"Les spéculations sur l'issue du scrutin français ressemblent à une tempête dans un verre d'eau"

Le spécialiste de la zone euro au sein du fonds d'investissement britannique BlackRock se veut plutôt optimiste sur la situation européenne, mais assez indifférent quant à l'élection présidentielle française.
Tom Mondelaers, gérant obligataire chez BlackRock/DR

Le président français Nicolas Sarkozy a annoncé que "la crise était finie". Est-ce également votre point de vue ?

Je crois que le pire est clairement derrière nous. Il faudra évidemment encore un peu de temps pour que l'on soit assuré que la crise est terminée, mais les efforts qui ont été faits pour empêcher la désintégration de la zone euro et pour restaurer la compétitivité dans les pays qui en ont besoin, ont été un succès jusqu'ici. On est désormais loin des craintes de novembre dernier où les taux de plusieurs pays européens, notamment français, s'envolaient. Evidemment, le processus sera lent et il y aura encore de la volatilité, notamment avec les élections en Grèce où le processus de ratification du nouveau traité budgétaire. Il existe encore plusieurs obstacles à surmonter avant que l'on ne voie le bout du tunnel.

Selon vous, il est donc possible de renforcer la compétitivité des pays en crise ?

Oui. Le potentiel de croissance n'est pas actuellement en Europe dans la demande intérieure. Avec les mesures d'austérité et les réformes structurelles en cours, les gens n'ont pas suffisamment confiance pour dépenser et, évidemment, cela n'est pas bon pour l'économie. La seule alternative pour créer de la croissance réside donc dans le commerce extérieur. En gagnant de la compétitivité, notamment en réalisant des réformes du marché du travail dans le sens de plus de flexibilité, les pays en crise pourront obtenir des résultats en termes de croissance. Et cela facilitera les réformes et aidera à rétablir la confiance.

L'Allemagne devrait-elle rééquilibrer son modèle et favoriser sa demande ?

Je pense que les choses se feront automatiquement. La compétitivité des pays du sud va s'améliorer. Si le coût du travail dans les pays européens périphériques se réduit par rapport à celui des pays de l'Europe continentale, alors les sociétés allemandes auront un fort intérêt à investir dans les pays périphériques. Mais ce mouvement prendra du temps.

Craignez-vous que le mouvement soit cependant stoppé, par les élections en Grèce ou par le référendum en Irlande ?

Ce qui doit être la prochaine priorité, c'est de pouvoir présenter des résultats rapides de la politique actuelle. Une fois ces résultats évidents, le niveau d'acceptation des réformes sera plus fort. C'est ce que l'on peut constater en Irlande, où, même s'il existe toujours un risque de rejet du traité, on voit que les partisans du traité gagnent du terrain justement parce que les bénéfices de la politique menée commencent à apparaître à la population. Je pense donc qu'un rejet irlandais n'est pas vraisemblable.

Observez-vous de près la campagne présidentielle française ?

Pas de très près. Très franchement, toutes les spéculations sur l'issue du scrutin me semblent une tempête dans un verre d'eau. Dans une période troublée, il peut y avoir des réactions violentes sur les marchés. Mais compte tenu de la situation de confiance actuelle, je n'attends rien de tel.

Le débat est actuellement assez vif entre la BCE et la Bundesbank autour de la politique de crise de la BCE. Qu'en pensez-vous ?

La BCE a agi comme il le fallait en baissant les taux directeurs, qui sont désormais très accommodants, et en distribuant 1.000 milliards d'euros dans le système bancaire. Ceci a eu de bons résultats, mais je comprends et partage également les inquiétudes de la Bundesbank concernant la qualité et le montant du bilan de la BCE. Face à la bulle financière de 2008, nous avions deux solutions : la laisser éclater ou tenter de la dégonfler un peu. C'est ce dernier choix qui a été fait, mais par le jeu des aides d'Etat aux banques, le risque s'est reporté sur les budgets. Et c'est ainsi qu'a éclaté la crise de la dette souveraine. Aujourd'hui, le risque de cette crise est reporté sur le bilan des banques centrales. Il est logique que la Bundesbank soit nerveuse à ce sujet.

La « Buba » met en avant le risque d'inflation. Cela vous inquiète-t-il également ?

Non, je ne pense pas que la politique de la BCE soit une source d'inflation. Le risque de hausse des prix est davantage lié à la demande hors de la zone euro et à l'énergie.

Concernant la fusion entre le FESF et le MES, la proposition allemande de faire courir les deux systèmes parallèlement vous paraît-elle positive pour la confiance des investisseurs ?

750 milliards d'euros, c'est toujours mieux que 500. Et une structure permanente est toujours plus utile qu'une structure temporaire. Mais je crois que le plus important est de disposer d'une clarté sur les conditions de l'aide et sur son fonctionnement. On sait, de toute façon, que la somme disponible est insuffisante pour sauver l'Espagne ou l'Italie si le cas se présentait.

Est-ce le moment pour vous d'investir dans les obligations souveraines de la zone euro ?

Je pense qu'il existe actuellement de meilleures alternatives, notamment les obligations d'entreprises. Les sociétés européennes se sont désendettées et affichent un niveau de risque moindre pour un rendement équivalent.

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