Plus que quelques heures : il reste très peu de temps aux membres du Sénat américain pour parvenir à un accord in extremis sur le budget. Si un consensus n'a pas été dégagé mercredi soir à minuit (jeudi à 5 heures en France), les États-Unis se retrouveront en défaut de paiement. La déflagration serait alors mondiale.
En effet, une absence d'accord signifierait que le Trésor américain ne serait plus autorisé à emprunter et ne pourrait plus compter que sur des réserves déclinantes. La date est difficile à prédire, mais pourrait se situer entre les 22 et 31 octobre, selon le Bureau du Budget du Congrès. Les États-Unis ne pourraient alors plus assurer tous leurs paiements pour la première fois de leur histoire.
Un accord pourrait être officialisé mercredi matin
Un tel choc de confiance risquerait de mettre en jeu le sort du dollar, monnaie de réserve mondiale, et celui des bons du Trésor, placements réputés les plus sûrs de la planète.
Mardi soir, au terme d'une journée chaotique reflétant les profondes divisions partisanes à Washington, les républicains dominant la Chambre des représentants ont renoncé à organiser un vote destiné à relever le plafond de la dette et à mettre fin à la paralysie de l'État fédéral, faute de soutien des influents élus issus de la mouvance ultra-conservatrice Tea Party.
Les chefs de file du Sénat, le dirigeant de la majorité démocrate Harry Reid et celui de la minorité républicaine Mitch McConnell, ont immédiatement fait savoir qu'ils œuvraient à une solution de rechange. Un accord pourrait être officialisé mercredi matin.
"Nous avançons très très bien, nous n'y sommes pas encore mais nous sommes très proches" d'un accord, a déclaré le sénateur démocrate Charles Schumer en fin de soirée mardi. "Il faut que les marchés soient rassurés par ce ce qu'il se passe ici ce soir".
John Boehner prêt à céder
La question sera de savoir si le résultat de ces discussions, entamées pendant le week-end et suspendues un temps mardi, sera entériné mercredi par le président de la Chambre, John Boehner, et ses troupes.
Selon le représentant Charlie Dent, John Boehner ne devrait pas opposer de résistance et acceptera de soumettre au vote de la Chambre tout compromis sénatorial, malgré l'opposition d'une partie de sa majorité. Il devra alors s'appuyer partiellement sur des voix démocrates.
"Je pense que John Boehner se retrouvera dans une position où il devra faire adopter le texte négocié" au Sénat, a dit Charlie Dent sur CNN. "Je pense que la Chambre votera en premier, et l'enverra au Sénat". Pour des raisons de procédure, il est plus rapide que la Chambre vote en premier, et John Boehner pourrait simplement décider de faire voter le projet élaboré par les négociateurs du Sénat.
Selon cette procédure, qui n'a pas été confirmée officiellement, le Sénat adopterait ensuite le texte, avant promulgation par Barack Obama.
John Boehner, pris en tenaille entre sa volonté affichée de ne pas laisser un défaut de paiement se produire et la pression du Tea Party hostile au compromis, a jusqu'ici refusé d'organiser une consultation sans le soutien général de sa majorité. Le dénouement envisagé marque une lourde défaite pour la stratégie qu'il a jusqu'ici poursuivie.
Le plan de messieurs Reid et McConnell comprendrait, selon plusieurs médias américains, une mesure permettant au Trésor de continuer à emprunter jusqu'au 7 février, et à l'État fédéral de rouvrir entièrement jusqu'au 15 janvier. En échange, les démocrates offriraient des concessions sur certains aspects de la réforme du système de santé, élément déclencheur de la crise actuelle, notamment en renonçant à une taxe sur les sociétés d'assurance.
Fitch envisage de baissr la note des Etats-Unis
Faute d'accord sur le budget fédéral pour le nouvel exercice, les agences gouvernementales américaines tournent au ralenti depuis le 1er octobre. Des centaines de milliers de fonctionnaires ont été mis en congés forcés sans solde, paralysant progressivement des pans entiers de l'activité.
Signe de la nervosité grandissante du monde entier face à ce blocage, l'agence Fitch a annoncé mardi qu'elle envisageait d'abaisser la note de la dette souveraine des États-Unis, actuellement la meilleure possible à AAA.
Fitch a souligné que "les autorités américaines n'ont pas relevé le plafond de la dette en temps voulu". Déjà en 2011, un précédent affrontement entre la Maison Blanche et M. Boehner avait provoqué la perte par les États-Unis de leur note "AAA" chez l'agence concurrente Standard and Poor's.
En août 2011, un accord politique avait été scellé deux jours avant la date-butoir, et adopté définitivement par le Congrès à quelques heures seulement de l'heure limite. L'espoir est donc encore permis.