Dans l'interminable feuilleton de la crise de la dette de la zone euro, un nouveau thème s'invite sur l'agenda des leaders européens pour 2012 : la croissance. "Dans la zone euro, nous sommes au bord de la récession technique", résumait mercredi Jean-Claude Juncker, le Premier ministre du Luxembourg mais aussi président de l'eurogroupe. "Nous devons consolider nos finances publiques mais il faut aussi attirer l'attention sur la nécessité qu'il y a de doter l'Europe d'une véritable politique de croissance", ajoutait-il, indiquant que le sujet serait au centre du prochain sommet des dirigeants européens le 30 janvier.
En effet, au delà du seul aspect technique ? une récession correspond à deux trimestres consécutifs de recul du Produit intérieur brut (PIB) -, c'est également toute la philosophie de la gestion de cette crise qui dure depuis plus de deux ans qui est remise en cause. Ce n'est pas nouveau. L'année dernière, les États-Unis avaient répété, en particulier par la voix de leur secrétaire au Trésor, Timothy Geithner, que la seule approche par la réduction des déficits était dangereuse. En septembre, à la veille d'un conseil européen à Varsovie (Pologne), auquel participait Timothy Geithner, le président Barak Obama avait saisi l'occasion pour souligner combien "les politiques budgétaires doivent partout être guidées par les impératifs de la croissance". Car si dans la zone euro certains pays n'ont d'autres choix que d'adopter des mesures d'austérité, en revanche d'autres, l'Allemagne au premier chef, disposent de marges de manoeuvre pour soutenir la croissance ou au moins mener une politique de relance qui pourrait bénéficier à d'autres membres de la zone euro.
Mais une telle perspective est rien moins qu'évidente tant les seuls arguments allemands relayés par la Commission européenne à Bruxelles portent sur la nécessité de réformer en profondeur nombre d'économies en appliquant des remèdes qui pour le moment n'ont pas donné les résultats escomptés, voire dans le cas de la Grèce, ont conduit au contraire à enfoncer davantage les pays dans la récession. Autre illustration, Berlin refuse toujours que la Banque centrale européenne (BCE) joue le rôle d'acheteur d'obligataire de la zone, au nom de l'aléa moral, et au grand dam de Paris.
Berlin pourrait toutefois devoir agir face à l'urgence et au risque d'une glissade incontrôlée de l'économie européenne qui rendrait vain les efforts de consolidation budgétaires et qui risquerait, à terme, d'alourdir la facture pour l'Allemagne, désormais seul pays parfaitement solvable de la zone euro. Selon le quotidien allemand "Süddeutsche Zeitung", un plan en six points devrait être transmis par Angela Merkel et Nicolas Sarkozy à Herman van Rompuy pour renforcer la croissance, l'emploi et la compétivité des pays membres. Ce plan devra être examiné lors du prochain sommet. Il s'agit de faire baisser le coût du travail, de faciliter l'accès au crédit pour les PME. Un Fond spécial de "croissance et de compétitivité" pourrait être créé. Ce projet sera-t-il suffisant pour freiner la descente aux enfers de la croissance mondiale ? Rien n'est moins sûr tant la plupart des plans de rigueur ont déjà eu un effet négatif.