Le parlement européen interdit vingt-deux pesticides dangereux

Par EurActiv.fr pour latribune.fr  |   |  844  mots
Après plus de deux ans et demi de discussions, les députés européens ont adopté la directive sur les pesticides visant à réduire leur utilisation en soutenant la promotion et l'utilisation de produits non chimiques.

Le texte adopté par le parlement européen prévoit l'interdiction de vingt-deux substances présentes dans la composition des pesticides pour leur caractère cancérigène, nocif pour la reproduction ou perturbateur sur le système endocrinien. Cette interdiction prendra effet de manière échelonnée : alors que les deux premiers produits (le Carbendazim et le Dinocap) seront interdits dès 2009, les dernières interdictions ne prendront effet qu'en 2018, après expiration des autorisations.

Les plans nationaux des Etats membres doivent comprendre au moins des objectifs de réduction de l'utilisation des produits exprimés par un indice de fréquence de traitement adapté aux conditions spécifiques des Etats membres.

Les Etats disposent de différents moyens pour atteindre ces objectifs. En matière de fiscalité, la directive prévoit la possibilité pour les Etats membres d'accorder des subventions pour l'utilisation de pesticides moins nocifs. Ils peuvent également mettre en place une taxe sur les pesticides pour tous les produits exceptés les produits non chimiques ou les produits pharmaceutiques à faible risque.

En matière de formation, les Etats membres doivent veiller à ce que les utilisateurs professionnels, les distributeurs et les conseillers aient accès à une formation appropriée et soient informés de l'existence de produits phytosanitaires illégaux et des risques qu'ils présentent.

En matière d'information et de sensibilisation, les Etats membres doivent prendre les mesures nécessaires pour faciliter des programmes d'information et de sensibilisation en direction du grand public sur les pesticides et les risques qu'ils comportent. Ils doivent également mettre en place des systèmes obligatoires de collecte d'informations sur les cas d'empoisonnement aigus et chroniques par des pesticides. Il revient enfin aux Etats membres de mettre en ?uvre des programmes de recherche sur des situations dans lesquelles un lien a été établi entre pesticides et effets sur la santé ou l'environnement.

Enfin, en matière de protection du milieu aquatique et de l'eau potable, dans les zones de sauvegarde pour le captage d'eau potable, des mesures supplémentaires doivent être prises pour éviter la contamination de l'eau par des pesticides. Les Etats membres peuvent établir les zones exemptes de pesticides qu'ils jugent nécessaires pour préserver les ressources en eau potable.

Selon le député ALDE français, Anne Laperrouze (libérale), cette législation donne un signal aux industries de protection des plantes. "Elles doivent mettre sur le marché des produits moins dangereux. Cette législation est aussi un signal adressé aux agriculteurs, qui doivent développer une agriculture raisonnée et durable. Ce texte indique enfin aux citoyens européens que l'UE s'occupe de leur santé en retirant du marché des produits peu sûrs".

"Avec ce texte, on ne pourra plus confondre les notions de danger et de risque tout en tenant mieux compte des réalités économiques et agronomiques. Les agriculteurs ont besoin des produits phytopharmaceutiques pour la santé des plantes, d'où la nécessité de règles harmonisées à l'échelle européenne. Mais la recherche d'alternatives plus respectueuses de la biodiversité, des sols, de l'eau et des abeilles doit encourager les industries à innover avec l'accompagnement nécessaire", a indiqué, quant à elle, le député français PPE-DE (droite) Françoise Grossetête.

Commentant le vote en codécision et en seconde de lecture sur le "Paquet pesticides", Daniel Cohn-Bendit, coprésident du groupe des Verts, a déclaré: "c'est un grand jour en faveur de la protection de l'environnement et de la santé des consommateurs. Pour la première fois, il existe à l'échelle mondiale une législation visant à écarter les pesticides hautement toxiques."

De son côté, le Mouvement pour le droit et le respect des générations futures (MDRGF), trouve à cette législation des "points positifs". "Ce texte constitue une première notamment en instaurant des critères visant à exclure les pesticides dangereux. Cependant il faudra batailler ferme pour que la notion de perturbateurs endocriniens soit définie rapidement et de la manière la plus stricte possible", a déclaré François Veillerette, président du MDRGF.

 


Une législation controversée
Face aux préoccupations grandissantes de la population sur l'impact potentiel des pesticides, la Commission a présenté en juillet 2006 un texte visant à limiter la présence sur le marché des pesticides les plus dangereux. L'objectif de cette législation est de protéger la santé et l'environnement d'une utilisation dangereuse ou excessive des pesticides dans l'agriculture. Le paquet de directives inclut un nouveau règlement sur l'usage des pesticides et les règles régissant leur autorisation en Europe et une directive cadre établissant des objectifs communs et des exigences pour un usage durable des pesticides. La législation proposée a été particulièrement controversée sur deux points : le critère de retrait pour les substances utilisées dans la production de pesticides (une interdiction pour les substances qui posent, potentiellement, des risques sévères pour la santé et l'environnement). Et la reconnaissance mutuelle des produits autorisés dans des zones géographiques spécifiques.