Réformes en Chine : Xi Jinping est encore loin d'être un nouveau Deng Xiaoping

Les attentes étaient énormes avant le troisième plénum du Comité central du Parti communiste chinois le week end dernier. Peut être trop. Finalement, celui-ci c'est soldé par beaucoup de promesses, mais n'a pas été décisif sur l'essentiel.
Xi Jinping avait suscité l'espoir de la branche libérale du Parti communiste chinois et des observateurs étrangers. Pour le moment, il déçoit. Mais le conclave du Parti communiste de ce week end s'est tout de même achevé sur des promesses de réformes libérales d'ici à 2020. (Photo : Reuters)

"Des réformes sans précédent", c'est ce que le numéro quatre dans la hiérarchie du Parti communiste chinois avait promis quelques jours avant l'ouverture du troisième plenum, sorte de conclave des caciques du Parti, le week-end dernier. De quoi entretenir les attentes des observateurs internationaux, et notamment des investisseurs, alors qu'avec une croissance qui ralentit, la Chine est à un tournant de son histoire économique.

Pouvoir central renforcé, réformes économiques émoussées

Le mot "réforme" aura été écrit plus de cinquante fois dans le communiqué du Parti. Mais finalement, le président chinois Xi Jinping ne tient pour le moment de Deng Xiaoping, le père de l'ouverture au monde de l'économie chinoise en 1978, que l'ancrage maoïste.

Tout au long de l'année, il n'a en effet eu de cesse d'imposer sa marque sur le plan politique, en organisant une purge violente visant à réaffirmer la mainmise du parti communiste sur la Chine, se plaçant de fait dans la tradition d'un pouvoir central fort, contraire à la montée en puissance de la société civile. Le communiqué du Parti en remet d'ailleurs une couche en précisant vouloir "améliorer le système de management culturel", entendez renforcer le pouvoir de Pékin sur les médias.

Et son libéralisme apparent, décrit comme tel par les observateurs lors de l'accession au pouvoir de Xi Jinping, ne résiste pour le moment pas non plus aux faits sur le plan économique, malgré les discours. De fait, si les importants déséquilibres rencontrés par la deuxième économie mondiale ont bel et bien été évoqués lors du plenum le week-end dernier, ils n'y ont pas pour autant été réglés, signant pour l'heure l'incapacité de la bureaucratie chinoise à vaincre ses propres démons pour s'entendre sur la meilleure voie à suivre. Revue de détails.

  • Les oligopoles publics ne sont pas remis en cause

La fin des oligopoles est réclamée par la branche "libérale" du Parti, par les investisseurs et une minorité d'économistes chinois. C'est du quotidien chinois en langue anglaise China Daily qu'est venu le premier signal en ce sens, lundi dernier : Pékin était prête à laisser des "partenaires" du secteur privé prendre des participations de 10% à 15% dans les grandes entreprises publiques, selon Bai Yingzi, directeur de la division chargée de la réforme au sein de la Commission de supervision et d'administration des actifs de l'État, la Sasac.

Une première étape vers le démantèlement des entreprises d'État ? Non. L'information a en effet aussitôt été démentie par la Sasac elle-même. Et finalement, il n'en a même pas été fait mention dans le communiqué à l'issue du plenum.

La question des oligopoles publics est pourtant cruciale en Chine. Car en plus d'être des viviers de corruption avérés, dans lesquels Pékin tente de faire le ménage en vain, ces puissants conglomérats sont aussi accusés de capter l'ensemble des liquidités déversées sur le pays depuis 2009 dans le cadre de son plan de relance mené par la banque centrale chinoise (PBOC), au détriment de l'investissement productif privé auxquelles les banques, elles-mêmes contrôlées par l'État, sont réticentes à prêter.

  • L'assainissement du système financier chinois… rien de nouveau

Cette aversion au risque des banques chinoises est en partie ce qui explique l'explosion de l'activité de shadow banking, qui consiste, pour les grandes entreprises d'État, à emprunter à des taux intéressants pour ensuite re-prêter à des taux bien plus élevés aux entreprises privées. En plus d'être anti-économique et de peser sur l'investissement privé, cette pratique rend les créances pourries détenues par les banques du pays inquantifiables. Faisant craindre pour la bonne santé du système bancaire chinois.

C'est d'ailleurs la raison pour laquelle les dirigeants du pays avancent à pas feutrés vers une libéralisation de son système financier, qu'ils jugent pour partie nécessaire mais aussi très risquée. Afin d'agir sur le coût du crédit et de favoriser l'investissement privé, Pékin a déjà autorisé les banques à fixer librement les taux auxquels elles prêtent en juillet dernier. Il y a un an encore, elles ne pouvaient prêter qu'à un taux minimum fixé par la PBOC. Ce qui encourageait le comportement de rentiers des banques d'État qui se reposaient uniquement sur les entreprises publiques sans ne jamais prendre de risque.

Mais tant que les grandes entreprises publiques auront la garantie de l'État, les déséquilibres persisteront. De fait, l'autorisation de prêter à un taux inférieur de 30% au niveau de référence décidé il y a un an n'a eu aucun effet positif sur les taux. Et le secteur privé n'en a pas profité. Rien ne bouge, donc, de ce côté-là non plus.

L'essentiel des réformes économiques reporté à plus tard

Tout n'est toutefois pas à jeter à l'issue de ce troisième plenum. En effet, si la plupart des observateurs et des investisseurs ont été déçus par le caractère non décisif de cette réunion au sommet qui devait fixer la direction à adopter pour les dix années à venir, elle n'en a pas moins été marquante. Elle a en effet permis à Xi Jinping d'imposer un nouveau discours au Comité central du Parti communiste, qui est désormais conscient de la nécessité de renforcer le secteur privé, seul levier restant pour opérer le rééquilibrage de la croissance chinoise et ainsi sauvegarder sa légitimité à la tête de l'État, sans accentuer les déséquilibres actuels.

Dans ce sens, un structure interne sera créée au sein du Comité afin de conduire les réformes à venir, qui promettent d'accorder un rôle croissant aux marchés dans l'économie chinoise d'ici à 2020, sur le modèle de ce qu'avait fait Deng Xiaoping en 1978, de manière plus tranchée toutefois.

Parmi les promesses, on compte notamment celle de la libéraliser le yuan sur le marché des changes. Il faudra simplement encore être patient pour savoir si Xi Jinping est en fin de compte le président du nouvel essor de la Chine, à l'instar de son lointain prédécesseur, ou si, faute de pouvoir porter atteinte aux privilèges des oligarques chinois, il n'est en fait qu'un homme d'appareil.

Commentaires 3
à écrit le 14/11/2013 à 10:02
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Pourquoi adopter un ton résolument suspicieusement négatif sur ce que les autorités chinoises entendent batir ? en quoi les régimes occidentaux seraient plus vertueux ? observons objectivement et sans a-priori.. le môdèle chinois est différent du not...

à écrit le 14/11/2013 à 10:02
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Pourquoi adopter un ton résolument suspicieusement négatif sur ce que les autorités chinoises entendent batir ? en quoi les régimes occidentaux seraient plus vertueux ? observons objectivement et sans a-priori.. le môdèle chinois est différent du not...

à écrit le 14/11/2013 à 10:02
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Pourquoi adopter un ton résolument suspicieusement négatif sur ce que les autorités chinoises entendent batir ? en quoi les régimes occidentaux seraient plus vertueux ? observons objectivement et sans a-priori.. le môdèle chinois est différent du not...

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