Les conservateurs britanniques créent un nouveau groupe au parlement européen

Le groupe des "conservateurs et réformistes européens" au parlement européen a été officiellement créé sous la houlette des conservateurs britanniques. Alors que le parti majoritaire des Tories stigmatise l'éclatement du centre-droit, d'autres s'inquiètent de son "isolationnisme idéologique".

Prévu de longue date, le départ des conservateurs britanniques du parti populaire européen (PPE-DE) est devenu réalité. La création, lundi 22 juin, du groupe des Conservateurs et réformistes européens (CRE) clôt ainsi cinq mois ininterrompus de négociations menées par les Tories d?un bout à l?autre du continent (

EurActiv.com 02/06/09

).

Pour eux, cet événement constitue une "évolution significative" du paysage politique européen. Timothy Kirkhope, chef de file des députés conservateurs au parlement européen se dit "très excité de ce nouveau développement important de la politique européenne", qui permettra d'assurer à l?Europe un avenir "non fédéraliste".

La notion de "non fédéralisme" a été définie dans le "Manifeste de Prague", signé par tous les membres du groupe. En dix principes, le manifeste insiste sur "la nécessité urgente de réformer l?Union européenne sur la base de l?euro-réalisme, de l?ouverture, de la crédibilité et de la démocratie". Mais évite les sujets qui fâchent.

?La seule chose qu?aient tous les membres en commun, c?est la foi en un avenir non fédéraliste pour l?Union européenne?, a confié Mark Francois, député britannique conservateur chargé des affaires européennes à Westminster, à EurActiv.com.

Bien que Mark Francois se dise ?très confiant" sur la "future prospérité" du groupe, les observateurs européens sont divisés sur les perspectives du CRE de constituer une force d?opposition au sein du parlement.

?Une cabale bizarre fomentée par les ultra-catholiques de Pologne et par les ultra-calvinistes des Pays-Bas". C?est ainsi qu?Andrew Duff, chef des eurodéputés britanniques libéraux et démocrates, a défini le CRE. Cette "cabale" aura, selon lui, un effet "déstabilisateur sur l?efficacité du nouveau parti". ?Ce n?est certainement pas en faveur des intérêts britanniques que les Tories se déplacent du principal courant politique vers les marges politiques", a-t-il estimé, mettant en doute le Credo du nouveau groupe. "J?attends avec impatience de voir le programme de politique commune qu?ils vont devoir mettre en ?uvre ensemble".

Les rangs des CRE seront dominés par les 26 eurodéputés des Tories et par les 15 députés du parti polonais Droit et Justice (PiS), les autres Etats ne disposant que d?un seul député.

Si deux des cinq eurodéputés, déçus par la direction du groupe, menaçaient de le quitter, ils remettraient en cause son existence. En effet, un groupe politique n?a pas le droit d?exister au parlement s?il ne compte des représentants d?au moins sept Etats membres. Par conséquent, les Britanniques pourraient se voir contraints de garantir à ces cinq députés un rôle influent au sein du groupe.

Selon une source proche du PPE, le CRE est une ?coalition fragile?. "Essayer de rendre heureux les cinq membres uniques du parti pourrait s?avérer bien trop difficile" pour les Britanniques, a-t-il expliqué. "Je ne vois pas comment ils auront suffisamment d?influence pour placer en commission ces cinq députés." ?C?est ironique?, a-t-il ajouté "étant donné la générosité du PPE dans ce domaine ; il aurait été avantageux pour les conservateurs de rester membre du PPE."

Mark Francois ne considère cependant pas que l?instabilité du groupe repose sur ces cinq députés. ?Comme vous le savez, le seuil limite pour former un nouveau groupe politique a été élevé. Et bien nous avons dépassé les exigences à la fois par le nombre de députés et par le nombre de pays." "Alors que nous avons annoncé aujourd?hui le positionnement de notre groupe (...), les discussions continuent, et nous espérons trouver plus de députés venus d?autres pays avant la séance plénière du 14 juillet", a ajouté le député conservateur. Il n?a pas souhaité révéler qui pourraient être ces eurodéputés, notant que des discussions étaient "en cours".

Le chroniqueur conservateur Tim Montgomerie, co-directeur de l?influent site internet ConservativeHome, considère qu?il s?agit d?un "moment historique. Le cartel fédéraliste au parlement a été brisé. Pour l?instant, il y a une sérieuse opposition à l?idée d?une union "toujours plus intégrée" au sein du parlement européen." "Les membres du CRE passent pour des eurosceptiques, pro-américains dans leurs positions et socialement conservateurs", a-t-il ajouté.

Jaroslaw Kaczynski, chef du parti polonais Droit et Justice (PiS), note que ?bien sûr, les membres du CRE divergent sur plusieurs questions, et nous sommes convenus de prendre position séparément lorsque les intérêts nationaux entrent en jeux. Mais nous sommes d?accords sur des questions de fond, notamment sur le fait que nous devons considérer de plus près les affaires de l?Union européenne et son avenir ».

Du même avis, le porte-parole des libéraux et démocrates pour les Affaires étrangères, Edward Davey, y voit la confirmation que "les Tories ont quitté le courant dominant de la politique européenne pour joindre leurs forces à des partis de bric et de broc qui ont des idées extrémistes". Pour lui, les conservateurs ont "rejeté leur influence en Europe" pour "l?isolationnisme idéologique".

Lors de son élection à la tête des conservateurs britanniques en 2005, David Cameron avait assuré que son parti se retirerait de la coalition de centre-droit PPE-DE après les élections européennes de 2009 pour créer un nouveau groupement de centre-droit anti-fédéraliste au parlement (EurActiv.com 12/01/09).

 

55 députés venant de huit pays
Les Tories ont annoncé hier avoir passé le seuil requis pour former un groupe, soit 25 eurodéputés issus d?au moins sept Etats membres. Les Conservateurs et réformistes européens (CRE) regroupent actuellement 55 députés européens issus de huit Etats membres, qui sont les suivants :
Belgique : Liste Dedecker (LDD), un député européen.
République tchèque : Parti civique démocratique (ODS), neuf députés.
Finlande : le Parti du centre (Keskusta) siège normalement avec les libéraux (ADLE), mais un député a rejoint les CRE.
Hongrie : Forum démocratique hongrois (MDF), un député.
Lettonie : Pour la Patrie et la liberté (TB/LNNK), un député.
Pays-Bas : Union chrétienne (ChristenUnie), un député.
Pologne : Droit et Justice (PiS), quinze députés.
Royaume-Uni : Parti conservateur avec vingt-six députés.
Le CRE devrait ainsi devenir le quatrième groupe le plus important au parlement


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