Les grands enjeux de 2014 (3/4) : sortie de crise ou début d'une autre pour les Etats-Unis ?

Quels seront les grands défis de 2014 pour l'économie mondiale? A découvrir dans ce troisième volet, les risques encourus par l'économie américaine et le monde en cas de mauvaise gestion de la sortie du programme de quantitative easing...
La nouvelle présidente de la Fed Janet Yellen devra très bien doser la sortie progressive du quantitative easing si elle ne veut pas soit compromettre la reprise américaine, soit provoquer la formation de bulles qui pourraient précipiter les Etats-Unis et le monde dans une nouvelle crise. (Photo : Reuters)

Diminution du débit ne rime pas avec fermeture complète du robinet. Cela a été en somme le message qui a permis à la Fed de ne pas provoquer la panique des marchés à l'annonce de la diminution de 10 milliards de dollars par mois de son troisième plan de quantitative easing à la mi décembre. Bref, Ben Bernanke, qui laisse son fauteuil de président de la Fed à la "colombe" Janet Yellen, a réussi sa sortie.

Est-ce à dire pour autant qu'il laisse à la nouvelle "grande argentière" de la finance mondiale une situation simple à gérer ? Pas vraiment. Car l'ampleur de la tâche qu'il reste à accomplir pour réussir la sortie complète du QE3 est aussi complexe que risquée.

Les indicateurs sont à la fête

Certes, l'économie américaine, dont la croissance est repartie sur les chapeaux de roue, montre des signes de nette amélioration par rapport à l'état dans lequel elle était depuis la chute de Lehman Brothers en 2008.

Le taux de chômage est passé d'un pic de plus de 10% à un niveau à peine supérieur à 7%, les prix de l'immobilier connaissent un plus haut depuis 2006, le moral des industriels remonte et même les consommateurs commencent à reprendre du poil de la bête avec des fêtes de noël particulièrement lucratives pour les commerçants d'outre-Atlantique.

Ce qui est plutôt de bonne augure pour 2014, qui ne devrait pas connaître de nouveau shutdown avant fin 2015, et ce qui a permis à la Fed d'annoncer le tapering après avoir tenu les marchés en haleine depuis le mois de juin.

La reprise est encore fragile

Mais à y regarder de plus près, les indicateurs ne sont pas forcément le signe d'une économie complètement remise. D'abord, et cela a fait partie du message de l'institution centenaire, parce que l'inflation montre quelques signes de faiblesse et reste encore bien en dessous de l'objectif de 2% fixé par le mandat. Faisant craindre la déflation.

Et pour cause, la bonne croissance est le résultat de reconstitutions de stocks que les entreprises n'arrivent pas à écouler faute d'une demande suffisante. Demande insuffisante qui elle même favorise une tendance déflationniste car les banques, peu enclines à prêter, ne jouent pas leur rôle de transmetteurs de la politique monétaire de la Fed à l'économie réelle. En fait, ce sont surtout les entreprises exportatrices qui vont mieux grâce à la faiblesse du dollar et au regain de demande en Asie.

Par ailleurs, le chômage baisse, mais le taux d'activité est au plus bas depuis 1977 en raison de nombreux départs à la retraite mais aussi du découragement des demandeurs d'emplois qui ne s'inscrivent plus sur les listes. Quant au léger sursaut de la consommation, il est en partie le résultat d'une réduction de leur épargne par les américains qui continuent de se désendetter et dont le revenu disponible diminue.

Sortir du QE3 trop rapidement est risqué...

Dans ce contexte de reprise forte mais fragile, accepter une hausse des coûts de financement des banques à un niveau trop élevé risque de favoriser une faible inflation en minant un peu plus l'investissement et de compromettre le regain du marché immobilier. Bref, de faire sombrer à nouveau l'économie américaine.

Janet Yellen n'a donc pas intérêt de ce point de vue à réduire ni à mettre fin au QE3 trop rapidement. Quoiqu'il en soit, une chose est presque sûre : il n'y aura pas de hausse du principal taux directeur avant 2015.

... la politique de la planche à billets aussi

Mais poursuivre la création monétaire à un rythme élevé et maintenir des taux de financement trop bas pour les banques comporte aussi des risques importants. Notamment celui de la formation de bulles spéculatives. Déjà, certains analystes considèrent que les principaux indices boursiers de Wall Street, qui a réalisé cette année sa meilleure performance depuis 1997, sont surévalués.

Encourager les investisseurs à prendre des risques en les détournant des Treasuries et des titres hypothécaires à faibles rendements favorise en effet les marchés boursiers qui risquent une dégringolade si la Fed se retire trop tard. Et la fuite des capitaux des marchés émergents provoqués par les propos de Ben Bernanke jugés restrictifs au mois de juin dernier est là pour rappeler que le monde entier est concerné. Sans compter que le bilan de la banque centrale américaine a explosé depuis le début de la crise.

Certains analystes craignent par ailleurs l'apparition d'une inflation élevée, ou la formation d'une nouvelle bulle du crédit à cause de taux trop bas, lorsque les banques auront repris confiance dans l'économie réelle et permettront une reprise des investissements. Un scénario qui reste toutefois minoritaire.

Bien doser et bien communiquer

Janet Yellen devra donc agir avec tact et précision tout en communiquant de manière exemplaire sur chacune des décisions du comité de politique monétaire de la Fed.

Elle devra par ailleurs choisir le timing parfait pour chaque ralentissement des rachats d'actifs à venir si elle ne veut pas miner les chances de consolider la reprise, voire provoquer une nouvelle crise aux conséquences une fois de plus désastreuses pour les Etats-Unis et le reste du monde.

Épisode 1/4 : La zone euro à l'heure du crash test

Épisode 2/4 : La Chine malade de son système bancaire

Commentaires 4
à écrit le 02/01/2014 à 18:45
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Bonne chance Peuple Américain, car malheureusement les ennuis arrivent.... Que Dieu vous aide dans les futurs tourments... :-(

à écrit le 02/01/2014 à 15:41
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>Romain Renier Bon article avec les nuances à mettre là où il faut: ça change du journalisme répétant les articles d'agence de presse. Merci!

à écrit le 02/01/2014 à 15:02
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Le commun des mortels a toutes les raisons de voir plutôt en ces sornettes rabâchées depuis cinq ans, une crise qui s'éternise, masquée coûteusement et dont la facturation des prises de pertes sera "mutualisée"à vaste échelle. Sortir de la crise pui...

à écrit le 02/01/2014 à 13:59
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Avec le socialo Obama ce serait plutit debut d'une autre.

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