La fin de l'exception fiscale helvétique

Par Par Yves Petignat, Le Temps  |   |  469  mots
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Menacée d'être placée sur une liste noire si elle ne respecte pas les directives européennes en matière de fiscalité des sociétés étrangères, la Suisse -et ses cantons- commence doucement à se mettre en conformité, explique le quotidien suisse "Le Temps". Extraits.

Le statut privilégié des holdings et des sociétés étrangères en Suisse est condamné. Les cantons et la Confédération l'ont désormais tous admis et s'apprêtent à céder face aux pressions européennes. Mais personne ne sait encore vers quelle taxation les cantons devront se diriger. Le temps presse, car la présidente de la Confédération Eveline Widmer-Schlumpf a annoncé aux Européens qu'elle leur préciserait avant la fin du mois de mai ses intentions pour l'ouverture de discussions sur le statut fiscal des entreprises. (...)

Car la menace est claire, même si à Bruxelles on refuse de parler d'ultimatum. Si aucun progrès n'est enregistré d'ici à juin, la Commission pourrait laisser liberté aux Etats membres de placer la Suisse sur une liste noire, comme l'a fait l'Italie il y a plusieurs années, et d'exercer des mesures de rétorsion administratives. Cela fait sept ans que les Etats européens font pression sur la Suisse, irrités de voir s'installer sur les bords du Léman ou de la Limmat le siège des grandes multinationales, de sociétés de négoce, de holdings ou de «sociétés boîtes aux lettres» désireuses de fuir la pression fiscale européenne. A Genève, le bénéfice d'une société mixte dont moins de 20% de l'activité se déroule en Suisse est taxé 12,5%, à Londres 24,1%. La société mixte est exonérée sur la part du revenu de source étrangère.

«La plupart des cantons admettent que statuts fiscaux privilégiés devront être abandonnés. Ils savent qu'il faudra s'adapter aux dispositions en cours au sein de l'UE», confirme Jörg Walker, chef fiscaliste chez KPMG à Zurich. Beaucoup de cantons ont anticipé une issue qu'ils jugent inéluctable. Ainsi, Neuchâtel va supprimer la discrimination entre sociétés normalement imposées et sociétés au statut privilégié. En parallèle, l'impôt sur les bénéfices prélevé par l'Etat et les communes sera réduit de moitié en cinq ans pour atteindre 10%.

«Plusieurs autres cantons ont déjà entrepris des démarches internes en vue d'une adaptation aux exigences européennes. Le problème, c'est que nous ne savons pas encore dans quelle direction ira la solution envisagée par la Confédération», regrette le conseiller d'Etat zougois Peter Hegglin, vice-président des directeurs cantonaux des Finances.

Le système neuchâtelois, dont le Jura pourrait reprendre le principe mais de manière moins audacieuse, est difficilement extensible à tous les cantons. Baisser l'ensemble des impôts des entreprises dans les cantons de Zurich, Bâle-Ville, Vaud ou Genève conduirait à une hémorragie fiscale insupportable. Moins 350 millions par exemple pour Genève.

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