Le dissident chinois Chen Guangcheng en route pour les Etats-Unis

Le départ de Chen Guangcheng met fin à un imbroglio diplomatique de près d'un mois entre Pékin et Washington autour de la situation de l'avocat autodidacte aveugle qui s'était réfugié fin avril à l'ambassade des Etats-Unis
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Le militant chinois des droits civiques Chen Guangcheng, au centre d'une crise diplomatique entre Pékin et Washington depuis un mois, est en route pour les Etats-Unis, a confirmé samedi le département d'Etat. "Nous pouvons confirmer que Chen Guangcheng, sa femme et ses deux enfants sont en route pour les Etats-Unis, pour qu'il puisse poursuivre ses études dans une université américaine", a déclaré dans un communiqué la porte-parole du département d'Etat américain, Victoria Nuland. "Nous attendons avec impatience son arrivée plus tard dans la journée aux Etats-Unis", a ajouté la porte-parole. "Nous exprimons notre satisfaction pour la manière dont nous avons pu régler cette question et soutenir le désir de M. Chen d'étudier aux Etats-Unis". Le célèbre dissident a pris place avec sa femme et ses deux enfants à bord d'un vol United Airlines reliant Pékin à New York qui est parti vers 18h (10h GMT). Confiné dans un hôpital du centre de Pékin -où il était soigné pour des fractures au pied depuis deux semaines-, il n'aurait été informé de son départ qu'au dernier moment.

L'association américaine China Aid, qui a toujours été en contact étroit avec ce champion de la lutte contre les stérilisations et avortements forcés, a indiqué samedi qu'il voulait "exprimer sa gratitude au gouvernement chinois qui a respecté sa promesse de laisser partir sa famille". China Aid poursuit dans un communiqué que "la famille Chen apprécie au plus haut point" les efforts consentis par la communauté internationale, et notamment les Etats-Unis pour obtenir un exil de Chen Guangcheng.

"Nous sommes heureux pour Chen et sa famille", a déclaré China Aid, "c'est un grand jour pour les combattants de la liberté". Mais si Chen est autorisé à aller étudier aux Etats-Unis, pour de nombreux analystes il est très improbable que la Chine acceptera qu'il revienne ensuite dans son pays. L'organisation Human Rights Watch s'est dite "soulagée" que la Chine a tenu son engagement. Mais, pour l'association des droits de l'homme, "mettre Chen Guangcheng et sa famille dans un avion est la partie la plus facile de cette saga". "Le plus dur (..) est de garantir son droit (..) de rentrer en Chine quand il le souhaitera".

Un imbroglio diplomatique de près d'un mois
Le départ de Chen Guangcheng met fin à un imbroglio diplomatique de près d'un mois entre Pékin et Washington autour de la situation de cet avocat autodidacte de 40 ans qui s'était réfugié fin avril à l'ambassade des Etats-Unis après s'être évadé dans des circonstances rocambolesques alors qu'il était en résidence surveillée depuis 20 mois, subissant mauvais traitements et brutalités.
Après avoir trouvé refuge six jours à l'ambassade des Etats-Unis, alors même que la secrétaire d'Etat américaine Hillary Clinton se trouvait à Pékin, le dissident, aveugle de naissance, avait accepté de quitter l'ambassade pour être soigné à l'hôpital après des "garanties" sur sa sécurité en Chine obtenues par les Etats-Unis auprès des autorités chinoises. Un accord entre Pékin et Washington avait été obtenu à l'arraché, la Chine acceptant de fournir "au plus vite" à Chen Guangcheng et à sa famille des passeports pour qu'ils puissent partir, et les Etats-Unis de leur délivrer tout aussi rapidement des visas.

Rappel des principaux événements
 

- Août 2006 : Le juriste autodidacte, pourfendeur des stérilisations forcées et des expropriations abusives, est condamné à 4 ans et 3 mois de prison pour "atteinte délibérée à la propriété" et "trouble à l'ordre public". Selon ses partisans, Chen Guangcheng avait accusé les autorités de Linyi (province orientale du Shandong) d'avoir contraint des milliers de femmes à des avortements tardifs ou à des stérilisations. Avant cette condamnation, il avait déjà été placé en résidence surveillée et battu à plusieurs reprises.
 
- Sept 2010 : Chen Guangcheng est libéré mais placé en résidence surveillée, avec sa femme et sa fille cadette dans son village de Dongshigu. Des douzaines de policiers surveillent sa maison.
 
2011
- 11 nov : Hillary Clinton lance à Honolulu un appel en faveur de sa libération lors du Forum Asie-Pacifique (Apec). Pékin proteste contre cette "ingérence" dans ses affaires intérieures.
- 12 nov : 13 personnes venues pour voir Chen, à l'occasion de son 40e anniversaire, sont arrêtées par les autorités, selon des témoignages.
- 16 déc : L'acteur britannique Christian Bale et une équipe de la chaîne de télévision américaine CNN sont malmenés par la police et empêchés de voir Chen.
 
2012
- 20 avril : Bien qu'aveugle, Chen échappe à la vigilance de ses gardiens et s'évade en sautant par-dessus un mur.
Dans une vidéo adressée au Premier ministre Wen Jiabao, diffusée par la suite sur internet, il dénonce des sévices infligés par les hommes de main des autorités locales à lui-même et à ses proches, pendant leur résidence surveillée.
- 27 avril : Selon des témoignages, il aurait réussi à rejoindre Pékin où il aurait trouvé refuge à l'ambassade des Etats-Unis.
- 28 avril : Chen serait "sous protection" américaine et ferait l'objet de négociations, selon des groupes de défense des droits de l'homme.
- 2 mai : Chen quitte l'ambassade pour être soigné à l'hôpital après des "garanties" sur sa sécurité en Chine obtenues par les Etats-Unis auprès des autorités chinoises.
- 3 mai : Se disant menacé en Chine, Chen demande finalement aux Américains de l'aider à quitter son pays avec sa famille.
- 5 mai : les Etats-Unis annoncent un accord avec Pékin sur un départ de Chen et sa famille aux Etats-Unis, où il pourra étudier le droit.
- 16 mai : après une dizaine de jours d'immobilisme, Chen peut effectuer les formalités pour obtenir un passeport chinois avec des responsables de l'émigration.

 

Commentaires 2
à écrit le 22/05/2012 à 12:54
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Les chinois se sont débarrassé d'un emmerdeur et surtout de ceux qui le manipulent. Un de plus qui visitera toutes les universités américaines pour prêcher la bonne parole. J'ai vu ce spectacle pendant 21 ans quand je vivais aux USA. A l'époque, ave...

à écrit le 20/05/2012 à 9:42
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Dissidence ....Résistance ...Souffrance...Tabassage répété sur ordre des autorités ...Mais combien d'autres le sont - Victimes anonymes...Comme c'est curieux , nous n'avons pas entendu un seul mot de compassion de la classe politique française ...

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