Italie, Allemagne, France... l'improbable ménage à trois

Par Romaric Godin avec Olivier Mirguet, à Strasbourg  |   |  575  mots
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Alors que le sommet de Strasbourg a confirmé la divergence franco-allemande, Rome, revenue au coeur des discussions, a la tâche difficile d'ouvrir la voie à un compromis.

Ceux qui attendaient du sommet tripartite de Strasbourg, qui réunissait ce jeudi Nicolas Sarkozy, Mario Monti et Angela Merkel, des annonces fortes en auront été - encore une fois - pour leurs frais. Certes, le président français a promis à nouveau que les trois pays étaient « déterminés à tout faire pour garantir la pérennité de l'euro ». Certes, la chancelière allemande a affirmé que « France et Allemagne allaient travailler conjointement pour modifier les traités » et « faire un pas vers une union budgétaire ». Certes, l'hôte de l'Élysée, qui s'adressera aux Français le 1er décembre à Toulon (souvenir de son discours de septembre 2008 sur la crise financière) a promis que ces mesures seront « annoncées avant le 9 décembre », date du prochain sommet européen de Bruxelles. Mais on n'aura là rien appris de nouveau. Et encore une fois, ces vagues engagements pourraient surtout cacher des divergences profondes qui empêchent de présenter des solutions concrètes.

Symbole de ce fossé : le débat sur le rôle de la Banque centrale européenne (BCE). Les discussions entre la France et l'Allemagne semblent toujours au point mort. Angela Merkel a ainsi insisté encore sur l'immuabilité de la mission de la BCE. « Il y aura des propositions, mais elles n'auront rien à voir avec la BCE », a-t-elle martelé. Une position qui continue de gêner ouvertement Nicolas Sarkozy. Le président français s'est contenté de dire qu'il « n'avait rien à ajouter concernant la BCE » et que la France s'abstiendrait de tout commentaire, « positif ou négatif » sur son action. Mais Paris ne semble pas avoir abandonné l'idée de faire de l'institution de Francfort un prêteur de dernier ressort à la manière de la Fed, comme l'affirmait jeudi matin le ministre français des Affaires européennes, Jean Leonetti. Autre point de friction qui demeure en suspens, les obligations européennes. Angela Merkel a répété que la création de tels titres seraient un « mauvais signal ». C'est donc là aussi un « nein » clair de Berlin à une proposition de Bruxelles que l'on sait soutenue par Paris.

L'échec patent de l'adjudication de dette allemande mercredi n'a donc pas - encore - modifié la fermeté de l'Allemagne sur ces deux sujets cruciaux pour les marchés. En revanche, son idée de durcir les traités européens semble progresser. Mario Monti, le nouveau président du Conseil italien, a poli sa stature de sérieux en soutenant cette idée, particulièrement celle de l'automaticité des sanctions pour les mauvais élèves. Reste à savoir si ce type d'initiative répond à l'urgence de la situation et est réellement capable de rassurer les marchés.

Prochain rendez-vous à Rome

En réalité, ce sommet de Strasbourg aura surtout scellé l'entrée dans le jeu européen de l'Italie. C'est du reste à Rome que se tiendront les prochaines négociations. Dans une configuration où les relations franco-allemandes semblent patiner, l'ancien commissaire européen fait désormais figure d'arbitre. Difficile pourtant de savoir si l'Italie penchera plus du côté allemand que du côté français. Une BCE prêteur de dernier ressort lui permettrait de détendre la pression sur ses taux, mais se démarquer d'Angela Merkel pourrait accroître la défiance des investisseurs. Son seul chemin possible semble désormais de tenter de trouver une voix moyenne. Une tâche lourde et bien difficile.