Michel Barnier plaide pour une philanthopie plus européenne

Par Florence Autret, à Bruxelles  |   |  413  mots
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Le Commissaire européen français veut favoriser le développement de l'activité des fondations hors de leurs frontières nationales, notamment par une réforme de leur régime fiscal. Pour être adopté, un tel projet devra recueillir l'assentiment des 27 pays membres, or la France pourrait faire de la résistance.

 

Si le monde des affaires est de plus en plus transnational, celui de la philanthropie reste encore étonnamment national. Seules quelques grandes institutions, comme la Fondation belge Roi Baudouin, étendent leurs activités au-delà de leur port d'attache. Et encore, est-ce au prix de coûteuses démarches administratives. Si la Fondation Bill Gates devait vraiment prendre pied en Europe, comme elle songe à le faire depuis quelques années, il lui faudrait en théorie créer autant de structures que de pays dans lesquels elle entend être présente.

Les choses pourraient changer si le projet que présentera ce mercredi le commissaire européen Michel Barnier et dont la Tribune.fr a eu connaissance, venait à prendre corps. Le statut de la fondation européenne qu'il soutient permettrait, en s'enregistrant dans un pays d'agir et d'être présent dans tous les pays de l'Union, dès lors que certaines conditions de capital, d'utilité publique et d'activité transfrontalière sont réunies.

Les grandes structures ne sont pas les seules concernées. Le recrutement ou le paiement de chercheurs par des fondations scientifiques serait simplifié. « C'est un outil qui va faciliter la vie », estime une source dans le secteur philanthropique. « Le besoin ira croissant. Les fondations vivent de plus en plus dans un espace ouvert. C'est le sens de l'histoire », prévoit Dominique Lemaistre, directrice du Mécénat à la fondation de France. Cela fait une dizaine d'années que le projet murit dans les cercles philanthropiques européens.

L'originalité du projet de Michel Barnier consiste à ne pas se limiter aux aspects légaux mais de s'attaquer aussi à la fiscalité. La fondation européenne pourrait lever des fonds partout en Europe, quand une fondation française, par exemple, doit obtenir actuellement une coûteuse "preuve d'équivalence" pour faire bénéficier un éventuel donateur belge des avantages qu'il aurait en donnant à une fondation belge. Cette transparence de la nationalité de la fondation au regard du fisc libèrerait les dons et démultiplierait les moyens des 110.000 fondations européennes lesquels totalisent 350 milliards d'euros, selon Bruxelles. La Cour de justice européenne, saisie de cette « discrimination », a tenté de planter un coin dans la pusillanimité des administrations fiscales nationales. Avec des résultats mitigés.

Seul bémol, mais il est de taille. La création de ce nouvel animal juridique suppose l'accord unanime des Vingt-Sept. Or de nombreux gouvernements, dont celui de la France, ont déjà émis des réserves.