L'Asie émergente à la merci de la Fed

La Banque mondiale a revu ses prévisions de croissance en Asie émergente et craint particulièrement pour les économies émergentes de la région en cas de durcissement de la politique monétaire américaine. Explication.
La Banque mondiale a abaissé ses prévisions de croissance pour l'Asie de l'Est et craint que le durcissement de la politique monétaire de la Fed ne vienne déstabiliser l'économie de la région (Photo : Reuters)

Faut-il craindre un scénario du type 1997 en Asie émergente ? On peut se poser la question à la lecture du dernier rapport semi-annuel de la Banque mondiale, qui a revu à la baisse sa prévision de croissance de 7,8% il y a six mois à 7,1% aujourd'hui pour l'année 2013. Plus que cette révision à la baisse de la croissance, tirée vers le bas par le ralentissement chinois dû à son rééquilibrage en cours, ce que craint la Banque mondiale, c'est la sortie annoncée à terme par la Fed de son programme de "Quantitative easing". Explication.

  • La Fed a provoqué un afflux de capitaux vers les émergents

En faisant baisser les taux d'intérêts aux États-Unis, la Fed a provoqué un afflux de capitaux vers les économies émergentes en général, avance la Banque mondiale. Remis de la crise de 2008, les investisseurs sont en effet partis à la recherche de produits plus risqués, et donc plus rémunérateurs que les valeurs refuges plébiscitées au plus fort de la tempête.

Les pays d'Asie émergente en ont alors profité. Ce qui a eu pour effet d'augmenter la valeur de leurs actifs, d'y faire baisser les taux d'intérêts et de faire s'apprécier leurs monnaies.

  • La sortie de la politique accommodante fait craindre une fuite des capitaux

Mais l'annonce d'une sortie progressive du QE par la Fed en juillet dernier et les fortes rumeurs qui s'en sont suivies ont provoqué une sortie importante des capitaux placés dans les marchés émergents. L'Asie du Sud-est a été la plus touchée.

Tous les pays d'Asie émergente ne courent toutefois pas le même risque face à cette fuite de capitaux. En effet, les pays dont la balance des paiements courants est positive, c'est à dire que les flux sortants sont moins élevés que les flux entrants, sont moins exposés, car ils sont en capacité de s'auto-financer.

"La Chine ressentira les effets de la fin du quantitative easing, mais elle ne court pas un risque important pour autant car elle enregistre un excédent courant", commente Bei Xu, économiste chez Natixis.

  • L'Inde et l'Indonésie, dépendantes des financements extérieurs, posent question

En revanche, les pays dont le solde des paiements courants est négatif inquiètent. C'est le cas de l'Indonésie et l'Inde (non étudiée dans le rapport de la Banque mondiale), qui présentent des déficits jumeaux (déficit public et déficit commercial).

"Ce sont les économies les plus fragiles sur le plan structurel", confirme l'économiste de Natixis, qui explique que ces deux pays n'auront pas la capacité de financer les investissements nécessaires au soutien de la croissance, ni par de la relance publique, ni par de l'investissement privé sans financements extérieurs.

  • La dépréciation des monnaies exposées amplifie le besoin de financements

Mais ce n'est pas tout. Car, comme on l'a vu au mois de juillet, la crainte d'un durcissement de la politique monétaire de la Fed, en provoquant le désintérêt pour les monnaies émergentes, provoque leur dépréciation. Ainsi la roupie indienne a-t-elle perdu 40% de sa valeur au mois de juillet. Même tendance pour la roupie indonésienne.

L'ennui, c'est que l'Indonésie comme l'Inde importent plus qu'elles n'exportent. Or, explique Bei Xu, "la dépréciation de la monnaie détériore les termes de l'échange". De fait, la baisse de la valeur de leurs monnaies aurait pour effet d'amplifier encore les déficits courants de l'Inde et de l'Indonésie en faisant exploser leurs déficits commerciaux.

Faute de pouvoir importer autant qu'avant, l'Indonésie, par exemple, devra plus produire sur place si elle veut pouvoir contenter sa demande intérieure, principal moteur de sa croissance. Ce qui, en l'absence de financements extérieurs, pose un problème de capacité à investir dans son appareil de production. "Si un pays n'a pas de capacité de financement domestique, il creuse encore plus sa position extérieure", explique l'économiste de Natixis.

  • Le Japon peut-il prendre le relais des États-Unis?

Dans leur recherche de capitaux étrangers pour financer leurs économies, les émergents touchés par le durcissement de la politique monétaire américaine pourront toujours se tourner vers le Japon, dont la banque centrale mènee elle aussi à une politique monétaire accomodante. D'autant plus que le développement des relations commerciales entre la troisième économie mondiale et les pays émergents d'Asie du Sud-est est une des priorités de Shinzo Abe, le Premier ministre japonais.

Mais les afflux de capitaux en provenance de l'archipel ne pourront pas compenser le retrait des capitaux américains. "Les Américains investissent beaucoup à l'extérieur, les Japonais ont en revanche un biais domestique très important", note Bei Xu. En clair, ils sont plus réticents à investir à l'extérieur.

Commentaires 2
à écrit le 08/10/2013 à 16:07
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Obama joue l'acharnement idéologique qu'il prend pour des réformes. En face et pour nombre de bons citoyens la priorité au pays finissait par leur faire accepter le pourtant évitable. Cette loyauté finit par leur faire porter la faute du temps perdu ...

à écrit le 08/10/2013 à 11:18
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BEAUCOUP DE PAYS SONT DEPENDANT DES CAPITAUX AMERICAINS MEME LA FRANCE ET L EUROPE en placent leurs economies dans les pays emergent ils;esperent que ces pays deviennent a leur tours des clients economiques valable ; c est la guerre economique ;le ...

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