institution internationale a décidé de suspendre le dossier égyptien. Et attend du concret.
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La perspective d'une aide du Fonds monétaire international (FMI) s'éloigne en Egypte. Si les principales forces en présence sont ouvertes aux discussions avec le FMI, leurs divergences y constituent un frein. C'est pourquoi l'institution internationale a demandé mardi à la classe politique égyptienne de se mettre d'accord sur un programme économique, et en particulier un budget, avant de pouvoir accorder un prêt au pays.

"La mission du FMI restera en contact étroit avec les autorités dans les semaines à venir tandis qu'elles mettront au point les détails restants de leur programme économique, y compris le budget 2012-2013, et qu'elles mobiliseront le soutien politique exigé pour ce programme", a indiqué le Fonds à l'issue d'une mission de deux semaines au Caire. "Un accord financier pour soutenir le programme économique de l'Egypte sera présenté au conseil d'administration du FMI une fois ce travail achevé ", a-t-il ajouté.

Opposition des Frères musulmans

Le FMI et l'Egypte négocient depuis le début de l'année un prêt dont le Fonds souhaite qu'il fasse l'unanimité au sein de la classe politique. Or la principale force du Parlement, les Frères musulmans, est opposée à l'idée qu'un tel prêt bénéficie à l'actuel gouvernement de transition nommé par l'armée. L'Egypte est par ailleurs en pleine campagne électorale, avec le premier tour de l'élection présidentielle prévu les 23 et 24 mai, et en train de négocier une Constitution dont il n'est pas sûr qu'elle sera rédigée d'ici là. Car la Commission constituante a été suspendue mardi par la Justice égyptienne, infligeant ainsi un revers aux islamistes qui dominent cette instance boycottée par les libéraux. Le tribunal administratif du Caire n'a pas expliqué dans l'immédiat les raisons de sa décision, qui survient dans un contexte politique tendu.

Un recours avait été déposé auprès de la justice administrative par des juristes et des partis politiques libéraux accusant le Parlement d'avoir abusé de ses prérogatives en formant cette commission. L'instance, formée de 100 personnes désignées fin mars par le Parlement -50 parlementaires et 50 non-parlementaires- est principalement composée de membres des Frères musulmans et de fondamentalistes salafistes, très largement majoritaires parmi les députés et sénateurs.

La composition contestée de la commission a entraîné le retrait des différents partis

L'Egypte est en pleine crise politique. Les partis laïques se sont retirés de la commission, estimant que leur présence ne faisait que servir de caution aux islamistes pour la rédaction d'une loi fondamentale reflétant leurs options politico-religieuses, notamment l'extension de l'application de la charia, la loi islamique. L'institution islamique sunnite d'Al-Azhar et l'église copte orthodoxe d'Egypte ont aussi décidé de la boycotter, tout comme la Cour suprême constitutionnelle qui a retiré son représentant en invoquant des "doutes et la confusion" sur sa formation. L'église copte a estimé "inopportun de continuer à être représentée après les réserves de diverses forces politiques sur la façon dont la commission constituante a été composée". Al-Azhar a jugé pour sa part "ne pas être correctement représentée". Les islamistes estiment quant à eux que cette commission doit refléter la composition d'un Parlement élu au suffrage universel, où ils détiennent plus de 70% des sièges.

La Constitution sur la sellette

L'armée, au pouvoir depuis le départ de Hosni Moubarak, a promis le retour complet à un pouvoir civil une fois le futur président élu. Mais le processus constitutionnel semble désormais avoir peu de chance d'être bouclé avant le scrutin, ce qui fait craindre que les électeurs aient à choisir un président sans connaître l'étendue de ses pouvoirs. La campagne électorale s'est quant à elle brutalement tendue après les annonces des candidatures controversées d'un haut dirigeant des Frères musulmans, Khaïrat al-Chater, et de l'ancien chef des services secrets de Hosni Moubarak, Omar Souleimane. Le premier était emprisonné sous l'ère Moubarak lorsque le second occupait le poste de chef des services secrets. Si chacun d'entre eux bénéficie d'un fort soutien de l'opinion publique -si l'on s'en tient aux sondages disponibles-, tous deux devront toutefois affronter l'ancien ministre des Affaires étrangères et chef de la Ligue arabe Amr Moussa, en campagne depuis un an.

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